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Critique de Lamifranz


Il y a des auteurs, comme ça, qui ont écrit une oeuvre considérable en nombre et en qualité, et qui pour la plupart des gens, restent l'auteur d'un seul livre. André Dhotel fait partie de ces auteurs et « le Pays où on n'arrive jamais » fait partie de ces livres.
S'il y avait un classement des illustres inconnus, André Dhotel serait à coup sûr dans le peloton de tête. Né en 1900 (comme Saint-Ex, Prévert, et Desnos, autant dire que c'était un bon cru) et mort en 1991, André Dhotel a écrit une bonne quarantaine de romans, une bonne vingtaine de recueils de nouvelles, contes, et courts récits, plusieurs recueils de poèmes, ainsi que des essais, dont plusieurs consacrés à son compatriote ardennais Arthur Rimbaud. Curieusement, sur ces quarante romans une poignée seulement a touché le grand public, un seul l'a bouleversé. Plus curieusement encore, le succès de ce livre qui suit sa propre gloire, n'a pas eu pour conséquence d'attirer l'attention des lecteurs et des lectrices sur les autres pans de l'oeuvre de l'écrivain.
Il est vrai que ce livre à lui tout seul est un monde. Et quel monde !
C'est l'histoire de Gaspard un fils de forains, élevé par sa brave de femme de tante, qui souhaite lui éviter tous les tracas d'une vie de nomade. Dans ce petit village de Lominval (situé très précisément dans le département des Ardennes, mais pas nettement localisé), Gaspard passe pour être un gamin original qui a le don d'attirer les catastrophes et les évènements bizarres. Ce n'est donc pas étonnant que sa route croise celle d'un autre gamin (en fait une gamine, mais, chut !) qui recherche le pays de son enfance où l'attend sa « maman Jenny » Gaspard décide de l'aider et tous deux partent à la recherche du « pays où on n'arrive jamais ». Ils sont rejoints par un troisième compagnon, un cheval pie, indomptable, qui n'obéit, allez savoir pourquoi, qu'à Gaspard.
Le trio arpente les routes des Ardennes et de la Belgique, sans succès, jusqu'au jour où…
« le pays où on n'arrive jamais » échappe à toute analyse classique : c'est un conte initiatique, bien entendu, mais pas seulement : il y a une morale à cette histoire : continuer à croire à ses rêves jusqu'à ce que l'on trouve. Vous avez dit naïf ? Bien sûr que c'est naïf. Où donc avez-vous vu que la naïveté était une faiblesse ? La naïveté est une des formes de l'innocence. Et ici, dans domaine de l'enfance, elle en est le tissu. Car au bout du compte « le pays où l'on n'arrive jamais » c'est le retour à cette innocence, à ces rêves, ces projets, dont on ne sait pas s'ils seront aboutis ou pas. Vous vous souvenez, dans Amélie Poulain, Dominique Bretodeau se retrouve plongé dans son enfance, en retrouvant par hasard (un hasard qui s'appelle Amélie) une boite en fer-blanc qui contenait des souvenirs qui n'appartenaient qu'à lui. Ce jour-là, Dominique Bretodeau avait atteint, certainement, « le pays où l'on n'arrive jamais ».
C'est un pays réservé aux enfants. Ou aux grandes personnes qui ont gardé un esprit d'enfant. Ça ne vous rappelle rien ? « le Petit Prince » bien sûr : « … je veux bien dédier ce livre à l'enfant qu'a été autrefois cette grande personne. Toutes les grandes personnes ont d'abord été des enfants. (Mais peu d'entre elles s'en souviennent.) Je corrige donc ma dédicace : À Léon Werth quand il était petit garçon ».
Des passerelles comme celle-ci, on peut en trouver d'autres : le prénom Gaspard m'a rappelé le Gaspard monté en croupe sur un cheval (était-il bai ?) avec son « Oncle Benjamin » (dans le roman de Claude Tillier). Et cette autre correspondance qui saute aux yeux : dans « L'histoire sans fin » de Michael Ende, Bastien Balthazar Bux et Atréju suivent un même itinéraire, pour sauver le monde imaginaire et délivrer la Petite Impératrice…
Ce livre est une merveille d'imagination, de fantaisie et de poésie. A lire bien sûr si on a gardé une âme d'enfant. Allez, il ne faut pas grand-chose pour y arriver : juste une petite madeleine…

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