Ce qu'il y a de vrai cependant, c'est que dans certains milieux populaires, des superstitions filles de l'ignorance et l'ignorance elle-même peuvent favoriser l'acceptation par le malade de thèmes délirants particulièrement absurdes, mais dans toutes les classes sociales les mêmes psychoses font place au Surnaturel et le marquent de leur empreinte, qu'elles le prennent dans les croyances du milieu ou qu'elles l'inventent.
On entend, en général, par Surnaturel tout ce qui est supérieur à l'ensemble des êtres finis et aux lois qui les régissent. Les démons, les dieux, les prophètes, les inspirés, les illuminés, les sorciers, les forces qui sont censées leur obéir, tout cela fait partie du Surnaturel. Or, nul n'ignore que beaucoup d'aliénés vivent, partiellement ou complètement, dans le Surnaturel; ils se déclarent fils de Dieu, envoyés de Dieu, messies, Dieu lui-même, ils se croient favorisés ou persécutés par des dieux, des démons ou des êtres humains auxquels ils attribuent des pouvoirs surnaturels, et ils ont affaire, dans leurs délires, à des forces mystérieuses, hostiles ou favorables.
Nous ne croyons pas que celle création du Surnaturel par les maladies mentales ait jamais été utilisée de la sorte, par la méthode chère à notre regretté maître Théodule Ribot, et nous ne nous dissimulons pas les difficultés d'une conclusion où nous essayerons d'éclairer des faits sociaux et normaux en les comparant à des faits individuels et morbides qui ne peuvent présenter avec les premiers que des analogies plus ou moins étroites, et non des identités.