Latent dans Turner et Delacroix, l'Impressionnisme tenta de se formuler en un système avec Edouard Manet, MM. Camille Pissarro, Renoir, Claude Monet, Sisley, Cézanne et Ludovic Piette. Ces peintres se particularisaient par une excessive sensibilité aux réactions des couleurs, par une tendance à la décomposition des tons et par un effort à investir leurs toiles d'intenses clartés. Dans le choix des sujets, ils proscrivaient l'histoire, l'anecdote et le rêve, et, comme discipline de travail, prônaient l'exécution rapide et directe devant la nature.
Si l'on veut que le mot « Impressionnisme » conserve un sens un peu net, il faut en étiqueter l'œuvre des seuls luministes. S'éliminent donc Miss Mary Cassatt, MM. Degas, Forain, Raffaëlli qu'un public désorienté engloba sous la même dénomination que MM. Camille Pissarro et Claude Monet : tous, il est vrai, cherchaient une expression sincère de la vie moderne, méprisaient les us de l'école, et ils s'exhibaient en commun.
On accuse enfin ces peintres de subordonner l'art à la science. Ils se servent seulement des données scientifiques pour diriger et parfaire l'éducation de leur œil et pour contrôler l'exactitude de leur vision. .... La vérité est que la méthode néo-impressionniste exige une exceptionnelle délicatesse d'œil : fuiront effarés de sa loyauté dangereuse tous les habiles qui dissimulent par des gentillesses digitales leur incapacité visuelle. Cette peinture n'est accessible qu'aux peintres : les jongleurs des ateliers devront tourner leurs efforts vers le bonneteau ou le bilboquet.
Georges Seurat est né à Paris le 2 décembre 1859. Attentif jusqu'au scrupule à se conformer à la nature et même soucieux d'en restituer les procédés, il aboutissait pourtant à des oeuvres qui s'isolent de toutes autres et dont l'originalité paraît extraordinaire.
En mars 1891 Georges Seurat mourait. Mais il avait réalisé des oeuvres définitives et qui donnent complète la mesure de sa puissance. Une carrière de sept ou huit ans, c'est peu sans doute : non, et il y a dans l'histoire de l'art quelques peintres déjà à qui un temps presque aussi bref a suffi.
Tandis que La Grande-Jatte s'achève, Pissarro, au début décembre 1885, s'adresse à Monet pour la préparation d'une nouvelle exposition des impressionnistes (aucune n'avait eu lieu depuis 1882). En même temps il obtient que Durand-Ruel, qui a l'intention d'organiser une première exposition de « ses » peintres aux Etats-Unis, se rende en janvier 1886 chez Signac et Seurat pour les inviter à y participer. Seurat lui confie deux tableaux, dont Une Baignade, et douze études.
M. Seurat sait bien qu'une ligne, indépendamment de son rôle topographique, possède une valeur abstraite évaluable. Dans chacun de ses paysages les formes sont gouvernées par une ou deux directions appariées aux teintes dominantes et avec lesquelles les lignes accessoires sont astreintes à contraster.