Citations sur Quatre murs (39)
Je m'interroge devant les grandes familles unies, les frères et sœurs que rien ne semble avoir séparés , sont-ils meilleurs que nous? Plus aimants?
Les êtres proches, vivants ou morts , sont à la fois absents et omniprésents , on ne se défait jamais tout à fait de leur absence.
« Ma mère insistait pour que l’on vienne, on s’y rendait contraints. Heureux de nous retrouver ? Comment savoir ? Presque de la joie, et de l’exaltation quand le toit apparaissait derrière les arbres. Mais lorsque les voitures s’engageaient sur le chemin, l’agacement me gagnait déjà. Les effusions, les bagages trop chargés de mes sœurs, les recommandations de ma mère, les remarques de mon frère. Tous l’étaient, agacés, mais personne ne voulait le reconnaître. Dissemblances d’adultes impossibles à combler. »
Ces murs nous ont façonnés, nourris, portés. Tu imagines parfois notre vie, sans Somanges? Je repense à nos rires, notre complicité, nos disputes, ces petits riens du quotidien qui ne laissent de traces qu’à l’intérieur.
"Qu'est-ce que vous racontez ? On a pris des déménageurs pour que cela ne pèse sur personne" proteste Saul.
"Le poids, ironise Réna, tu crois que les déménageurs servent à ça ? Nous décharger ?" p.9
Il ne lâchait pas, se cramponnait aux objets. C'était fascinant son pouvoir sur les objets, celui des choses sur lui. Une voiture cassée, une poupée décapitée, il les ressuscitait. Pas d'énervement, pas de cris. Penché sur son établi, il s'affairait, et les tensions s'apaisaient. Ma mère criait, riait, se fâchait. Mon père ne faisait pas d'éclats. La lueur dans les yeux variait selon son humeur. p.28
Je ne me souviens pas de la dernière fois ou nous avons été tous réunis, les frères et sœurs. Aujourd'hui ce "tous" ne les concerne pas, mais plutôt mes quatre enfants, Anouk et moi. p.21
"Peut-être que je n'étais pas faite pour la vie amoureuse. Papa a dit un jour à Hélène qu'elle n'était pas obligée de se conformer à une vision étriquée de la vie de femme, avoir un mari, des enfants. Si elle aspirait à autre chose, il la soutiendrait. Elle a quitté la table, mais, pour Papa, c'étaient des paroles d'amour, je l'ai tellement enviée, elles sont restées gravées. J'aurais voulu qu'il me dise, tu n'as pas à être amoureuse, ce n'est pas le seul épanouissement possible, les sentiments immenses que tu éprouves pour tes frères, tes parents, sont ta force."
Lire, c'était trahir. S'extraire. S'échapper. Un monde nouveau, en faire partie à tout prix.
D'après Anouk, il en résulterait une forme de culpabilité qui m'engluerait. Larédemption dans l'exercice d'une activité manuelle. Elle me ramènerait aux miens, à ce que nous savons faire. Une famille d'artisans. Mes parents. Grands-parents. Arrières-grands-parents. Grecs. Mêmes origines. Côté maternel et paternel. Dissemblables malgré tout. Les uns orthodoxes, les autres juifs.