Le décor ? le conflit entre la Palestine et l'Israël
Les protagonistes ? Quatre personnages enfermés dans leur histoire personnelle.
En France :
Amandine la soixantaine retirée à la campagne, mais pour oublier quoi ?
Fernando, rouage important ou pas du Fonds, genre FMI qui étudie, sur dossiers, les subventions accordées aux pays demandeurs. Il vit enfermé dans sa tour vitrée, sa tour d'ivoire, vit enfermé en lui, refuse tout contact direct avec les représentants de ces pays, totalement déconnecté de la réalité. Sa vision sera remise en cause par un départ sur le terrain palestinien. « Une part de lui-même s'accrochait à cet ancien Fernando Clerc qui avait pouvoir de vie ou de mort sur ces pauvres types. Qui pouvait choisir, à l'abri de son bureau gris, combien de fonds seraient octroyés à leur survie et de quelle façon. »
En Palestine :
Nadr, le poète, le fumeur de joints, le pacifique qui voit dans la religion autre chose que ce que les barbus proposent et son frère Khalil qui choisit le camp du Hamas, de la violence ; Deux visions palestiniennes du conflit
Le désespoir pousse les jeunes palestiniens à exporter leur colère en posant des bombes. C'est ce que fait Khalil parti à Paris. Nadr, toujours persuadé qu'il peut sauver son frère, le suit à Paris où il espère qu'une petite voix lui dira, elle, c'est ta mère.
L'auteur joue du contraste entre la réalité que vivent Nadr et Khalil et l'abstraction des chiffres avec lesquels Fernando jouent, pardon, sur lesquels il travaille. Cette barrière est la colonne vertébrale de Fernando qui ploie lorsqu'il est confronté à la réalité du conflit.
Qu'ont-ils de commun ? Hormis leur solitude, leur enfermement, prisonnier de son parcours ? Je le saurai au fil des pages.
Cyril Dion nous conduit, par le chemin de leurs pensées, de leurs actions mais pas de leurs omissions (oui, je sais très mauvais jeu de mots) vers leurs destins, l'accomplissement de leurs vies, comme la chrysalide quitte son habit pour devenir un
imago et… mourir.
L'histoire débute par deux pages poignantes, qui paraissent totalement hors sujet, mais…
Cyril Dion amène beaucoup de réflexions, de questions, une fois le livre refermé. La discussion n'est pas close avec de telles phrases qui résonnent en soi.
« Dans le coeur des plus petits grandissait la haine instillée par la souffrance des plus grands. »
« Chacun de nous vit avec sa propre prison, plus ou moins large. Et fait ce qu'il peut pour en sortir… »
« Pour la première fois, il ressentait la Palestine comme un fardeau ».
« A partir d'un certain degré de pouvoir, les gens ne réfléchissent plus normalement. Vous avez déjà remarqué cela ? Ils cessent de se comporter comme des êtres humains. Ils ne voient plus les enfants mourir, la bonne terre être emportée par la crue, les innocents se faire parquer comme des rats dans de minuscules territoires entourés de soldats et de barbelés. Ils voient des intérêts. Des conflits d'intérêts. Des raisons d'Etat. »
Un livre, servi par une écriture percutante, intense, forte qui touche du doigt, par la fiction, une réalité brutale, le conflit israélo-palestinien. Une belle trouvaille des 68 premières fois.
Lien :
http://zazymut.over-blog.com..