Après le chef-d'oeuvre
American psycho, j'ai trouvé
Lunar Park dans ma bibliothèque. Je ne me souvenais plus du tout que je l'avais. Si je l'ai emprunté à quelqu'un, j'en suis désolé ! Je n'en ai aucun souvenir... Pourtant, le livre est usé. Peut-être que je l'ai acheté d'occasion ? Vraiment, je ne sais plus... Et ce mystère s'est montré particulièrement en phase avec un roman inclassable, livre dans le livre qui met en scène un
Bret Easton Ellis parodique.
L'introduction du roman est déconcertante, car Ellis se raconte lui-même, ou plutôt nous raconte une version fantasmée de lui-même, jouant habilement sur le vrai et le faux. L'exercice est réussi et dénote une sacrée dose d'auto-dérision, voire d'auto cynisme. Ellis n'est pas tendre avec lui-même et ne se fait aucun cadeau. Il se décrit en effet comme un archétype de l'artiste égoïste, égocentrique, imbu de lui-même et rendu cynique par un succès phénoménal et précoce. Cette ouverture m'a rendu l'auteur immédiatement sympathique. Je n'ai pas souvenir avoir déjà lu un écrivain se dégommer de la sorte. C'est violent et rafraîchissant, encore plus à notre époque où il est de bon ton de se glorifier sans cesse.
Puis l'action de
Lunar Park démarre pour de bon, nous immergeant dans le quotidien de ce romancier qui cherche à se racheter une conduite et à devenir un père de famille respectable, banlieusard rangé prêt à assumer ses 40 ans. Mais des évènements étranges se produisent, qui vont dériver vers une ébauche de thriller, puis de roman fantastique / horreur à la
Stephen King.
J'ai adoré la première partie du roman et le concept de l'écrivain se mettant lui-même en scène.
Malheureusement, la suite de ma lecture fut plus difficile et l'ensemble ne m'a pas convaincu. Il m'a semblé qu'Ellis cherchait éblouir le lecteur avec son talent, en faisant étalage de ses multiples compétences narratives et de sa capacité à changer de registre. En cherchant à nous prouver qu'il pouvait être d'une page à l'autre peintre du réel, auteur de policier, de fantastique et d'épouvante, mais aussi existentialiste, j'ai trouvé qu'il se perdait en route et que le rythme du livre s'écroulait.
J'ai achevé ce roman avec le sentiment qu'Ellis n'a pas besoin d'artifices complexes et qu'il n'est jamais meilleur que lorsqu'il cherche à dépeindre l'Amérique avec son style. Que ce soient la débauche des étudiants désoeuvrés (
Moins que zéro,
Les lois de l'attraction) ou les yuppies de Wall Street (
American psycho), il excelle à nous exposer ce qu'il y a de pire chez ses contemporains.
J'ai l'impression qu'il est passé ici à côté de son sujet, les WASPS quarantenaires des banlieues chics, chez qui il y avait pourtant matière à écrire un roman truculent.
Dommage.