Nous apprenons beaucoup sur le Portugal, les Portugais, et sur les paysans du Nord, qui comme les parents de l'auteure, vont émigrer. C'est leur vie que ce récit propose, avec les peurs, la misère, les douleurs et les déceptions. C'est l'histoire de deux projets contraires, celui d' Emilia qui rêve de liberté et de bonheur en France, et celui de José , viscéralement attaché à sa terre natale. C'est l'histoire d'un destin commun qu'ils construisent néanmoins, au prix de renoncements et de sacrifices mutuels et qui les conduira à émigrer deux fois. C'est l'histoire d'un déchirement,silencieux et consenti, quand la décision sera finalement prise par amour pour leurs enfants. C'est une histoire émouvante et tendre, qui resserre encore les liens étroits de cette fratrie de 7 enfants, à la recherche de son passé.
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Quelle belle réussite que ce livre ... L'auteur a du talent. Son sujet:
l'histoire d'une famille quittant son Portugal pour s'installer en France est passionnant de bout en bout. Nous entrons dans la vie de cette famille comme s'il s'agissait de la notre notre. Par ailleurs le contexte économique et social dans lequel évoluent les personnages au Portugal et en France y est parfaiement décrit
Vivement la suite. Bravo !
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Derrière la douleur silencieuse qui ne le quitta jamais, il n'y a pas que la nostalgie de sa terre, de sa maison ou les odeurs de pins. Il y a aussi un manque plus profond, plus intime, de l'ordre de la considération, de la dignité, du sentiment d'être à sa place. Je crois que sa place était à Vale da Nogueira. C'est un homme simple, issu de la terre, en communion avec elle, dans une société avec laquelle il est en harmonie. C'est de ces racines profondes qu'il puise son équilibre et sa force.
Peut-être est-ce cette force qui lui a manqué en juin 1948, quand il doit retourner à Vale da Nogueira pour aller chercher sa famille et quitter définitivement sa "terra".
Il n'a pas pu. Liquider tout ce qu'il avait créé, abandonner tout ce qu'il aimait. Pour toujours. Sans aucun espoir de retour. Il n'a pas pu. C'était tout simplement impossible pour lui, son coeur s'effritait. Il a préféré rester au loin et laisser faire sa femme. Il savait qu'elle serait furieuse. Mais affronter cette rupture définitive, il n'a pas pu.
Quand ils se sont retrouvés sur le quai à Paris et qu'ils se sont embrassés, en larmes, heureux et soulagés, il lui a dit " Não pude " (je n'ai pas pu).
Elle a répondu "oui, je sais". Et ils n'en ont plus jamais parlé.
En homme droit et responsable, il ne regretta jamais ses choix. Il s'est effacé pour sa famille et a renoncé à l'essence même de son existence et à ce qui aurait du être son modeste destin. Je mesure mieux aujourd'hui, et peut-être mes frères et sœurs aussi, pourquoi sa vie en France ne pouvait pas être en harmonie avec sa nature profonde.
Jamais il n'a évoqué le prix qu'il a payé pour que nous soyons ce que nous sommes, mais nous savons ce que nous lui devons.
Simplement, il conserva toute sa vie, cette "saudade" naturelle, en souvenir de son statut passé.