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Citations sur Chroniques du hasard (100)

Voilà quelques notes prudentes sur les points de suspension. Ils sont agréables. Ils font penser à ces pierres qui affleurent à la surface de l’eau, et sur lesquelles
on éprouve le plaisir hasardeux de sauter pour traverser une rivière sans se mouiller.
Aujourd’hui, en particulier dans la communication électronique, ils ont un tel pouvoir de suggestion que les trois points canoniques ne suffisent plus et qu’on en met quatre, cinq, voire six d’affilée : « Je suis là… je souffre… je me demande où tu es…. je
pense à toi…… j’aimerais te voir mais…… » Certes, ils sont très expressifs et peuvent signifier beaucoup de choses : anxiété, gêne, timidité, incertitude, la malice qu’il y a à dire et à ne pas dire, un moment où on s’apprêtait à dépasser les bornes avant de renoncer, et aussi, simplement, le désir de prendre son temps.
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"A Naples, parmi les tableaux du Pio Monte della Misericordia, cet espace splendide, il y en a un qui me fascine et que je vais admirer dès que je peux, c'est le portrait d'une nonne, mains jointes et yeux clos, et qui se nomme "Nostra Signora de la Soledad" oeuvre d'un artiste inconnu du XVIIème siècle. J'ai toujours aimé cette notion d'artiste inconnu : elle implique que tout ce qu'il m'est possible de connaître sur la personne qui a réalisé ce tableau, c'est la toile que j'ai sous les yeux. Je trouve que c'est une belle opportunité. Je peux me focaliser sur le résultat brut, pur, d'un geste créatif.
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dans l'écriture au moins, il faudrait éviter de faire comme ces fous qui gouvernent le monde et menacent, trafiquent, traitent et, quand ils gagnent exultent, en truffant leurs discours de ces minuscules missiles à têtes nucléaire qui concluent chacune de leurs misérables phrases.
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Je veux surtout parler de la solitude véritable, celle qui fait brusquement et ne dure que quelques secondes, la solitude qui ne provient pas d’un manque de compagnie ou d’affection, mais de la soudaine prise de conscience de notre isolement existentiel.
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Ce qui triomphe, c’est la beauté, la tendresse, le charme, la joie, le rire jubilatoire. Les vidéos s’interrompent dès que la fillette trépigne, s’empourpre, devient laide. Manquent les angoisses, les coups de fatigue, l’énervement, la peur, les caprices explosifs. Manquent les tensions entre les parents, qui inquiètent les enfants et accentuent leur malaise.
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Ma mère était très belle et très douée,comme toutes les mères, et c’est pour cela que je l’ai aimée et détestée. J’ai commencé
à la détester vers dix ans, peut-être parce que je l’aimais tellement que l’idée de
la perdre me faisait vivre dans un état d’anxiété permanent et que, pour m’apaiser, j’étais obligée de la rabaisser. Parfois, j’avais l’impression que si elle était aussi belle et géniale, c’était juste pour que tout le monde me voie stupide et laide. Je n’arrivais pas à avoir une idée à moi, je n’avais en tête que ses idées à elle. Je me suis sentie opprimée, tourmentée par son obsession de l’ordre, par ses goûts rétrogrades
qui étouffaient les miens, par ses notions du juste et de l’injuste. Pendant longtemps,cesser de l’aimer m’a semblé être la seule façon de parvenir à m’aimer moi-même ou,plus exactement, la seule façon d’avoir un « moi » à aimer. Par conséquent, j’ai bientôt mis, entre son corps et le mien, quantité d’autres corps, des corps qui me permettaientd’être la chef, de me disputer, de faire l’amour, de me montrer sage ou insensée.
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Si vous éprouvez le besoin d’écrire, il faut absolument le faire. Ne vous fiez pas aux propos des autres, tels que : « Je te le dis pour ton bien, ne perds pas ton temps avec ça. » L’art de décourager avec des paroles affectueuses est des plus répandus.Ne croyez pas non plus ceux qui vous disent : « Tu es jeune, tu n’as pas beaucoup d’expérience, tu ferais mieux d’attendre. » On ne remet pas l’écriture au jour où on aura assez vécu et assez lu, où on aura un bureau à soi dans un lieu à soi, avec un jardin en terrasse donnant sur la mer, où on aura été exposé à des expériences
extrêmes, où on vivra dans une ville stimulante ou bien retiré dans un refuge montagnard,
où on aura eu des enfants et où on aura beaucoup voyagé.
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L’écriture déborde de points d’exclamation. Dans des textos, des messages sur WhatsApp ou des courriels, il m’est arrivé d’en compter jusqu’à cinq d’affilée. Je me dis parfois qu’ils ne sont pas le signe d’une exubérance sentimentale mais, au contraire, d’une faible confiance dans la communication écrite. On craint que l’écriture nous trahisse et donne de nous l’image de quelqu’un d’insensible. J’ai pu trouver dans certaines traductions de mes livres, dans lesquels je me garde bien d’avoir recours aux points d’exclamation, une profusion inattendue de ce signe, comme si le traducteur avait jugé ma page pauvre en sentiments et s’était livré, pour mon bien et pour celui du lecteur, à une entreprise de reboisement. Il est probable que mes lignes manquent de passion, je ne l’exclus pas. Comme il est probable que, là où pour quelque raison, elles prennent un ton enfiévré, mon lecteur soit heureux se retrouver face à un signal qui l’autorise à s’enflammer à son tour.
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J’essaie de ne jamais élever la voix. Même l’enthousiasme, la colère ou la je m’efforce de les exprimer d’un ton mesuré et en recourant, si besoin est, à l’autodérision. Si j’agis ainsi, c’est avant tout parce que je crains les excès, les miens et ceux des autres. Parfois, on se moque de moi et on me dit : « Tu veux donc un monde exclamations de joie, de souffrance, de colère, de haine ? » Je réponds que oui, c’est
exactement ça. Je voudrais que sur la planète entière, il n’y ait plus aucune raison de crier, en particulier de douleur.
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Je n’arrive pas à tracer une ligne de séparation entre histoires vraies et histoires fictionnelles. J’envisage, par exemple, un récit dans lequel moi-même, à quarante-huit ans, un hiver, dans une maison de campagne déserte, je me retrouve enfermée dans la cabine de douche, je ne parviens pas à fermer le robinet, et il n’y a plus d’eau chaude.
Est-ce que cela s’est vraiment produit ? Non. Est-ce arrivé à quelqu’un que je connais ?
Oui. Cette personne avait-elle quarante-huit ans ? Non. Alors, pourquoi est-ce que je construis un récit à la première personne, comme si cela m’était arrivé ? Pourquoi dis-je que c’était l’hiver alors que c’était l’été ? Pourquoi est-ce que je raconte que l’eau chaude était épuisée alors qu’il y en avait encore ?
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