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Citations sur Crime et Châtiment (595)

«Eh bien ! mais ne pourrait-on pas raisonner de la façon suivante ? Aidez-moi donc ! Les apparitions sont en quelque sorte des fragments d'autres mondes, leurs embryons. Un homme bien portant n'a naturellement aucune raison de les voir, car un homme sain est surtout un homme terrestre, c'est-à-dire matériel. Il doit donc vivre, pour rester dans l'ordre, la seule vie d'ici-bas. Mais à peine vient-il à être malade et l'ordre normal, terrestre, de son organisme à se détraquer, que la possibilité d'un autre monde commence à se manifester aussitôt à lui et, à mesure que s'aggrave la maladie, les rapports avec ce monde deviennent plus étroits, jusqu'à ce que la mort l'y fasse entrer de plain-pied. Si vous croyez à une vie future, rien ne vous empêche d'admettre ce raisonnement.
— Je ne crois pas à la vie future, dit Raskolnikov. Svidrigaïlov semblait plongé dans une méditation.
— Et s'il n'y avait là que des araignées ou autres bêtes semblables ?» dit-il tout à coup.
«Il est fou», pensa Raskolnikov.
«Nous nous représentons toujours l'éternité comme une idée impossible à comprendre, quelque chose d'immense. Mais pourquoi en serait-il nécessairement ainsi ? Et si, au lieu de tout cela, il n'y a, figurez-vous, qu'une petite chambre, comme qui dirait une de ces cabines de bain villageoises tout enfumées, avec des toiles d'araignées dans tous les coins : la voilà, l'éternité. Moi, vous savez, c'est ainsi que je l'imagine parfois.
— Eh quoi ! Ce petit que vous ne puissiez vous en faire une idée plus juste, plus consolante ? cria Raskolnikov, avec un sentiment de malaise.
— Plus juste ? Eh ! qui sait ? Ce point de vue est peut-être le plus vrai ; je m'arrangerais pour qu'il en fût ainsi si cela dépendait de moi», fit Svidrigaïlov avec un sourire vague.
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«Vous aimez jouer de la cravache ? demanda-t-il d'un air distrait.
— Non, pas beaucoup, répondit tranquillement Svidrigaïlov. Quant à Marfa Petrovna, je ne me querellais presque jamais avec elle. Nous vivions en fort bonne intelligence et elle était contente de moi. Je n'ai usé de la cravache que deux fois pendant nos sept années de vie commune (si l'on ne compte pas un troisième cas assez ambigu). La première fois, c'était deux mois après notre mariage, à notre arrivée dans la propriété, la seconde et dernière fois dans les circonstances auxquelles je faisais allusion. Et vous, vous me jugiez un monstre, n'est-ce pas, un homme arriéré, un partisan du servage, hé, hé !... À propos, ne vous souvenez-vous pas, Rodion Romanovitch, qu'il y a quelques années, au temps des bienheureuses assemblées municipales, on a couvert d'opprobre un propriétaire foncier, je ne me souviens plus de son nom, coupable d'avoir cravaché une étrangère en wagon. Vous vous rappelez ? C'était la même année, je crois bien, qu'eut lieu cet “horrible incident du Siècle”. Allons, Les Nuits égyptiennes, les conférences, vous y êtes ? Les yeux noirs ! Ô temps merveilleux de notre jeunesse, où es-tu ? Eh bien, voici mon opinion ! Je blâme profondément le monsieur qui a cravaché l'étrangère, car c'est là une action... Comment ne pas la blâmer, je vous le demande ? Mais je ne puis m'empêcher d'ajouter qu'on rencontre parfois de ces “étrangères” qui vous poussent si bien à la violence que l'homme le plus avancé ne pourrait répondre de lui. Personne n'a jamais examiné la question sous cet angle, mais c'est, je vous l'assure, une erreur, car mon point de vue est tout à fait humain.»
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Je n'ai pas tué un être humain, mais un principe ; oui, le principe, je l'ai bien tué, mais je n'ai pas su accomplir le saut. Je suis resté en deçà... Je n'ai su que tuer. Et encore, n'y ai-je pas trop bien réussi, paraît-il... Un principe. Pourquoi cet idiot de Razoumikhine attaquait-il les socialistes tantôt ? Ce sont de laborieux hommes d'affaires, occupés du “bonheur général”. Non, la vie ne m'a été donnée qu'une fois et je ne veux pas attendre ce “bonheur universel” ; avant tout je veux vivre, sinon, mieux vaudrait ne pas exister. Eh bien, quoi ? Je n'ai fait que me refuser à passer devant une mère affamée en serrant mon rouble dans ma poche dans l'attente du “bonheur universel”. J'apporte comme qui dirait ma pierre à l'édifice commun et cela suffit à me donner la paix.
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Le bout de chandelle achevait de se consumer dans le chandelier tordu, et éclairait faiblement cette pièce misérable où un assassin et une prostituée s'étaient si étrangement unis pour lire le Livre Éternel.
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Poulkheria Alexandrovna avait l'âme tendre, mais sa sensibilité n'était point de la sensiblerie.
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Je bois car je veux souffrir doublement.
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De quoi les hommes ont-ils le plus peur ? De tenter une démarche nouvelle, de prononcer une parole personnelle et inédite, voilà ce qu'ils redoutent le plus
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de quoi les hommes ont-ils le plus peur ? De tenter une démarche nouvelle, de prononcer une parole inédite, voilà ce qu'ils redoutent le plus...
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«Où ai-je lu, pensa Raskolnikov en s'éloignant, qu'un condamné à mort disait, une heure avant son supplice, que s'il lui fallait vivre sur quelque cime, sur une roche escarpée, où il n'aurait qu'une étroite plate-forme, juste assez large pour y poser les pieds, une plate-forme entourée de précipices, perdue au milieu d'océans infinis dans les ténèbres éternelles, dans une perpétuelle solitude, exposé aux tempêtes incessantes, et s'il devait rester là, sur ce lambeau, sur ce mètre d'espace, y rester toute sa vie, mille ans, toute l'éternité, il préférerait encore cette vie à la mort ? Vivre, vivre seulement, vivre n'importe comment, mais vivre... Que c'est donc vrai, Seigneur, que c'est donc vrai ! L'homme est un lâche... et lâche est celui qui lui reproche cette lâcheté», ajouta-t-il au bout d'un moment.
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«Cette demi-bouteille que vous voyez a été payée de son argent, reprit Marmeladov en ne s'adressant qu'à Raskolnikov. Elle m'a remis trente kopecks de ses propres mains, les derniers, tout ce qu'elle avait, je l'ai vu moi-même, elle ne m'a rien dit et s'est bornée à me regarder en silence... Un regard qui n'appartenait pas à la terre mais au ciel, ce n'est que là-haut qu'on peut souffrir ainsi pour les hommes, pleurer sur eux, sans les condamner. Non, on ne les condamne pas ! mais c'est plus dur, quand on ne vous condamne pas ! Trente kopecks, voilà, oui, et cependant elle-même en a besoin, n'est-ce pas ? Qu'en pensez-vous, mon cher Monsieur, elle a besoin de se tenir propre à présent. Cette propreté coûte de l'argent, une propreté spéciale, vous comprenez ? Il faut de la pommade, des jupons empesés, des petites bottines un peu élégantes, qui fassent valoir le pied quand on a une flaque à enjamber. Comprenez-vous, comprenez-vous, Monsieur, l'importance de cette propreté ? Eh bien voilà, et moi, son propre père, je lui ai arraché ces trente kopecks. Je bois, oui, je les ai déjà bus... Dites-moi, qui donc aura pitié d'un homme comme moi, hein ? Dites, Monsieur, avez-vous maintenant pitié de moi, oui ou non ?... Parlez-moi, Monsieur, me plaignez-vous, oui ou non ? Ha ! ha, ha !»
Il voulut se verser à boire, mais la bouteille était vide.
«Pourquoi te plaindre ?» cria le patron qui apparut de nouveau auprès des deux hommes.
Des rires mêlés d'injures éclatèrent dans la pièce. C'étaient les auditeurs du fonctionnaire qui riaient et juraient ainsi ; les autres, qui n'avaient rien entendu, se joignaient à eux rien qu'à voir sa figure.
«Me plaindre ? Et pourquoi me plaindrait-on ?» hurla soudain Marmeladov en se levant, le bras tendu avec exaltation, comme s'il n'avait attendu que ces paroles. «Pourquoi me plaindre, dis-tu ? Oui, il n'y a pas lieu de me plaindre, il faut me crucifier, me mettre en croix et non pas me plaindre. Crucifie-moi donc, juge, fais-le, et en me crucifiant aie pitié du supplicié ; j'irai alors moi-même au devant du supplice, car ce n'est point de joie que j'ai soif, mais de douleur et de larmes... Crois-tu donc, marchand, que ta demi-bouteille m'a procuré du plaisir ? C'est la douleur, la douleur que je cherchais au fond de ce flacon, la douleur et les larmes ; je les y ai trouvées et savourées. Mais nous ne serons pris en pitié que par Celui qui a eu pitié de tous les hommes. Celui qui a tout compris, l'Unique et notre seul Juge, il viendra au jour du Jugement et demandera : “Où est la fille qui s'est sacrifiée pour une marâtre cruelle et phtisique, pour des petits enfants qui ne sont point ses frères ? Où est la fille qui a eu pitié de son père terrestre et ne s'est point détournée avec horreur de ce crapuleux ivrogne ?” Il lui dira : “Viens ! Je t'ai déjà pardonné une fois... pardonné une fois... et maintenant que tous tes péché te soient remis, car tu as beaucoup aimé...” Et il pardonnera à ma Sonia, Il lui pardonnera, je sais qu'Il lui pardonnera... Je l'ai senti dans mon cœur tantôt, quand j'étais chez elle ! Tous seront jugés par Lui, les bons et les méchants, et nous entendrons Son Verbe : “Approchez, dira-t-il, approchez, vous aussi les ivrognes, approchez, les faibles créatures éhontées !” Nous avancerons tous sans crainte et nous nous arrêterons devant Lui et Il dira : “Vous êtes des porcs, vous avez l'aspect de la bête et vous portez son signe, mais venez aussi.” Et alors vers Lui se tourneront les sages et se tourneront les intelligents et ils s'écrieront : “Seigneur ! Pourquoi reçois-tu ceux-là !” Et Lui dira : “Je les reçois, ô sages, je les reçois, ô vous intelligents, parce qu'aucun d'eux ne s'est jamais cru digne de cette faveur.” Et Il nous tendra ses bras divins et nous nous y précipiterons... et nous fondrons en larmes... et nous comprendrons tout... alors nous comprendrons tout... et tous comprendront... Katerina Ivanovna elle aussi comprendra... Seigneur, que ton règne arrive !»
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