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Critique de thomassandorf


Un jeune fermier solitaire assiste à l'exécution de son bétail par une gamine. Dévasté par ce carnage, il part à sa poursuite de l'enfant maléfique. Il abandonne au ranch sa soeur jumelle marquée par un terrible secret. Sa quête de vengeance sera contrariée par l'irruption de narcotrafiquants qui tournent autour de la fille. A cheval entre polar, western et road movie initiatique en plein Ouest sauvage, le texte teinté de « nature writing » verse dans une violence parfois inouïe.

L'auteur a choisi de se livrer à une surenchère de descriptions sordides et misérabilistes. Inspirée (peut être) de McCarty ou d'un Don Winslow, l'auteur de A sang perdu malgré l'âpreté de son style n'a malheureusement pas la puissance de ces maîtres, et sombre dans une écriture baroque, tendance rococo sauvage.

« L'eau commença à former une flaque de crasse placentaire noirâtre autour d'elle sur le siège en tissu, il détourna le regard. »

Il faut dire que le titre français a été particulièrement bien trouvé par l'éditeur : le mot « sang » figure presque à chaque page ; quant à « perdu », c'était un peu mon état d'esprit tant j'ai peiné à m'accrocher aux personnages et à leurs péripéties à la logique incertaine : physiques flous et sentiments sommaires calés le plus souvent sur la répulsion, la peur, la culpabilité ou la haine.

Certes, à force de répétitions, on sent le cuir et la transpiration sur la peau tannée à travers un texte très viril et sans subtilité, mais l'ensemble souffre de situations plaquées qui font trop « genre », et accumule des poncifs psychologiques centrés sur la culpabilité et la violence.

« La seule façon d'influencer le destin d'un autre c'est de le détruire. »

Une grosse déception compte tenu des excellentes critiques Presse. Comment justifier ces descriptions à vocation poétique mais qui, quand on les relit parfois avec attention, dévoilent toute leur incohérence ? « le silence était assourdissant, il se réverbérait contre la plaine, renvoyant l'échos de son souffle depuis les hauts plateaux au loin dans un bruit fracassant. »

Surviennent vers la fin quelques propos existentiels sur le destin et la violence, pour faire croire que le personnage principal a vécu une forme d'initiation :

« le fratricide a peut-être été le meurtre originel, mais ça revient à effacer un des côtés de ton visage de la surface de la terre. Les parricides sont une vengeance personnelle contre celui qui t'a créé en te condamnant à errer sur une terre où le désert existe. »

Evidemment cela permet de calmer le jeu après une vingtaine de pages de baston brouillonne où la confusion est totale pour le lecteur comme pour le personnage principal. Hélas, on s'attend tellement à ce règlement de compte entre gangs et les ressorts narratifs sont tellement pauvres que la scène manque cruellement de la tension nécessaire pour percuter le lecteur.

Au final, rien ne sauve vraiment à mes yeux ce livre qui aurait gagné en puissance en l'amputant des deux tiers. En le refermant, j'ai un peu l'impression d'avoir été arnaqué comme si je venais d'avaler un chile con carne, mais sans viande ni légumes, juste un plat avec trop de sauce bourrée de piments. Et là je clame : non à la mal bouffe, même en littérature !

Pour ceux qui sont tentés par ce genre d'histoires mais en incomparablement mieux, je préconise Méridien de Sang de Cormac McCarthy, La griffe du chien de Don Winslow ou le Grand nulle part de James Ellroy ou encore Lost man de Jane Harper. Mais A sang perdu, vous l'avez compris en ce qui me concerne, je lis et puis j'oublie.

Thomas Sandorf
Lien : https://thomassandorf.wordpr..
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