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Citations sur La Désirade (17)

Les premiers jours du nouveau pouvoir, en cette fin d’hiver gris et pluvieux, sont chargés de promesses comme un mois de mai. Le droit au travail est reconnu et les Ateliers nationaux sont créés. Le salaire est de deux francs par jour. Quarante mille chômeurs se précipitent et on monte de province en sabots pour s’inscrire. Les titres de noblesse sont supprimés. Le suffrage universel direct est institué. L’esclavage dans les colonies est aboli. La journée de travail est réduite à dix heures. La paix est déclarée aux peuples du monde. Lafitte est heureux : la Désirade n’était pas que le nom d’une île au loin.
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Au moment où il va se retirer, Karl Marx le rappelle.
– Je ne crois pas avoir entendu votre réponse en ce qui concerne la nature et l’objectif du phalanstère que vous aviez tenté de créer au Nouveau Monde et qui vous a laissé cet idéal vague sur fond de pessimisme que je constate en vous. Industriel ou agricole ?
– Ni l’un ni l’autre, monsieur Marx.
– Le commerce, le négoce ?
– Dans une certaine mesure. J’étais pirate,  Marx se lève et sa chaise tombe.
– Pirate ? Un vrai pirate ?
– Un vrai. J’avais quand même des lettres de course.
– Vous ne produisiez rien par vous-même ?
– Non, Monsieur. Rien. Je prenais aux autres. Marx redresse sa chaise, se rassoit.
– Je suis heureux que vous ayez échoué. Cela aurait été une insulte à toutes les théories.
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Le vieux marquis de Chérence, qui a émigré parmi les premiers avec le comte d’Artois et porte encore culotte et perruque blanche poudrée, y retrouve le général Humbert, ancien lieutenant de Hoche qui, républicain acharné, a quitté la France quand Napoléon s’est fait sacrer empereur. Il arbore l’uniforme du commissaire en mission dessiné par le peintre David : parements brodés, ceinture tricolore et bicorne emplumé. Question d’honneur et de convictions, les deux hommes ne se parlent pas, mais comme l’un et l’autre sont fanatiques du jeu de piquet, ils engagent des parties muettes avec, chacun debout derrière sa chaise, l’un, son majordome en perruque poudrée, encore plus vieux que son maître, l’autre, son ancien ordonnance qui en est resté aux soldats de l’an II et porte sa chevelure en tresses. Ce sont eux qui font les annonces et comptent les points.
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Et Nicolas-Jean est heureux, au doux balancement du canot ou au pas berceur de son cheval, à côté de son nouvel ami et en pensant à la femme qu’il aime. Sans prononcer le mot. Être avec un ami et rêver d’un amour absent, qui peut espérer mieux ? Le bonheur est toujours une île au loin.
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A Bordeaux, les gens et estimés sont négociants en vins. Ou en nègres. Ou en vins et en nègres. Les tonneliers ne sont que des artisans qui n'entrent pas dans la maison, seulement à l'office. Être vinaigrier, c'est franchir un échelon. On récupère les mauvais vins, on devient négociant aussi, une sorte d'associé des grands. Ils vous font venir dans leur bureau. Bien sûr, ils ne vous invitent pas encore à vous asseoir. Ce sera pour la génération d'après.
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--Ont-ils l'air hostiles ?
Une volée de boulets passe au-dessus du bateau français. L'un des boulets atteint le cacatois de misaine qui s'écrase sur le pont.
-- Ils ont l'air hostiles, dit la vigie.
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Tout se passe entre messieurs en habit et cravate à perle, parlant un anglais plutôt châtié, consultant d'un oeil lointain la montre en or pendue à la chaîne du gilet. De l'ancienne flibuste, seul est demeuré le décor de la mer au bleu profond bordé d'émeraude clair, puis de sable très blanc qu'éventent de leur palmes les cocotiers de la rive.
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Sans salutations d'usage, pendant vingt minutes, le major injurie le chef indien si fort et si vite que Lafitte a du mal à traduire. On n'a pas le droit de tromper à ce point. Infâme manque de parole. Satané, damné, sacré mensonge... Le chef laisse passer l'orage. Puis il tire sur sa pipe, crache, tire de nouveau sur sa pipe. Le major, debout, attend une explication. Elle vient, très bas, comme si elle coulait de la masse graisseuse de la figure du chef, comme si elle fondait du corps difforme dissimulé sous le tapis.
_ Dans ce pays, dit le chef, pour survivre il a toujours fallu faire trois choses : tuer, voler et mentir. Depuis que les hommes blancs se sont installés ici, tuer est devenu presque impossible. Voler est de plus en plus difficile. Qu'est-ce qui reste ?
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Il est des moments où tout le bonheur de la vie est dans l'attente.
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Son bateau s'appellera La Désirade. C'est un nom d'île, la première île qu'on aperçoit quand venant d'Europe après avoir traversé l'Atlantique, on touche au Nouveau Monde et aux Antilles. La Désirade, si longtemps attendue et espérée. Nicolas-Jean n'y a jamais débarqué (il n'y a d'ailleurs ni port, ni mouillage), mais comme tous les marins il en connaît le nom et la silhouette au loin sur l'horizon. Le bonheur est en forme d'île au loin.
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