Je crains d'avoir trop bien compris. À cause de ce sang, je suis relégué au statut de mes soeurs : plus le droit d'entrer seul dans le bureau de papa. Plus le droit de réclamer un tête à tête avec lui. Plus le droit de parler avec lui sur un pied d'égalité. Plus le droit de soutenir son regard.
Ce n'est donc pas grave. Je ne suis pas malade. Je ne vais pas devoir aller à l'hôpital. Je respire.
Puis la détonation éclate. Tu es devenue une femme... Pas de médecin pour ça.
On ne guérit pas d'être une femme.
Séparer les rêves et la vie, c'est renoncer à changer les choses, insiste Farrukh. Tu comprends? On ne peux pas se contenter de baisser les bras en rêvant aux contes de fée...
[...]
Je repense à une histoire que papa m'avait racontée, d'un paysan chinois qui avait un cheval. Un jour, l'animal s'enfuit. "C'est pas de chance!" le plaignent les voisins. Il répond : "Chance ou malchance, qui pourrait le dire?" Quinze jours plus tard, le cheval revient, suivi d'une dizaine de chevaux sauvages. "T'en as de la chance!" l'envient alors les voisins. L'homme a la même réponse que la fois précédente : "Chance ou malchance, qui le sait?" Le lendemain, le fils du paysan saute sur une des montures, part à toute allure, tombe et se casse la jambe. Les voisins ont beau dire que c'est de la malchance, le père répète : "Chance ou malchance, on verra bien." Une guerre civile éclate dans la province. Un groupe de soldats enrôle de force tous les jeunes gens du village en âge de porter un fusil. Sauf le garçon à la jambe cassée. Chance ou malchance, qui pourrait le savoir?
Voilà sur quoi je tombe : "Le monde s'était rétréci pour moi jusqu'à devenir une feuille de papier contre laquelle je me jetais de tout le lyrisme exaspéré de l'adolescence".
BACHA POSH
"Voilà mon identité: lutter. Mon identité, c'est de persévérer, non pas d'être un garçon ou une fille- Farruck ou Farruckzad-.
- Ca veut dire que dissimuler son identité permet d'être davantage soi-mêm que de se montrer sous son vrai jour ? Que parfois, le mensonge peut engendrer la vérité ?
- Il se sentait plus libre en écrivant masqué ?
- D'une certaine façon.
- Ca veut dire que dissimuler son identité permet d'être davantage soi-même que de se montrer sous son vrai jour ? Que parfois, le mensonge peut engendrer la vérité ?
Même si l' Homme cherche à dépasser la nature, ses ouvrages finissent toujours, avec le temps, par lui ressembler.
"[...] ça ne me gêne pas de mourir. Mais seulement quand j'aurais tout tenté."
Bacha Posh - Charlotte Erlih
(Extrait choisi par Albane)
Les livres ne parlent que de ça : de ceux qui se battent jusqu'à faire triompher leurs désirs, de ceux qui malgré les efforts ne parviennent pas à faire plier la réalité, ou de ceux qui baissent les bras sans lutter. De ces trois catégories, les seuls vraiment malheureux sont ceux qui n'essaient pas. qui renoncent, qui subissent.
Je ne veux pas me morfondre dans mon coin en maudissant le sort. je n'aime pas ce rôle. Je vais continuer à me battre.