Fantastique, horreur et épouvante, onirisme et surnaturel, errance sociale, misère sexuelle, spiritisme… Tel est l'univers de l'écrivaine argentine
Mariana Enriquez, surnommée dans son pays la «princesa del terror». Ces douze récits, rassemblés sous le titre «
Les Dangers de fumer au lit », s'inscrivent parfaitement dans cette atmosphère si singulière… mais réjouissante.
Dans cette Amérique Latine où la religion catholique se colore de superstitions locales, où le culte des morts se mêle au culte des saints,
Mariana Enriquez explore de multiples thématiques comme les sorcières, les fantômes, le culte Vaudou, les sacrifices humains ou encore le cannibalisme.
«
Les dangers de fumer au lit » est un recueil de nouvelles horrifiques au nombre de douze - dont celle au titre éponyme – qui mettent en scène avant tout des femmes. Elles sont souvent trahies, cabossées, en souffrance, et vivent dans le doute, la peur ou se sentent opprimées. Les quelques hommes qu'on peut rencontrer sont secondaires, comme de simple faire valoir.
On est immédiatement charmé par la thématique d'ensemble qui fait la part belle au fantastique sous toutes ses formes, horrifique comme poétique. C'est un genre littéraire dans lesquels les auteurs s'aventurent trop peu, et où il est très compliqué de dénicher de belles plumes. Pour le coup, l'écriture de
Mariana Enriquez est d'une limpidité à toute épreuve et sa qualité n'est plus à démontrer. le lecteur est bousculé, interpellé, parfois choqué par le texte et les sujets abordés.
Pourtant, force est de constater que le format des nouvelles n'est pas pleinement maîtrisé. Un court récit offrait pourtant la possibilité d'un pas de côté et/ou d'une chute inattendue. Si elle arrive à créer une ambiance, poser le décor et dresser le portrait de ses personnages principes en seulement quelques pages, elle ne parvient pas une seule fois à offrir une fin marquante, frappante, qui fait réfléchir ou surprend. Ces moments de vie se terminent de manière abrupte, comme si le lecteur était simplement de passage dans la vie des personnages pour s'en détourner aussitôt, sans avoir jamais le fin mot de l'histoire.
À la moitié du recueil, la lassitude gagne le lecteur qui ne voit plus que des exercices de style à répétition, comme par exemple une nouvelle qui joue sur la double signification de la « consommation » (que consomme-t-on réellement quand un mariage est consommé ? Voici une question qui mérite pourtant qu'on s'y attarde.)
Un ensemble plaisant à lire grâce notamment à cette atmosphère surréaliste à mi-chemin entre le gothique et le poétique. On visite l'Argentine, ses fantômes, ses bas quartiers, à travers le destin de personnages intéressants et complexes, mais l'écrivaine peine à clôturer ses récits laissant au lecteur bien des questions en suspens… quitte à créer une certaine frustration une fois la lecture terminée. Comme quoi la nouvelle est un exercice à part.
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