Pour Eric Dupond-Moretti, avocat cogneur surnommé « acquittator » dans les prétoires, la justice va mal, et plus particulièrement la magistrature, à quelques exceptions près. Selon lui, les citoyens ne voient pas le danger qu'il y a à abandonner une once des libertés conquises de haute lutte au fil des siècles. A ce titre, l'avocat – qui se doit de défendre même l'indéfendable – agace. Et EDM refuse de devenir un être transparent. Il donne ici, dans ce bref ouvrage à l'écriture ciselée au scalpel, comme ses plaidoiries et les analyses précises des pièces des dossiers qui lui ont permis de gagner bien des procès sur des détails ignorés ou négligés, quelques exemples où la justice est mise à mal par ceux-là même qui devraient la servir.
Un réquisitoire, donc, et surtout une réflexion nécessaire sur l'évolution dangereuse de la procédure pénale, la place des victimes et leur réparation légitime – y compris celle des acquittés après une longue incarcération préventive – sur la médiatisation des procédures et le tout relatif secret de l'instruction.
Comment le citoyen, justiciable en puissance, peut-il comprendre des jugements totalement contradictoires en première instance puis en appel (cf: le procès intenté au maire de la Faute sur mer après le désastre de la tempête Xintia) ? Comment ne pas s'étonner devant la description détaillée des pratiques sexuelles licites – même si elles sont moralement regrettables – des protagonistes de l' « affaire » DSK au Carlton de Lille alors qu'au final, une relaxe a été prononcée ?
Les dommages collatéraux des personnes incriminées avant toute décision judiciaire sont dévastateurs. Malheur à celui qui se trouve confronté à la nécessité de témoigner : il sera mis à nu, examiné sous toutes les coutures par le seul fait d'avoir eu la malchance de croiser l'accusé.
Eric Dupont-Moretti souligne les faiblesses de la justice : les erreurs de procédure commises par certains juges, leur mode de sélection et d'avancement (un exemple : le troisième procès intenté à l'un des acquittés de l'affaire d'Outreau), le rôle de groupuscules d'activistes s'érigeant sur les réseaux sociaux en défenseurs de la morale bourgeoise, celui de pseudo psychologues ou de journalistes sonnant l'hallali sans connaître les dossiers, celui de lanceurs d'alertes autoproclamés (qu'on appelait autrefois « corbeaux »), la presse à sensation, la confusion entre ce que prescrit strictement la loi pénale et le sentiment partial de certains magistrats … sans parler du cas de ce chien auditionné par la justice ...
Un fameux coup de gueule, bien nécessaire ces jours-ci, justement !
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