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Je ne sais pas pourquoi mais je m'attendais à un one-shot ce qui n'est pas le cas malgré l'impressionnant nombre de pages et un grand format.

Cette première partie va se concentrer sur la traversée qui va se révéler assez périlleuse à cause d'une mutinerie qui se prépare. Les cales sont chargés d'or ce qui attise bien des convoitises. C'est surtout la volonté d'aller vite pour rejoindre Sumatra dans les plus courts délais qui entraîne un mécontentement. En effet, point de réapprovisionnement sur la terre ferme après des mois de navigation en pleine mer.

On a l'impression de revivre l'exploitation par des actionnaires qui forcent à des conditions de travail assez désastreuses surtout que la discipline est d'enfer.

Je connaissais l'histoire des révoltés du Bounty mais pas celle du Jakarta, un navire marchant appartenant à la puissante compagnie hollandaise des Indes orientales.

Visiblement, il s'agirait de l'une des pages les plus sanglantes de l'histoire maritime. Je ne sais pas vraiment de quoi il s'agit au juste, ne voulant pas spoiler un récit que je ne connais pas.
Les auteurs livrent une partition vraiment impressionnante de qualité que cela soit au niveau du scénario que sur la forme graphique. Xavier Dorison est véritablement au sommet de son art pour nous conter ce récit plutôt sombre qui procure ses effets tonitruants.

Evidemment, il y a une atmosphère quasi étouffante à bord de ce navire avec des personnages assez charismatiques.

Je ne peux que participer au concert de louanges qui entoure cette BD car c'est vraiment mérité. Quand le résultat est là, on ne peut que constater. Cela fait du bien de lire une BD aussi puissante et magistrale.
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Merci à ma fille pour ce très beau cadeau...
L'objet "livre" en lui-même est magnifique : la couverture texturée à dorures annonce l'aventure et la noirceur de l'âme humaine. le format 25 * 34 , le papier glacé épais, le signet...
Et puis l'intérieur : on commence par la mise en scène du périple : plan du navire, carte des routes maritimes et ... deux doubles pages d'introduction. La première, bleue, profonde et invitant au voyage, suivie d'une deuxième noire et inquiétante, toutes deux accompagnées de la voix off qui va nous suivre durant cette première partie du voyage dans l'atlantique...
On pourrait disserter longuement sur le style graphique réaliste, le trait précis, la profusion de détails, les couleurs qui magnifient les cases, je n'y trouve que des qualités (même si une case p73 est restée mystérieuse pour moi).
Le scénario, puisqu'inspiré d'une histoire vraie, ou plutôt d'un mystère vrai,
est "bordé". Reste tout le côté interactions entre personnages, psychologie de ces derniers, émotions... le scénariste crée un microcosme riche et cohérent, fabuleusement servi par la mise en case qui insiste sur les regards, les jeux d'ombre.
Une bande dessinée qui peut trôner avantageusement sur un rayonnage de bibliothèque. En attendant le second volume...
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Pour commencer son règne, mieux vaut être haï que méprisé.
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Ce tome est le premier d'un diptyque. Sa première publication date de 2022. Il a été réalisé par Xavier Dorison pour le scénario, et par Timothée Montaigne pour les dessins, Clara Teissier pour la couleur. Il compte cent-vingt-huit pages de bandes dessinées. Il s'ouvre avec une introduction d'une page, rédigée par le scénariste, intitulée L'extinction de l'âme, phénomène décrit par Philippe Zimbardo, et évoquant la réalité historique du naufrage du Jakarta, comme cas d'école de l'arrêt complet de l'empathie d'un groupe d'humains associé à la suspension de leur jugement moral, avec pour conséquences immédiates sadisme et massacre. Viennent ensuite un plan en coupe du navire Jakarta sur deux pages, puis les routes maritimes sur un planisphère, et celle empruntée par le Jakarta.

Quelque part sur île déserte, une femme se tient face à la mer et regarde l'horizon. Un individu se fait la réflexion que celui qui lira ces mots apprendra bientôt à le mépriser et à le haïr. Il serait aisé pour lui de s'attribuer la phrase : Tous devront simplement être rayés de l'existence. Ce serait un tort car ces paroles sont celles du roi Agamemnon, plus noble citoyen de la plus noble des sociétés, patrie de la philosophie et du droit. Alors quand viendra l'envie de le juger, de lui cracher au visage ou de lui briser les os à coups de pierre, il faudra repenser à Agamemnon et se poser une question et une seule. Si le sage roi de Mycènes, héros de la guerre de Troie, est la mesure du bien, qui pourra être celle du mal ? Chapitre un : Seuls les désespérés. À Amsterdam en 1628, Francisco Pelsaert se présente devant le comité des directeurs de la VOC : Vereenigde Oost-Indische Compagnie, c'est-à-dire la Compagnie néerlandaise des Indes orientales. le responsable de la séance évoque ses états de service et l'informe qu'ils l'ont nommé subrécargue du Jakarta, le tout dernier Returnsheppen de la compagnie. Outre le camée, ils emporteront aux Indes plus de trois cents mille florins en pièces et bijoux pour les négoces, un montant jamais embarqué par un navire de la VOC.

Le responsable du directoire continue : le navire doit appareiller cette nuit. Il indique le nom du capitaine ; Arian Jakob. Pelsaert le connaît de réputation : un ivrogne. le capitaine fait son entrée dans la pièce et salue les directeurs, tout en se plaçant aux côtés du subrécargue. le directeur indique ensuite l'identité du second : Jeronimus Cornelius. Un novice en matière de marine, mais un expert en épices, chaudement recommandé par plusieurs de leurs connaissances. Un homme d'une éducation et d'un savoir inégalés pour ce type de poste. Ils ont toute raison de penser que ce second surprendra Pelsaert et Jakob. le même soir, Wiebe Hayes va chercher dame Lucrétia Hans dans sa demeure. Elle doit faire le voyage sur le navire Jakarta pour rejoindre son époux. Elle emmène avec elle Hugger, son petit lémurien de compagnie. Ses malles sont prêtes et elle descend pour rejoindre le matelot venu la chercher. le carrosse l'emmène au port et passe lentement au milieu de la foule du peuple vaquant à ses occupations pour remplir les formalités d'embarquement.

Difficile d'échapper à la promotion de cette bande dessinée à sa sortie : un récit tiré d'une histoire vraie, un cas d'école d'individus asservis de leur propre volonté à une personne toxique, une soumission volontaire conduisant à une oppression systémique. En avançant dans le récit, le lecteur constate que c'est exactement ça, ni plus ni moins. L'artiste s'ingénie à réaliser une reconstitution historique avec application, presque de manière scolaire. Ça commence bien sûr avec la coupe du navire Jakarta, minutieuse et schématique, indiquant la localisation de onze éléments : cale, faux-pont, pont principal, pont, timonerie, cahute, cabine, cabine supérieure, gaillard d'arrière, dunette, gaillard d'avant, poulaine. Après l'introduction de quatre pages, le lecteur découvre une superbe vue plongeante sur la cour du bâtiment abritant le conseil des directeurs, avec une perspective impeccable. À l'intérieur, il peut admirer les boiseries, le parquet, les tentures. de même, chez les Hans, il peut admire les appartements de Lucrétia dans une vue du dessus en oblique. En page vingt-deux et vingt-trois, il découvre un dessin en double page, une vue massive du Jakarta à quai dans laquelle il ne manque ni une planche à la coque, ni un cordage aux mâts. Par la suite, il a tout le temps de se familiariser avec ce bâtiment, à la fois en vue générale depuis l'océan, à la fois sur le pont ou dans les cabines, toujours avec cette application pour le représenter en détail.

Le lecteur avance tranquillement, tourne les pages, et découvre ce à quoi il s'attend : des tenues vestimentaires avec ce qu'il faut de détails pour ne pas être génériques, mais sans non plus un niveau d'exécution incroyable, des accessoires exacts par rapport à l'époque, sans être d'une grande invention, quelques paysages naturels comme l'océan et ses divers états de calme ou d'agitation, ou encore une île avec de la verdure, sans qu'il ne soit possible d'identifier l'essence des arbres ou des plantes. le navire est bien mis en valeur, que ce soit des prises de vue sur le pont, ou vu de plus loin en train de voguer par temps clair et calme ou sous la pluie, avec quelques vues en élévation dans les cordages. le nombre de cases par page est régulièrement de huit, parfois un peu plus, parfois un peu moins. Les angles de vue sont variés, ainsi que les cadrages. Les cases se présentent sagement alignées en bande, parfois avec quelques-unes en insert, et de temps à autre, une disposition moins conventionnelle. L'intrigue progresse de manière linéaire, au rythme de l'avancée de l'expédition. Lucrétia devient le personnage principal, avec comme personnages secondaires le subrécargue Francisco Pelsaert, le second Jéronimus Cornélius, un peu moins fréquemment le capitaine Arian Jakob, et de plus en plus régulièrement Wiebe Hayes, le gabier de la première dunette. La tension monte tout aussi progressivement entre les marins, le capitaine, et les passagers de la grande cabine. le lecteur se laisse porter par cette chronique d'une catastrophe annoncée, tout en relevant facilement les éléments relatifs à la discipline, à la manière dont s'exerce l'autorité, et effectivement à la soumission passive des marins.

De temps à autre, une séquence s'avère plus intense : le premier grain, la première punition publique sur le pont, la mise à mort d'un cochon, un vol de mouettes, la capture d'un requin, les morts enveloppés dans des draps et jetés à la baille, etc. Certes, le lecteur ressent la sensation d'une lecture plan-plan : pas fade, mais avec un déroulement sur des rails, pas dépourvue d'âme, mais avec des personnages au caractère assez monolithique, pas sans surprise, mais au déroulé très mécanique, très programmé. Mais quand même… Les auteurs ne font pas semblant : leur narration semble s'en tenir à des points de passage attendus, et dans le même temps Dorison & Montaigne ne prennent jamais de raccourci. Ils réalisent tous les points de passage obligés, avec une forme particulièrement classique, presque académique. Mais quand même, le malaise gagne en intensité, de séquence en séquence.

Certes le dessinateur semble s'en tenir à des cadrages, des plans très sages, mais il ne triche jamais. Il n'utilise pas de raccourcis, il n'a pas recours aux trucs et astuces pour dessiner plus vite, et se maintenir juste au-dessus du minimum syndical. Il fait preuve d'une réelle diversité, peut-être pas originale, mais certainement pas pauvre non plus. Il n'y a pas grande imagination dans ce dessin en double page du Jakarta à quai, mais tous les détails attendus sont là sans exception. Il n'y a pas grande surprise dans le plan de prise de vue du premier châtiment corporel public, mais tous les matelots et tous les cordages sont scrupuleusement représentés. Il n'y a pas grande séduction chez Lucrétia Hans, mais son caractère est apparent dans ses postures, dans les expressions de son visage, dans ses mouvements, dans sa façon d'affronter l'humiliation de l'épouillage de sa coiffure en public, ou encore de son agression par les matelots. Il n'y a pas de réel romantisme chez Wiebe Hayes, mais il apparaît séducteur et touchant à sa manière. Il n'y a pas des vrais héros, mais il y a des êtres humains.

De la même manière, le scénariste n'est pas des plus subtiles, en particulier quand le subrécargue, ou le second, ou le capitaine expriment à haute voix leur conception de l'autorité, pour être sûr que le lecteur ne passe pas à côté de ce thème. Les matelots restent une masse d'individus quasi indifférenciés, sans personnalité, sans que le lecteur ne puisse envisager ce voyage avec leur point de vue de groupe, ou avec le point de vue de l'un d'eux. Mais le récit ne stagne pas dans un manichéisme basique. Chaque personne présente des qualités et des défauts, chaque personne se retrouve à jouer son rôle avec les règles imposées de cette société à cet endroit du monde, à cette époque. Chaque individu se heurte au fonctionnement systémique et doit fait preuve de courage pour prendre sur lui, pour subir, pour maintenir un lambeau de conviction morale malgré les règles qui s'imposent à lui. Rapidement, le lecteur accepte le fonctionnement de la narration parce que les auteurs sont entièrement investis et focalisés sur leur récit, sans finalement porter de jugement moral ou autre sur leurs personnages.

Dans un premier temps, le lecteur se retrouve déstabilisé car il prend fait et cause pour Lucrétia Hans qui se retrouve à voyager dans des conditions dégradées auxquelles elle n'est pas habituée, subissant la pression subliminale d'être une femme sous le regard d'un équipage masculin. En même temps, elle appartient à une classe privilégiée, n'ayant pas à travailler sur le navire, échappant pratiquement à l'autorité du capitaine, mais obligée de regarder un marin fouetté avec une garcette, une scène prouvant que l'implication des auteurs ne faiblit pas même lorsqu'il faut raconter et montrer ces atrocités. Puis vient la question de l'évacuation des urines et des excréments : à nouveau les auteurs exposent les faits, sans rien édulcorer ou dramatiser. En page cinquante-trois, le temps d'une unique case de la largeur de la page, le lecteur découvre ce qu'il advient des marins dont la santé a failli sous le labeur et les conditions de vie : pas de dramatisation romanesque, du factuel, encore plus implacable.

Raconter le naufrage d'un des plus grands navires d'une compagnie maritime de commerce, et recréer les conditions de vie des marins : les auteurs s'y appliquent sans beaucoup de panache, en appuyant le thème qu'ils explorent. Certes, mais ils le font avec consistance, sans céder à la facilité, sans changer de cap, avec une honnêteté et une constance remarquables. Rapidement le lecteur se laisse prendre pas cette narration visuelle détaillée et variée, par ces scènes prosaïques bien construites. Il se retrouve à son tour prisonnier du mode de fonctionnement d'une société, dictant leur conduite à chacun, sans laisser de latitude à l'empathie, à l'entraide, à la solidarité, un comble pour des individus vivant à bord du même navire.
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Déjà, cette bande dessinée est un bel objet : un grand format, une superbe couverture noir et or, des dessins sur papier épais qui retranscrivent parfaitement l'atmosphère délétère de ce voyage vers les Indes Orientales, vers l'enfer.

On retrouve au scénario Xavier Dorison, que j'ai découvert avec le Château des Animaux. Il explore ici à nouveau les méandres de l'esprit humain face au pouvoir (ceux qui le détiennent et ceux qui le subissent) : manipulation, domination, avidité, etc, ainsi qu'il l'explique dans un prologue qui évoque l'extinction de l'âme, un concept de psychologie d'autant plus glaçant qu'il est illustré de faits historiques biens connus.

Le drame est annoncé dans les premières pages, puis les auteurs reviennent en arrière pour illustrer ce qui a pu mener à un tel massacre. C'est une histoire où l'humain n'a pas le beau rôle : il y a des méchants et des encore plus méchants, des dirigeants suivant froidement les ordres de la compagnie, d'autres n'obéissant qu'à leurs propres désirs, des traîtres, des manipulateurs de l'ombre, des assassins, etc. Comme si ce navire transportait toute la noirceur humaine...

Le livre nous permet d'avoir un autre regard sur l'extraordinaire réussite de la Compagnie hollandaise des Indes orientales, connue pour ses voyages lointains, les marchandises exotiques ramenées d'Asie et les énormes revenus générés par ce commerce...

Le récit est inspiré de faits réels, le naufrage du Batavia, une histoire que je ne connaissais pas mais dont je découvre qu'elle a déjà donné à lieu à plusieurs adaptations (livres, B.D. et même un opéra). Une histoire terrible puisque le pire est encore à venir.

Il est impossible de ne pas se laisser prendre par ce récit très sombre : on a envie de savoir comment on peut en arriver à un tel massacre et surtout si justice sera rendue...
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Je découvre avec cette majestueuse BD l'histoire des naufragés de Jakarta.
Dorison nous prévient dès la première page de préface. Il s'agit ici d'une tragédie effroyable de l'histoire de la marine.
La VOC, Compagnie hollandaise des Indes Orientales, puissante et riche, donne 120 jours au subrécargue du Jakarta, navire chargé de coffres emplis de bijoux et de 300 000 florins , pour atteindre Java.
Mission jugée quasiment impossible...

Ce premier tome raconte l'histoire de la traversée jusqu'au naufrage. On y suit des personnages forts charismatiques, notamment Lucretia Hans, une nantie qui doit rejoindre son mari, et Hayes le gabier.
C'est deux là auront fort à faire avec ceux qui gouvernent le navire, redoutables et mus par des volontés plus ou moins louables.

Quelle magnifique reconstitution ! Comme toujours, le scénariste Xavier Dorison m'épate. le dessin de Timothée Montaigne sert admirablement cette histoire de marins, sordide et épouvantable. Et encore quelque chose me dit que nous ne sommes pas au bout de nos peines.

J'attends avec impatience la sortie du second tome.
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Embarquer sur le Jakarta, c'est embarquer pour un récit aux allures de thriller psychologique. En tournant les pages, le lecteur assiste à des mutineries, reçoit – ou distribue – des coups de fouet, est témoin d'innommables massacres, subit des naufrages. En un mot, il lutte pour sa survie.

Le scénario proposé par Xavier Dorison est magistral. Pas de temps mort, pas de moment où le lecteur a envie d'abandonner sa lecture, ici, on a juste envie de tourner les pages avec avidité… Et pourtant, ce n'était pas gagné d'avance : s'emparer d'un fait historique du XVIIème siècle – les aventures du Jakarta qui nous sont contées ici sont directement inspirées de celles, réelles, subies par le Batavia à l'époque – et parvenir à le rendre intemporel et contemporain, c'était un pari fort risqué !

Ce que l'on aime particulièrement ici, c'est la dualité que l'on constate page après page, le rapport entre la liberté individuelle et la soumission d'un groupe. C'est plein de noirceur et les personnages mis en scène par Xavier Dorison ont chacun leur importance et leur pierre a apporter à l'édifice.

Si le scénario est extrêmement bien ficelé, que dire des illustrations proposé par Thimothée Montaigne ? Elles regorgent de détails et, sans mauvais jeu de mot, on se noierait dedans. le réalisme est stupéfiant et donne une profondeur à l'histoire proposée.

Vous l'aurez compris, on ne regrette pas de se lancer dans cette lecture et on en prend plein les mirettes ! Bref, vivement le second – et dernier – tome de cette histoire, en espérant que nous ne l'attentions pas trop longtemps !
Lien : https://ogrimoire.com/2024/0..
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Depuis Renaud, tout le monde le sait : ♫ C'est pas l'homme qui prend la mer, c'est la mer qui prend l'homme ♪ et que ♪ La mer c'est dégueulasse, Les poissons baisent dedans ! ♫

Dans ce magnifique album à la couverture dorée qui attire l'oeil, ce ne sera pas de la plaisance, que du contraire.

Dès le vent soufflera, le Jakarta partira… Merde, c'est cette nuit, faut pas traîner !

La VOC, la Compagnie hollandaise des Indes orientales (Vereenigde Oostindische Compagnie) veut qu'il batte tous les records de voyage. Heu, on leur explique que ça n'a pas porté chance à un immense paquebot, en 1912, cette envie d'arriver avant les autres ?

Le capitalisme n'attend pas, les dirigeants ne risquent que du fric, pas leur vie, ils restent sur le plancher des vaches, eux et ce sont les autres qui risquent leur peau pour un salaire de misère, des conditions de travail qui feraient tomber dans les pommes un syndicaliste modéré et de la bouffe de merde.

Le seul maître à bord, après Dieu, n'est pas le capitaine, mais le subrécargue Francisco Pelsaert, qui est calife au-dessus du calife, heu, capitaine au-dessus du capitaine. Sur le Jakarta, 300 marins issus des bas-fonds, des assassins, des mecs qu'on n'a pas envie de croiser au coin d'une rue, même super bien éclairée.

Quelle bédé, bande de moussaillons d'eau douce ! Nous ne sommes dans l'aventure avec un grand A, avant de se retrouver dans les emmerdes avec un grand E.

L'apothicaire Jéronimus Cornélius est un personnage mystérieux et ça magouille dans les coursives, ça chuchote et je n'avais aucune idée de comment ce premier épisode allait se finir, bien que les premières cases ne laissent aucun doute…

Les dessins sont superbes, grandioses, magnifiques. J'en rajoute une louche ou vous avez compris, bande de moule-à-gaufre ? Lorsque la mer est en furie, on aurait presque envie de vomir son quatre-heures et son minuit aussi… Soyez dans les nantis, sinon, vous dormirez dans vos vêtements mouillés.

La tension monte lentement, au fil des pages et de l'eau, la violence sur le pont est omniprésente, le subrécargue Pelsaert estimant qu'il faut punir très fort les hommes pour qu'ils restent dociles. Ce genre de réflexions, je les avais déjà entendues sur un autre indiaman (navire de la VOC), notamment dans le roman L'étrange traversée du Saardam.

Moi qui aime les bateaux, j'en ai eu pour mon argent avec ce premier tome qui m'a emporté sur les flots et donné des sueurs froides.

Le suspense est à son comble et je n'ai qu'une seule envie, c'est de retrouver les marins du Jakarta pour connaître la suite de leurs aventures (mais il faudra attendre, merde alors !).

Un magnifique album, tant dans son esthétique que dans son scénario (inspiré de faits réels).

Une aventure en mer, qui est aussi psychologique que maritime, où l'on ne sait pas ce qu'il se passera, vu que bien des hommes, sur le navire, sont d'une noirceur totale et que certains cachent bien leur jeu.

De plus, cet album met en scène ce que l'on appelle l'extinction de l'âme, un mécanisme mental réel et effrayant : l'arrêt complet de l'empathie d'un groupe d'humain associé à la suspension de leur jugement moral et qui aura, pour conséquences immédiates, le sadisme, les massacres…

Une belle découverte.

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Dans la réalité, le Jakarta s'appelait le Batavia... et même si je ne comprends pas pourquoi les auteurs ont choisi de modifier ce genre de détails insignifiants (ou presque), je suis séduit par le résultat.

1629. le Jakarta s'apprête à quitter le port d'Amsterdam. A son bord, entre autres, de l'or et des pierreries, un subrécargue pointilleux à l'extrême, une bourgeoise qui rejoint son mari, et un équipage fait de la lie des marins. Mais surtout un apothicaire que le vice taraude. Peu à peu, entre tout ce "beau monde", la tension monte. La mutinerie gagne du terrain jusqu'à l'empoisonnement de Pelsaert, le subrécargue.

Quel plaisir de lire ce genre de BD. Un dessin hors norme. Des illus pleine page de la mer démontée. de la tension. Une atmosphère à couper au sabre. A mon avis même les plus exigeants seront comblés. Un premier tome qui laisse un goût de trop peu et une amertume en bouche. Un travail minutieux pour un résultat XXL.
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Ce récit est basé sur un fait réel. On est donc en 1629, et l'histoire raconte le naufrage d'un navire de la Compagnie des Indes.
C'est du pur récit maritime. le dessin est minutieux, teinté de réalisme, chaque détail y est à sa place, le trait est dynamique, chaque crête de vague, chaque planche de bois, chaque visage est travaillé avec soin sans négliger l'intensité, on sent les embruns, la houle et le vent glacé dans ces pages, c'est un travail remarquable.

L'histoire nous rappelle les grands récits maritimes de la bande dessinée, du roman et du cinéma, du Bounty aux Passagers du Vent. L'ambiance est lourde et inquiétante soutenue par les personnages troubles, on ressent la rudesse des conditions de vie sur le navire et la cohérence historique est pointue.

Enfin, la tension dramatique est très poussée, à base d'effets très appuyés, et là, je suis un peu moins convaincu, on charge les personnages de dureté, tombant dans l'outrance et la caricature, il y a toute une panoplie de salauds, on dirait que les auteurs ont pris toutes les options dans le catalogue. Il faut que tout aille mal, c'est un peu l'overdose. Il manque de lumière et de finesse dans le récit.

J'ai adoré le graphisme, l'ambiance maritime et l'aspect historique, je suis un peu plus sceptique sur le scénario, un peu trop tapageur et manquant de finesse, mais je lirai certainement la suite.
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Waouh, quel magnifique album que "1629", de Xavier Dorison et Thimothée Montaigne ! Si vous voulez de l'aventure, de l'exotisme, des trahisons et de l'action, vous avez le bon livre entre les mains !!!
La Compagnie hollandaise des Indes orientales règne en maitre sur le port d'Amsterdam : elle impose ainsi des délais extrêmement serrés à des commandants qui n'ont malheureusement que peu de prise sur les conditions météorologiques, comme à celui du Jakarta, qui doit ainsi rallier les Indes avec une inestimable quantité d'or. Avec un beaucoup moins estimable équipage par contre, qui doit être tenu à l'écart de toutes ces richesses et obéir au doigt et à l'oeil. Mais vous vous doutez que ça va mal se passer, non ?
Le dessin est vraiment très beau et fourmille de détails sur ce bateau si convoité. J'ai aussi beaucoup aimé les couleurs, qui tirent souvent vers le bleu/gris pour mieux éclater vers d'autres teintes selon les situations. Les personnages sont multiples et complexes, le scénario passionnant, vite, j'attends la suite avec impatience ! Je recommande.

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