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EAN : 978B00184PJA8
Ed. des cahiers libres (30/11/-1)
3.75/5   2 notes
Résumé :
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
J’habitais boulevard Montmartre, au centre du quartier général journalistique, entre la rue Vivienne et la rue de Richelieu. Les loisirs momentanés dont je jouissais parfois me permettaient de fréquenter un tas de salons politiques et mondains, teintés aussi de Belles Lettres, où je cultivais de plaisantes idylles. De ce chef, la vie me semblait fort supportable, d’autant, en sus, que je possède quelque fortune.
Or, un soir, il était, ma foi, près de minuit, je revenais d’une soirée passée chez Eléonora de Virmaigle. Cette veuve du grand boursier donnait dans la mode littéraire du jour : le Goulisme. Comme vous savez, pour un Gouliste, tout est culinaire, et la Cuisinière Bourgeoise est un chef-d’œuvre très supérieur à Madame Bovary. On avait donc entendu Jean Porto dire vingt-quatre tercets sur les petits fours et le début du poème épique de Pol Mac Limoje sur la Colman’s Mustard. Ç’avait été une soirée charmante. La maîtresse de maison nous faisait goûter en plus des crèpes à la résine de baobab, qui sont une chose exquise, rappelant un peu le condor rôti, dont j’ai mangé en Bolivie. On nous avait promis enfin une prochaine soirée anthropophage, strictement confidentielle bien entendu. Les chefs du mouvement Goulistes exubéraient. Le grand problème était de deviner ce que serait le dîner de cannibale ? Y mangerait-on de la jeune fille, de l’homme fait, de l’enfant ou de la femme de quarante ans ? Les discussions devenaient acharnées. La femme se rôtit, mais l’homme se fait cuire en cocotte. Quant à l’enfant, c’est en gratin dauphinois qu’il réalise toute sa succulence. La jeune fille seule comporte une certaine variété de préparation. Le président du groupe Gouliste parlait d’une cuisine à base d’aubergines qui, selon lui, atteignait l’empyrée des délectations de bouche.
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Acculé dans la chambre obscure, je frissonne et sens une brusque sueur mouiller mes tempes.
- C’est May.
La voix reprend.
- Rubbia… Viens…
Rubbia se tait.
Ecumant, je saute encore à la fenêtre, armé cette fois du poignard. Un homme arrive juste à ma hauteur. Il tire, et me manque ; je lui porte un formidable coup de stylet. Je sens l’acier pénétrer dans sa chair, et je recule sans laisser l’arme. Le corps s’affaisse lourdement. Je l’entends choir sur la terre.
- Rubbia… Rubbia…
May jette dans la nuit un appel de chatte en folie. Les deux syllabes taraudent le silence et s’en vont comme des êtres, je les sens frôler mon cerveau fou.
- Rubbia… Rubbia…
Je grince des dents et je retourne à la fenêtre pour injurier cette femelle miaulante. Un coup de revolver me chasse une fois de plus et j’ai vu qu’un autre homme montait à l’échelle, courageusement.
- Rubbia… Viens !
Alors, un corps presque nu s’accroche au mien, un corps semblable à un tentacule de poulpe, qui se dérobe à la défense et pourtant l’annule, une sorte de force insaisissable qui m’immobilise à-demi.
C’est Rubbia.
Ah ! ça, je suis en plein cauchemar.
J’éloigne cette forme, elle revient, nerveuse et acharnée.
De sa bouche sort un cri farouche :
- May… Viens, je le tiens !
Je veux écarter cette démente, mais son énergie calculée de félin domine mes réflexes troublés, et dirais-je enfin que j’hésite encore à le meurtrir.
Je dis :
- Rubbia, laisse-moi, tu es folle, laisse… laisse…
Je la traîne après moi dans le noir sans pouvoir m’en débarrasser. Cependant, du jardin monte un cri délirant, une sorte d’hosanna :
- Oui… Oui…
Et, à la fenêtre, une voix d’homme demande :
- Cette fois, il est bien à nous.
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Enfin, j’avais fini par convaincre à demi cet Eldyx, qui s’était trouvé fort déçu par Théopipe. Mais il fallait cinquante mille francs et le drille regimbait. Le chantage, tout comme la terre à blé, ne rendait plus selon les statistiques. Quant à la publicité, elle tendait à devenir exclusivement lupanaresque. Or, Eldyx avait des scrupules. Moraux d’abord, puis autres, parce qu’il lui répugnait, ayant des intérêts dans une maison de tolérance, de se ruiner en prônant dans son canard la concurrence des maisons de rendez-vous. Malgré les tiraillements, je pensai bien vaincre mon homme et ce jour-là je me rendais chez lui d’un pas allègre, avec des arguments fourbis à neuf.
L’Emporium se trouve boulevard Haussmann. À droite et à gauche on édifie des gratte ciel, au moins de petit module, mais enfin assez confortables, puisque la municipalité a autorisé d’atteindre le douzième étage.
Or, j’arrivais d’un pas tranquille aux palissades qui s’étendent jusqu’aux trottoirs et venait de descendre sur le pavé de bois quand derrière moi plusieurs autos à la file arrivèrent.
Je remontai par une porte sur la partie réservée aux maçons, pour éviter les carrosses qui me faisaient souvenir du coup de la rue de Boudreau. Alors, au-dessus de la tête j’entendis une sorte d’ébranlement et je fis aussitôt un bond de côté, sans savoir pourquoi et avant d’avoir réfléchi.
Au même moment, une énorme pierre, pesant bien dans les cent kilos, tombe à ma gauche et d’enfonce profondément dans les gravats en faisant une poussière énorme et ébranlant le sol.
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Cette indifférence aux contingences, cette sorte de certitude de se trouver hors les atteintes du malheur voisin, sont le fruit d’une éducation millénaire, qui a détruit dans la femme le sens de la responsabilité sous lequel je pliais à Paris pendant la traque. Il faut avouer d’ailleurs que les civilisations modernes favorisent beaucoup les êtres qui ne veulent jamais calculer et dont l’existence se projette de jour en jour, sans aucun principe d’organisation intérieure. Il y a comme cela, à Paris, des centaines de milliers d’humains qui se lèvent le matin sans un sou, sans gîte et sans espoir apparent. Et quand le soir arrive, ils ont bu et mangé, ils trouvent un lit pour s’étendre, mais n’ont rien de plus, et devront recommencer le lendemain. J’ai remarqué là-dessus que les hommes soumis à ce type d’existence sont toujours des loques ou des vaincus, mais les femmes y restent généralement bien armées et se tirent à l’occasion sans accrocs de leur vase, où il semblerait qu’elles dussent rester ensevelies. Ainsi, Rubbia, femme supérieure à tant d’égards, et si réellement que je n’ai jamais vu la limite de sa raison, de son savoir et de son goût, Rubbia n’en gardait pas moins cette âme nuageuse, indifférente au futur, emplie du seule présent et purement passive, qui caractérise tant de petites prostituées du trottoir parisien.
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J’arrêtai le chauffeur et lui dis de nous ramener par les boulevards extérieurs.
- Voulez-vous venir dans un café, dans une pâtisserie ?
Elle prit un air mutin et affirmatif.
- Non… À Suburre.
J’eus un sourire amusé. Diable, cette enfant connaissait Suburre, le nouveau restaurant de nuit dont les hardiesses faisaient tant de bruit… Me serais-je trompé comme un naïf en la croyant chaste ?
Nous fûmes à Suburre trois minutes plus tard. Cet établissement occupait trois étages d’un vaste immeuble nouvellement bâti. On y pratiquait la débauche américaine, coûteuse et compliquée, sans regarder à violer aucune règle morale, aucun savoir-vivre et aucune mœurs. J’y avais jadis rencontré lord Harlot of Whorely, ancien ministre des Affaires étrangères de son pays qui, abominablement saoul, m’avait fait des déclarations extraordinaires, à cause desquelles, lorsque je les eus publiées, le ministre français manqua d’attraper la jaunisse.
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