On dit que le silence qui suit Mozart, c'est encore du Mozart. On ne dit rien sur le silence qui suit un coup de feu. Et la mort d'un homme. J'imagine qu'on n'est pas si nombreux que ça à l'avoir entendu.
En dehors de la chasse, mon père avait deux
passions dans la vie : la télé et le whisky. Et quand il n'était pas en train de chercher des animaux à tuer aux quatre coins de la planète, il branchait la télé sur des enceintes qui avaient coûté le prix d'une petite voiture, une bouteille de Glenfiddich
à la main. Il faisait celui qui parlait à ma mère, mais, en réalité, on aurait pu la remplacer par un ficus, il n'aurait pas vu la différence.
Les têtards, vous savez, il y a des gens qu’il ne faut pas approcher. Vous apprendrez ça. Il y a des gens qui vont vous assombrir le ciel, qui vont vous voler la joie, qui vont s’asseoir sur vos épaules pour vous empêcher de voler. Ceux-là, vous les laissez loin de vous.
À la maison, j’ai fabriqué de nouvelles marionnettes, inventé de nouvelles histoires. Il s’asseyait devant moi, mon tout petit spectateur. Je lui parlais de princesses qui se prennent les pieds dans leur robe, de princes charmants qui font des prout, de dragons qui ont le hoquet…
Un peu d’acné, quelques rapports sexuels, les études, les gosses, le boulot et hop ! Ils seront vieux et ils n’auront servi à rien. Moi, je voulais être Marie Curie. Je n’avais pas de temps à perdre.
Je suis rentrée à l’école dans l’année supérieure. Les autres élèves avaient un an de plus que moi, mais je les voyais toujours comme une armée de crétins cruels et frivoles. Ça se reniflait le derrière, sans oser passer à l’action. Les filles avaient peur de passer pour des traînées et les garçons, pour des obsédés. Alors qu’ils étaient simplement des organismes étourdis par la cacophonie de leur système hormonal en pleine mutation. Et il n’y avait aucune honte à ça.
Les histoires, elles servent à mettre dedans tout ce qui nous fait peur, comme ça on est sûr que ça n'arrive pas dans la vraie vie
Les histoires, elles servent à mettre dedans tout ce qui nous fait peur, comme ça on est sûr que ça n’arrive pas dans la vraie vie.
"Sous ses gros sourcils il a fait quelque chose de curieux. Il n’a pas bougé. Et, en même temps, il m’a prise dans ses bras. Avec ses yeux."
À la maison, il y avait quatre chambres. La mienne, celle de mon petit frère Gilles, celle de mes parents et celle des cadavres.