La Bougainvillée, tome 2 : Quatre-épices

La mer, vous savez bien… C’est vous, qui m’avez appris qu’elle vous peut laver de tout.

J’ai toujours cru que la dame de Quatre-Épices serait une Française de l’Isle de France, j’ai cru ce qu’elle m’a dit plusieurs fois: que de longue date, dans ses rêves, elle avait choisi ce pays pour être son pays. Qui, mieux qu’une patriote, peut vanter à un allié hésitant les charmes de son pays?

Une femme observe plus finement qu’un autre homme les mouvements d’un homme, sa faiblesse lui a donné des armes subtiles pour le deviner, le contrer, le vaincre.

À quinze ans, souffrir d’amour est un délice. On en souffre avec une violence extrême, et dans l’espérance: c’est délicieux.

Quand on a beaucoup aimé Robinson Crusoé dans son enfance, on sait au moins bâtir une hutte en rondins de bois.

Il faudrait faire le plaisir avec les hommes et l’amour avec les femmes!

Quand une fille a la peau noire, au début on a du mal à la voir belle mais, au bout d’un moment, on voit. On voit même si elle est plus belle ou moins belle qu’une belle blanche.

« Être heureux comme un poisson dans l’eau », on dit: « Être heureux comme un esclave chez les Noble-court. » Ce sont les petits blancs à la vie dure qui ont inventé le proverbe, mais les noirs le répètent.

Pour affranchir, ou il faut que l’esclave soit jeune, ou il faut que le maître soit cruel. Imposer la liberté à celui qui la reçoit comme un inconnu terrifiant, ce n’est pas un bienfait.

À chaque heure sa joie ou sa peine, et quand de la joie peut être prise il la faut prendre sans mélange, j’ai appris cela d’un brigand de Pinto, qui n’était pas si mauvais philosophe.