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Xavier Dorison : Six pieds sous la neige avec l'Undertaker

Interview : Xavier Dorison à propos de Undertaker, tome 5 : L'Indien Blanc

Article publié le 01/06/2020 par Pierre Krause

Jonas Crow a un boulot particulier : il est croque-mort. Autant vous dire que les bonnes gens de l'Ouest sauvage le fuient comme la peste. Un avantage pour cet Undertaker qui préfère être seul que mal (ou bien) accompagné... Les aventures de cette nouvelle figure incontournable du western sont signées Ralph Meyer au dessin, Caroline Delabie aux couleurs et Xavier Dorison au scénario. C'est ce dernier que nous avons interrogé pour nous parler de ce personnage mais aussi de la tibu des Apaches Chiricahuas ou des plaines enneigées de l'Arizona dans lesquelles se déroule ce cinquième tome, sélectionné pour le Prix Babelio 2020.




Avant de parler de ce cinquième tome, arrêtons-nous quelques instants sur son personnage principal qui s'est rapidement imposé dans le paysage de la BD franco-belge. "Tu es un drôle d’homme, Jonas Crow… Ni mort, ni vraiment vivant. Tu n’aimes pas vraiment tes amis, tu ne détestes pas vraiment tes ennemis." Il semble difficile de mieux résumer le caractère de Jonas Crow que ne le fait ainsi un personnage de la BD. Comment avez-vous construit votre héros ? Quelles étaient vos inspirations ? 

En fait, c’est surtout une émotion qui m’a inspiré ce personnage… Le désespoir. Pas un « désespoir » triste, mais celui de l’homme déçu. De celui qui a tant espéré, tant voulu croire, et dont la déception à été à la hauteur de l’attente ; immense. De là, naît une lucidité terrible et une violence qui n’est, en réalité, qu’une armure pour ne plus avoir à souffrir comme cela a été le cas dans son passé.
 
C'est un personnage qui est, de par son métier mais aussi sa misanthropie, totalement en marge de la société. S'il a été pourtant entouré pendant les premiers tomes de ses aventures, il se retrouve ici bien seul pour fêter Noël. Quel rapport entretient-il avec les autres ? Avec la société en général ? 

Comme on le découvrira dans de prochains albums, Jonas est un homme que la société a blessé. Elle a détruit ses rêves, son enfance, et lui a montré, à travers la guerre, ses pires facettes. Alors il rejette cette société et prétend se porter bien mieux loin d’elle. Mais, je crois qu’il se ment… Au fond, comme tout un chacun, il rêve de refaire partie d’un groupe, d’un clan, d’être « entouré ». Il va devoir l’admettre – et c’est le sujet de fond de ce nouveau cycle – mais ensuite il devra trouver le groupe « idéal » pour lui… Tâche qui promet de ne pas être simple.

Crédits : Ralph Meyer
 
On a cru comprendre que c'est cette idée de personnage de croque-mort déambulant dans le Far-West qui était véritablement à l'origine de la série. Quel goût pour le genre du western aviez-vous en tant que lecteur mais aussi en tant qu’auteur ? 

Oui, c’était justement une idée de Ralph Meyer. Mais avant qu’il me propose de faire un western, et me donne « envie » de le faire - non seulement avec son idée de départ, mais surtout parce qu’il s’agissait de travailler avec lui et Caroline Delabie - j’avoue que le genre me faisait un peu peur. Le western, fondamentalement, est un « genre pur ». Quelques hommes bien décidés, une arène simple, des chevaux… Et de pas grand-chose il faut tirer une histoire forte.
 

Pouvez-vous nous parler de votre collaboration avec Ralph Meyer ? Comment se décompose l’écriture d’un tome ?

Avec Ralph et Caroline, nous échangeons tout au long de l’élaboration de l’album. Chacun est « maître » dans son domaine, que ce soit le scénario, le dessin ou la couleur, mais nous sommes tous conscients que nos échanges enrichissent les planches. Et donc nous discutons à toutes les étapes, l’idée de départ, le synopsis, le séquencier, les différentes versions du scénario, les crayonnés, la couverture… Pour ma part, je trouve dans ce travail d’équipe un plaisir et une source d’amélioration immense pour le scénario. Et puis, beaucoup de nos réunions se font en plein Barcelone, comme cadre, il y a pire…
 
Le cadre de ce cinquième tome est très étonnant. On se trouve en effet dans des canyons balayés par la neige. C'est un paysage de western très inhabituel. Ce cadre s’est-il imposé naturellement à votre histoire ou est-ce l'histoire qui a été inspirée par ces paysages sauvages ?

Ce décor est le résultat d’une discussion entre Ralph et moi. Lui voulait revenir au décor « classique » du western et moi j’aime le renouvellement permanent. Je n’avais pas envie de répéter, tel quel, le décor du premier cycle… Alors j’ai pensé à des photos que je connaissais de l’Arizona sous la neige. C’était une façon de faire du neuf avec quelque chose de connu… Et, bien sûr, c’était aussi la terre des Apaches !

Crédits : Ralph Meyer

A propos de l'intrigue justement, il est fortement question de liens familiaux dans ce tome. Des liens de sang mais aussi des liens adoptifs. Qu'est-ce qui vous intéressait dans cette thématique ? 

Précisément confronter Jonas a tout ce qu’il n’a pas : une famille… Que ce soit celle d’une ville « riche et occidentale » comme celle de Sid ou d’une famille libre et sauvage comme celle de Salvaje.
 
Au cœur de l'intrigue, on retrouve une tribu d'Apaches Chiricahuas. Pouvez-vous nous présenter cette tribu ? Aviez-vous la volonté de les représenter le plus fidèlement possible ? 

Je me suis beaucoup documenté sur eux et j’ai repris nombre de leurs rituels. J’ai découvert la place spécifique de la femme dans leurs communautés ainsi qu’un détachement matériel absolument passionnant. Ensuite, j’ai fait mon « tri » et romancé une partie de leur trajet.

Crédits : Ralph Meyer

A quoi peut-on s’attendre pour la suite de ses aventures ? 

A ne pas s’ennuyer… J’espère !

Vous êtes très prolifique avec de nombreuses séries en cours avec notamment, disponibles en librairie, les séries Aristophania ou Le château des animaux. Ces albums se nourrissent-ils les uns des autres ? Comment s’articule votre travail de scénariste ?

Mon souhait est que, justement, ces albums ne se « nourrissent pas » et que j’arrive à ne pas me répéter dans chacun d’eux. Mais, en même temps, j’essaye de rester fidèle à un type d’écriture et d’histoire que j’aime… On y retrouve toujours sans doute une approche de l’écriture plus romanesque et optimiste que réaliste !


Xavier Dorison à propos de ses lectures 

Quel est le livre ou la bande dessinée qui vous a donné envie d'écrire ?

Mon tout premier "Strange"… C’était en 1979…

Quel est l'auteur qui vous a donné envie d'arrêter d'écrire (par ses qualités exceptionnelles...) ?

Ils sont nombreux… Frank Miller, Mark Millar, Chris Claremont, John Byrne, Jean Van Hamme, Stephen King, et je ne vous parle pas des grands scénaristes de films ou séries… Jonathan Fellowes, Robert Benton, Jean-Claude Carrière…

Quelle est votre première grande découverte littéraire ?

Le Petit Nicolas

Quel est le livre que vous avez relu le plus souvent ?

L’intégrale L'intégrale Dardevil par Franck Miller.

Quel est le livre que vous avez honte de ne pas avoir lu ?

La liste est trop longue…

Quelle est la perle méconnue que vous souhaiteriez faire découvrir à nos lecteurs ?

L’île de Robert Merle.

Et en ce moment que lisez-vous ?

Histoires inédites 1913 – 1948  de Bertolt Brecht et l’Histoire de la propagande par David Colon.

 



Découvrez Undertaker, tome 5 : L'indien Blanc de Xavier DorisonRalph Meyer & Caroline Delabie publié chez Dargaud  

Ce livre fait partie des 100 titres sélectionnés pour le Prix Babelio 2020. N'hésitez pas à voter ici.


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