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sur 17563 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Qui est Emma Bovary ?
Je ne vous ferai pas une explication de texte de type prépa littéraire. Premièrement, parce que j'en suis incapable. Deuxièmement, parce que, sauf exception, je trouve ça chiant.
Emma est une jeune paysanne gavée de romans ancêtres des Harlequin. Elle rêve du prince charmant, a des envies de promotion sociale et des goûts de luxe. Alors elle se marie avec le premier médecin qui passe et se trouve vite bien déconfite. Car Charles est gentil et très amoureux, mais c'est un balourd qui en plus, ne gagne pas beaucoup d'argent. Mauvaise pioche. Alors Emma est prête à s'énamourer d'autres hommes pourvu qu'ils soient bien habillés, pas moches et qu'ils la fassent rêver. Emma s'ennuie, veut vivre ses rêves, connaître la passion et péter dans des draps de soie. Quitte à se faire avoir, à recommencer et à s'embourber toujours plus.
Si je crois la postface du roman, le sujet a été imposé à Flaubert par ses conseillers et il a mis plus de quatre ans à écrire Madame Bovary dont il aurait dit : « Bovary m'assomme … Je suis plus lassé que si je roulais des montagnes … Franchement Bovary m'ennuie. ». Il a bien réussi à me communiquer son ennui parce que moi aussi Emma m'a ennuyée. En plus, elle m'a tellement énervée avec sa naïveté de petite fille que j'ai eu peu d'empathie pour elle. Bizarrement, mon empathie irait presque à Charles même s'il m'a agacée aussi. Quel nigaud pathétique ! Tellement heureux d'avoir déniché la plus belle fille du canton qu'il se repose sur ses lauriers et ne voit rien. Il mérite des baffes lui aussi.
Je reconnais que Gustave écrit bien, mais je trouve qu'il décrit un peu trop dans les détails. J'ai apprécié la façon dont il se paie la tête de certains personnages comme le pharmacien, l'ecclésiastique, et le marchand qui peut tout fournir comme s'il était le propriétaire de la Samaritaine. Mais il y a vraiment des longueurs. Peut-être pour nous faire ressentir l'ennui d'Emma.
Morale de cette histoire : jeunes filles, gardez-vous bien de croire ce que disent les romans d'amour et de rêver au prince charmant, idéal et parfait. Ils n'apporteront que déception dans la vie réelle. le prince n'existe qu'en biscuit. Mais ne voyez pas dans mes propos une critique des hommes en général. Pour être honnête, la princesse charmante idéale et parfaite n'existe pas non plus. Et puis voyez où ça mène de vouloir vivre dans le luxe.
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C'est étrange, j'ai lu madame Bovary il y a 40 ans sur décision éducative ! Quand notre prof de français nous a dit de l'acheter. J'étais désespéré, j'aurais préféré Au bonheur des Dames de Zola. Et puis elle nous a dit de lire le premier chapitre pour le mardi matin en 15. le premier week-end je terminais la lecture complète du roman.
Je crois que j'étais dans l'état de Pollock quand il parlé de Picasso : « C'est un sale type, il ne nous a rien laissé à inventer » ! Après la lecture, je me suis dit qu'il était impossible d'égaler une telle écriture.
Je ne l'ai jamais relu, mais je garde un étrange souvenir linéaire qui va d'une fête de mariage paysanne, à une mort glauque, après une course impossible après une vie romanesque.
Madame Bovary est d'une lecture qui exige de faire un détour du coté de son propre temps perdu. C'est un roman au suspense hitchcockien dont on entend le tic-tac de la bombe sous la table et dont on se demande quand va-t-elle exploser.
Alors pourquoi Madame Bovary pouvait menacer l'ordre bourgeois si bien établi sous ce deuxième empire de 1856 au point de lui faire un procès ?
Est-ce Parce qu'Emma Bovary est mauvaise mère ? Elle subit une maternité imposée par le pater familia et la société, et elle se contre-fiche de cette descendance. du reste on oublie vite qu'on a affaire à une mère de famille.
Est-ce parce que c'est le père Charles Bovary qui joue le rôle de la mère auprès de sa fille ? Effroyablement impensable dans la société bourgeoise, patriarcale et phallocrate de cette époque. Tiens est-ce que cela a changé ?
Emma Bovary ne fait rien d'utile dans la maison ; elle trouve son avorton d'époux incapable, moche, idiot et tue l'amour et refuse de prêter son corps à elle, à lui. Aie ! le bourgeois de l'époque, qui est si sur de son droit sur sa femme n'a pas du aimer cela.
Et le mariage, cette belle institution qui fait rêver les jeunes filles américaines au point ou d'être le climax rêvé de toute bonne comédie sentimentale, pour le coup Madame Bovary s'en contrefiche de cette belle institution du mariage. (Le divorce autorisé après la révolution française était de nouveau interdit depuis 1816 et qu'il fallut attendre 1884 pour qu'il soit à nouveau possible sous certaines conditions restantes très patriarcale.
Et la religion est le catholicisme de l'époque, pas celui du Pape François. Elle est un cache misère qui n'aide pas celles qui se cherchent.

Les supériorités des élites sociales de cette époque. Dès le bal chez les nobles on sait bien que l'aristocratie est une faribole où l'on s'ennuie, les belles manières n'ont aucun sens. Et L'aristocratie est talonné par la bourgeoisie d'argent avec le goût du beau en moins. Emma sera la maîtresse d'abord d'un noble puis d'un bourgeois en devenir : le constat est le même, la vacuité.
Et déjà avant l'heure le mythe du progrès est détruit par les mots comme aujourd'hui, on voudrait nous faire croire que l'innovation des techno-scientistes le visage d'un progrès universel. Et qui montre que l'ascension sociale n'existe pas. Emma est une petite paysanne, dans le fond. Une paysanne qui a sa grandeur mais voudrait se rêve princesse. Elle finit minable. Ses amants sont minables, son mari est minable, le pharmacien est minable et tous veulent la gloire, Pathétique.
Gustave Flaubert remet en question le monde bourgeois et patriarcale de son époque.
Si vous lisez Madame Bovary comme un roman divertissant, vous loupez quelque chose. C'est un roman des plus noir comme ceux du 20ème siècle. Et il est d'une effroyable modernité. Ce roman 40 ans après est encore présent chaque fois que je vois les dégâts du patriarcat bourgeois encore très prégnant.

N'est pas la « marquise des anges » qui veut !

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Madame Bovary a été pour moi une lecture relativement difficile, pour plusieurs raisons. J'ai lu ce livre il y a un bon moment déjà et j'en garde tout de même quelques souvenirs. Je me souviens avoir eu, à certains moments pour Emma (madame Bovary donc), une sérieuse aversion. Et parfois, tout le contraire, de l'empathie. J'ai donc décidé de me poser, et de réévaluer ce livre comme il se doit.

Oui parce que durant ma lecture, j'avais bien du mal à me mettre dans les conditions de l'époque et surtout à la place de Emma, malgré la belle plume de Flaubert.

Le début m'a été légèrement pénible, puis vers la moitié j'ai été submergée de tellement de sentiments variés envers cette femme. de la colère même oui car, son histoire m'a demandé beaucoup de réflexion, comme je l'ai dis.
En plongeant plus dans ma (re)lecture, je me met à la place d'Emma.
Emma s'ennuie, Emma rêve d'une vie qu'elle n'a pas et n'aura sûrement jamais, Emma ne sait pas trop ce qu'elle veux, Emma veux aimer réellement et être aimée, Emma déprime et ainsi de suite (c'est un peu Les Malheurs d'Emma Bovary enfaîte).
Tandis qu'au départ j'avais du mal à comprendre sa frustration, au fil du temps je comprend sa détresse. La détresse d'avoir la sensation de manquer de tout, d'être malheureuse, de subir son ménage et ce qui l'entoure.
Emma Bovary représente, j'en suis certaine, une bonne partie des femmes de l'époque (et même d'aujourd'hui après tout). Ce qui est inavouable: Une femme qui recherche l'amour ailleurs, qui rêve à en perdre la raison et le goût de la vie. Une vie totalement différente. Emma représente ce genre de femmes, qui se tuent lentement à mener une vie banale, dans les codes de la société
Heureusement avec l'âge, le recul et la compréhension nécessaire, j'ai pu apprécier l'oeuvre de Flaubert à sa juste valeur.


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Madame Bovary aurait tout pour être heureuse. Elle ne l'est pourtant pas. Pourquoi? Parce qu'elle ne peut pleinement et librement vivre de l'amour passion. Les us et coutumes de même que la morale freinent ses désirs. Cette dynamique est au centre du roman de Gustave Flaubert.
Tout au long de l'histoire, le réalisme se confronte au rêve. Ni un ni l'autre ne l'emporte. L'amour passion est-il un rêve farfelu, irréaliste ou utopique? N'est-il pas au contraire l'essentielle raison de vivre?
Le pragmatisme devrait-il nous guider davantage?
Le roman pose implicitement la question et fait réfléchir sur cet aspect qui est toujours à propos et d'actualité.
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Madame Bovary, tout le monde connaît. C'est ce que je me disais avant de me plonger dans ce monument de la littérature, entamé par intérêt pour l'histoire et l'envie de m'essayer à la plume de Flaubert. Mais en réalité, je m'en étais fait une idée tout autre.

On entend indéniablement parler de l'oeuvre, à l'école notamment, mais aussi du bovarysme, concept que je me rends compte avoir mal compris à l'époque. Emma, je la voyais rêveuse et romantique, l'imaginais en jeune femme perdue dans ses fantasmes, ne vivant une vie tumultueuse qu'au travers de ses songes, depuis l'espace clos de sa maison. Ce n'est pas tout à fait cela. J'ai découvert un personnage quelque peu antipathique, condescendant, qui franchit les frontières entre la pensée et l'action. On comprend la frustration de cette anti-héroïne, coincée dans sa condition de femme, mais plus encore d'épouse de l'époque. Car c'est son individualité qui s'efface avec le mariage. D'Emma, elle devient Madame Bovary. C'est cela désormais son identité. J'ai noté d'ailleurs que le récit débutait et s'achevait en mettant en scène son mari, Charles, la dépersonnalisant davantage, comme si elle n'avait été qu'un personnage secondaire de sa propre existence. Et puisqu'elle est tenue de se confiner dans son rôle social, c'est l'ennui, l'insatisfaction mais aussi l'appel de l'ailleurs qui la rongent. Son vécu fait écho à ce que l'on peut ressentir lorsque des règles ou barrières psychiques entravent la liberté d'un esprit aventureux qui ne demande qu'à concrétiser ses aspirations romanesques. Les moments de lecture sont à ce titre à bien choisir pour le lecteur sensible qui doit être en disposition d'accueillir une histoire qui peut peser parfois.
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Oui, je sais que c'est un classique très souvent étudié en cours, mais malheureusement, comme il y en a énormément d'autres, je n'avais jamais pris le temps de le lire. Et je ne sais plus où, mais on m'avais spoilé la fin du coup j'étais un peu réticente a lire ce roman.

J'ai beaucoup aimé de roman. J'ai trouvé le personnage d'Emma très intéressant. Puis, étant donné notre époque, je n'ai pas trop été choqué par les propos de l'auteur.

Mon édition comporte une partie du procès intenté à l'auteur et aux "complices" que j'ai lu et beaucoup apprécié aussi. On se remet à la place et au moment de la publication de ce roman et on arrive un peu mieux à comprendre pourquoi il y a eu un procès pour atteinte aux moeurs et à la religion.

J'ai aussi lu l'introduction de Bernard Ajac, après avoir lu le lire et bien, comme souvent, je n'ai pas trop aimé ce moment.
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L'intrigue est centrée sur Emma, cette consommatrice invétérée qui cherche à se divertir à tout prix pour éviter de regarder en face les épreuves de la vie, qui jouit, se lasse, s'amuse puis s'ennuie, se veut libertine puis bigote. Elle ne sait pas ce qu'elle cherche et oscille entre les extrêmes pendant tout le récit. Elle n'est dans le fond qu'une pauvre sotte.
Et puis il y a Charles, le mari idiot utile, aussi cocu qu'aveugle sur les agissements de sa femme. Impossible d'éprouver de l'empathie tant pour Charles qui est trop bête pour que l'on s'attache à lui et qui finit par en devenir franchement exaspérant, que pour Emma qui ruine son mari pour accomplir son devoir conjugal avec d'autres.
Le schéma se répète trois fois identiquement dans le livre, sans évolution, ce qui peut rendre ce récit cyclique un peu lassant à force de voir exactement les mêmes situations se reproduire. Emma s'entiche à chaque fois d'un homme et enchaîne les caprices car ce béguin soudain va de pair avec une détestation de son propre mari. S'ensuit une relation passionnelle qui finit comme toute bonne passion, par un déchirement, ce qui plonge Emma dans le désespoir puéril et la bigoterie. Mais ses résolutions toutes vertueuses ne font pas long feu et un rien la fait retomber dans l'adultère : la machine repart pour un tour.
De tout le roman, Emma se garde bien de raisonner une seule fois, de prendre du recul sur sa situation, de penser à autre chose qu'à sa petite personne, qu'elle éprouve la joie béate des amourettes ou le désespoir ridicule d'une adolescente déçue.
Il est tout à fait saisissant de constater comme aucun des personnages de ce roman ne pense : ils sont, pour la plupart, enfermés dans leur volonté de s'enrichir par le travail, tandis qu'Emma, de son côté, consomme, ce qui la dispense de toute réflexion. Quelle société tragique que celle-ci, témoin de la révolution industrielle et en plein basculement dans l'ère de la consommation à grande échelle, où toute spiritualité a été remisée.

Un temps censuré pour sa non conformité aux bonnes moeurs, cet ouvrage est pourtant le meilleur des réquisitoires contre la débauche et la luxure. Flaubert décrit son héroïne comme un être éternellement tiraillé entre la luxure et la continence, cédant à chaque fois aux sirènes de première et finissant toujours dans la douleur, la tristesse et les regrets.
La morale de ce livre est bien simple : une vie de débauche peut sembler à première vue plus exaltante qu'une vie droite et rangée, mais elle mène irrémédiablement à la ruine, au regret, au chagrin et même à une mort prématurée.

Mais cet ouvrage dresse également le tableau, plus large (et à mon avis plus intéressant), d'une société en plein essor industriel, reniant ses racines et reléguant son âme au second plan pour se laisser envoûter par la technique, la modernité, le progrès. Chacun cherche de l'avancement, son profit personnel, son enrichissement et délaisse l'esprit au profit du corps, courant ainsi à une fin aussi tragique que celle que connaîtra la famille Bovary. Emma n'est finalement qu'une personnification de cette société naissante qui fait le choix de la modernité matérialiste plutôt que de l'ancestralité spiritualiste. Flaubert, volontairement ou non, nous met en garde face à cela en explicitant à travers son roman les conséquences d'un tel choix.
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Madame Bovary.... Ou le bouquin que... Passé la quarantaine, je me dis que j'ai des manques un peu craintifs niveau littérature, niveau littérature dite grande, aussi comme je suis pas une trouillarde de temps en temps je me fais un classique de chez classique, que c'est un monument de la littérature qu'il faut avoir lu quand même, si quand même, enfin vous voyez le genre...

Donc là.... paf Flaubert et son Emma... sa Bovary.... et heu...
Je vais vous faire l'impasse du pitch... Je pense que le pitch il est connu...
Bon au cas ou non :

Pitch :

C'est l'histoire d'Emma.

- Humm, c'est tout ? C'est un peu court...
- Comment ça c'est un peu court ? Bon..

Donc, c'est l'histoire d'Emma... Emma et bin... elle s'ennuie grave sa race... La vie, du moins la sienne, elle n'a rien à voir avec ce qu'elle a pu lire dans les livres... et ça la gonfle ! Elle, elle veut une vie comme dans les livres, les romances passionnées, les aventures à l'autre bout du monde, les palais de sultan, et les dorures de la noblesse.. Seulement là où le bas blesse, elle est issue d'une famille de paysans, vit dans un bled en Normandie le pays du cidre, des bocages et des vaches et est mariée avec Charles, sorte de médecin pas super glamour... Donc elle s'ennuie grave... et comme elle s'ennuie elle rêve et elle fabule, et surtout dépense des ronds qu'elle a pas pour combler le vide de son coeur meurtri... et aussi fait cocu son mari... parce qu'elle veut de la passion dans sa vie, de l'amoooooour... et comme qui dirait ça va pas super bien se passer... et pour tout, les ronds et les amants... Je condense. ^^

Et Flaubert, comment dire...
C'est pas que c'est un peu compliqué non... c'est pas ça..
Même si objectivement de temps en temps faut aller jeter un coup d'oeil dans le dictionnaire parce que bon, quand même y a des mots, bin que je ne connais pas, remarquez on ne peut pas je crois, connaître tous les mots..
Surtout au niveau de la mode, mazette, il aime bien parler tissus et chiffon le Flaubert... Et puis ça a été écrit y a une paye, et depuis cette époque-là des mots, certains ont disparu de notre usage, rip paix à leurs âmes, y en avait des sympas..
Bref...

Non à lire franchement c'est pas compliqué... Certain pourrait dire que c'est un peu chiant - et je ne fais pas parti du lot-, mais compliqué certainement pas... Ou aussi on peut dire à la place de chiant, super bien construit, poétique, ciselé et tout et tout... ça ça dépend de la sensibilité de chacun par rapport à un style donné..
Y a des styles qui vous émeuvent, y en a où vous pannez rien, et d'autres où vous pannez des trucs mais qui vous laissent de marbre... ça c'est normal...
Non Flaubert a son style à lui, faut dire ce qui est, j'avais pas encore lu de choses comme ça...
Des fois ça le fait, il a des constructions, des phrases voir un rythme et franchement ouais.. rooh du grand art... vraiment !
Des fois non... des fois c'est plissage de sourcils genre « heu... c'est quoi cette phrase, mais qu'est ce que ça veut dire ? » des fois... Mais objectivement ça vient peut-être -sûrement d'ailleurs- de moi.

Mais je dois dire que malgré parfois mon non pannage pour certaine phrase, cela ne porte pas vraiment de préjudice sur le total, parce que Flaubert s'étale, il aime bien ça... Il redit, rajoute allonge étire empile les choses, comme pour vouloir nous les mettre sous le microscope, nous faire bien comprendre la chose, l'endroit, le lieux, voir l'ambiance...
Il n'est pas avare de description le bougre, il est dans l'inventaire il aime bien ça...
Bon moi la description j'aime, enfin cela dépend de comment elle est faite, la description vivante d'un Zola parfois, où tout nous saute dessus, les images, les cris, voir jusqu'aux odeurs.. Enfin quand Zola n'y va pas lui non plus niveau question inventaire..
Les seuls inventaires que j'aime c'est ceux à la Prévert.. sinon ça m'émeut pas des masses, les inventaires j'en ai fait un certain nombre et faut admettre c'est quand même vachement chiant, et ça a pas grand intérêt...

Donc lui Gustave, les inventaires il aime bien, par le menu on sait tout d'une casquette moche, ou d'une charrette casse-gueule, voir d'un gâteau de mariage avec lac de confiture... bon... si tu veux... C'est sa construction des choses, sa vision, il empile, couche après couche, de la base au sommet et pour tout... Chaque couche a son importance, chaque couche construit l'autre, chaque couche amène à l'autre, chaque couche renvoi à l'autre, ou annonce même la suite... et pour ses personnages c'est pareil... et pour sa construction narrative itou... ^^ -j'aime bien itou comme mot ^^- sorte de construction narrative matriochka.

Bon je vous parle pas de l'histoire, vu que l'histoire y en a pas... c'était d'ailleurs voulu par le père Gustave d'écrire un livre sur rien, c'est lui qui l'a dit... là.. je trouve l'idée un peu louche mais si tu veux... c'est toi qui écrit, tu fais comme tu le sens...

Donc un livre sur rien, sur l'ennui... sur le vide... mais en même temps, sur le désir aussi... le désir de plein, vu que y a rien... Quand y a rien y a toujours le désir qui accompagne, et pour peu importe d'ailleurs, le mieux, la paix, la richesse, la femme du voisin, l'herbe verte du pré d'à côté...
La convoitise... Dieux qu'elle convoite la mère Emma...
L'ennui (tient on y revient) c'est qu'elle convoite mais qu'elle n'a aucunement de passion en elle pour au final arriver à ses fins de façon pérenne… l'imagination l'emporte toujours sur la réalité, et la facilité sur l'effort. Elle me fait penser à une vache qui regarde passer les trains en broutant malgré tout l'herbe mais en rêvant à celle de l'autre côté de la voie.

J'ai détesté cette bonne femme, je n'ai éprouvé aucune empathie ou pitié pour elle...
Pire, même... mais j'ai un coeur de pierre je suis bien au courant... ça explique peut-être, et pourtant, des passions, des désirs, des rêves j'en ai plein la tête et plein le coeur... des fantasmagories romantiques... pire qu'elle, on aurait pu se comprendre... Seulement elle est d'un égoïsme assez consternant, pleutre tellement pleutre ( et ne venez pas me dire que c'est l'époque qui veut ça, même à cette époque des femmes ont poursuivit leurs rêves et quels qu'ils soient.. je dis pas que c'était facile, de toute façon suivre son rêve quelle que soit l'époque n'est jamais facile pour une raison ou pour une autre d'ailleurs)...
La bêtise... Dieux que cette femme est bête...
Ils sont tous bêtes... malgré leur position sociale, malgré leurs études ( on a un pharmacien, un médecin, un clerc de notaire, même Emma est cultivée) n'empêche ils sont bêtes...

De l'incapacité à voir les autres, et tous... Elle seule compte, elle et tous ses délires... un ego aberrant, le truc limite pathologique, une sensibilité de bulot. On m'avait présenté Emma passionnée... Emma n'est pas passionnée, elle n'est rien... une pauvre vache et je suis méchante pour ces pauvres ruminants.
L'égoïsme...
Bon... le truc, c'est que ouais elle est dépressive ok... une bonne grosse dépression des familles c'est certain.. bon et on ne jette pas le cailloux à une personne malade aussi... enfin, normalement.. Ouais normalement on éprouve empathie voir pitié pour le/la pauvre hère..
Seulement vu que j'ai un coeur de pierre, et bien non... je lisais la merveilleuse écriture de Flaubert qui coule et chante comme un ruisseau et je pensais « mais qu'elle est C*** »... ou bien « la pauvre truffe... » voir à un moment « mais ouais vas-y saute ! »... tss...

Donc l'histoire d'Emma, un livre soit disant sur rien, sur l'ennui mais un livre sur la convoitise, la bêtise, l'égoïsme...

Et également un livre, une critique sociétale dite au vitriol (pour l'époque) mais là aussi, bon bin on a toujours les mêmes maintenant... entre les yaka faukon genre le père Homais, médisant et immobile, inspirant les pires idées à d'autres sous couvert de bons conseils ou de pseudo culture alors qu'en fait le gars est d'une bêtise crasse, c'est le personnage le plus vil et le plus ridicule de l'histoire... entre celui dans sa ligne de pensée, genre le curé ( mais qu'attendre d'un curé) qui ne voit rien d'autre, et complètement à côté de la plaque, entre le Charles un peu mou du genou, impressionnable malléable et écoutant bien trop les autres, voulant plaire sorte de pâte à modeler dés le départ... mais pourtant gentil et amoureux, et là passionné.

En fait Charles, le bon Charles est le seul passionné de l'histoire, il aime sa femme comme un dingue, même s'il ne sait pas le montrer...
C'est étrange aussi, mais je ne vois pas Charles si falot, il a essayé, et chaque élan, fut tué dans l'oeuf dés le début par sa conne de femme.. désolée j'ai pas pu m'empêcher ^^
élan de tendresse, avec câlin de la part de Charles réaction d'Emma : « vous allez me chiffonner. »
élan de divertissement de la part de Charles réaction d'Emma : Danser ? Vous n'y pensez pas ! ( hum... C** finissant par asse, et vient pas te plaindre après que ton mec fasse plus rien, dés qu'il essaie, dés qu'il a envie tu le jettes.)
Charles veut sincèrement le bonheur de sa femme, il s'inquiète de sa santé, il dépense des ronds pour un cheval, la pousse a faire de la musique... Bref le pauvre, quand on sait ce à quoi finalement va servir tout ça, le cheval et la musique...

Finalement j'ai beaucoup plus plaint Charles qu'Emma... Parce que se retrouver avec une nana qui rêve de s'en prendre une, de se faire taper dessus, pour pouvoir ressentir des trucs parce qu'au final elle se rend compte qu'elle n'a aucune raison de le détester et que là ça lui en donnerait une .. bin je me dis gars t'es pas sorti le cul des ronces, et pour elle ça frise la pathologie mentale !

Donc oui bon y a rien de bien nouveau sous le soleil, la nature humaine n'a pas évolué d'un iota, les contextes, la techno oui, mais l'homme reste le même et c'est à mon sens plutôt affligeant...

La seule chose qui a évolué au final, c'est la possibilité donnée aux femmes de faire des trucs, de bosser, de divorcer de se séparer, de voyager, et tutti quanti.. en gros d'être, à l'époque d'Emma même si cela existait, il y a toujours eu des rebelles, c'était beaucoup plus difficile que maintenant...
Et franchement, vu comment Gustave nous la présente, et bien même maintenant, je suis pas certaine que la donne aurait tant changé.. Elle aurait pris des crédits, elle aurait trompé son mari, et elle se serait plaint de la même manière en jetant la faute au monde, à tous les autres, parce que même de nos jours y en a des comme ça... toujours...
Et je ne suis pas certaine que Flaubert ai écrit Madame Bovary en faveur de la femme, comme j'ai pu le lire ça et là. Je ne suis franchement pas certaine que se soit un livre féministe, du tout même. Un pamphlet pour la libération de la femme, là clairement je ne crois pas ( j'ai peut-être tort).
Parce que Flaubert -enfin je l'ai ressenti comme ça- ne fait pas d'Emma un personnage sur lequel on peut s'apitoyer et dont on voudrait prendre le parti, la rendre sympathique, partager ses souffrances, partager ses rêves et voir au final les barrières dues à son sexe. Je n'ai jamais ressenti cela. J'ai même ressenti le contraire.
Emma se retrouve dans cette position, non pas à cause de son sexe, mais à cause de sa bêtise, son indolence et sa paresse. Bon bien sûr de temps en temps elle souhaite avoir été un homme, pour pouvoir faire des trucs, mais là encore je ne l'ai pas ressenti comme un vrai désir, mais de nouveau comme un rêve puéril, solution qui dans sa tête aurait tout résolu (comme si)...

Emma est molle... de l'ordre de la mollesse, ce n'est pas une ce que j'appelle une faiseuse, pour faire il faut du courage autant que du rêve... de l'énergie, et de l'énergie elle n'en a pas une miette...
Paresseuse molle, égotique, narcissique, égoïste et avec au final aucune sensibilité, aucun amour pour rien... si ce n'est les rêves puérils qu'elle imagine, les lectures à l'eau de rose qu'elle prend pour argent content..
On en a vu d'autres, bonjour les filles qui ont pris les Disney pour ligne de conduite et qui attendent leur prince charmant ( qu'elles ne trouvent jamais bien sûr...)
Donc franchement je ne suis pas certaine que soit un livre dit féministe... perso je le vois pas du tout comme ça...

Je me doute que pour l'époque le roman fut comme une sorte de pavé dans la mare.. oui je sais procès toussah toussah toussah...

Mais ce qui est assez amusant à ce niveau-là, le procès pour immoralité – l'adultère féminin passait mal à cette époque- Je ne suis pas certaine (enfin je ne sais pas) si la critique générale de cette petite bourgeoisie, cette manière de penser, de faire (et pour tous), le cynisme de Flaubert, de nos jours on dirait qu'il se fout de leur gueule, a été vue. Dieux comment Flaubert se moque de ces gens et de cette manière de penser, de faire, de parler, de voir la vie et pour tout le monde, tout le monde en prend pour son grade. Mais c'est fait avec tant de beauté et de subtilité, de finesse...

Sur l'adultère en fait, je ne sais pas trop quoi dire, à part que c'est ultra convenu, Emma veut se rebeller et ressentir, et les regarde tous avec dégoût, les déteste tous, mais elle choisi au final pour se démarquer et se soit disant libérer du moyen le plus convenu d'entre tous.. y a pas plus convenu que l'adultère faut quand même dire ce qui est, convenu, facile, de l'ordre de la transgression basse... Pourtant même là, c'est de nouveau elle, qui fait fuir ses amants ( là aussi, franchement ses choix de mecs laisse à désirer), par ses actions, ses rêves et ses délires.
Emma est toujours insatisfaite, et elle le sera toujours. Rêve de possession, et quand elle les obtient ce n'est jamais assez, rêve d'amour, mais elle n'est pas capable de voir ou de ressentir celui qui est là, juste à côté d'elle, donc plantage en grand et due forme, rêve d'aventure et quand son aventure (ses aventures arrivent) se retrouve de nouveau insatisfaite et de nouveau dégoûtée non par elle-même, mais par ceux qu'elle côtoie... elle vaut tellement mieux que ça.. Et non Emma tu ne vaux pas grand chose ( là je vais pas me faire des ami(e)s...^^).

Le truc, qui m'a interpellé, notre Gustave nous fait un portrait au vitriol de l'humain, le petit monde bourgeois provincial ok... Mais c'est un portrait que je trouve biaisé, Gustave se défendait d'être un naturaliste et à ce niveau-là je suis bien d'accord, parce qu'il ne regarde qu'un seul côté de la pièce... un seul pan de la montagne, un seul aspect... le moche.
Et cela n'est à mon sens pas très crédible pour un naturaliste, dans son roman y en a pas un pour rattraper l'autre, à part peut-être le papa d'Emma, le père Théodore, le seul au final qui a trouvé pour moi une quelque grâce, une réelle humanité et le seul au final qui a ressenti de réelles émotions, tant quand il raconte la perte de sa femme, que quand il marie sa fille, ou qu'il écrit que c'est grave la mouise à la ferme, putain de tempête à la con, le toit de la grange a foutu le camp, et qu'il aimerait bien rencontrer sa petite fille... (bon c'est pas dit comme ça, c'est mieux dit, c'est Flaubert ^^)...
Donc non point de naturalisme chez Flaubert, j'ai souvenir que le naturaliste raconte les deux facettes de la pièce, même dans les endroits les plus sombres et les plus noirs, mention spéciale au père Zola et sa Gervaise (ou l'horreur mais pas que...)...

Flaubert à écrit, un drôle de truc, un mélange de symphonie pastorale choubidou, clair qu'il connaît bien la nature, la campagne limite qu'il l'aime, allez savoir - les seuls moment où j'ai vu une lumière et une joie certaine, sont dans les souvenirs d'enfance de Charles avant son entrée en pension, je pense d'ailleurs qu'il aurait fait un fermier tout à fait honorable et heureux... mais pâte à modeler, maman papa toussah... bref...
Donc un côté pastorale, mais également bourbier marasme, marécage glauque de l'humain, l'humain franchement Flaubert il ne mise pas un copec dessus ( enfin cet humain là).. d'un côté ouais je le comprends, l'humain c'est quand même vachement moche...

Après bon... En fait si j'ai entamé cette lecture, malgré mon peu de classique au compteur, et malgré le fait que je ne me sente aucunement légitime pour lire de telles choses (vu le niveau d'étude au compteur aussi) c'est à cause de Nabokov, et de ses cours de littérature donné à des étudiants... j'en ai lu certain et celui sur Flaubert et son Emma, est de l'ordre du dithyrambique... wahh.. tellement que ça m'a donné envie...
Bon pour Nabokov je suis une mauvaise lectrice, une très mauvaise lectrice, m'en fout.. au moins je lis des trucs nah !
Et d'ailleurs après avoir lu le bouquin de Flaubert, Emma est la pire lectrice qui soit pour lui... la pire ! Elle a tous les défauts qu'il exècre.
Et je ne suis pas super d'accord avec Nabokov là-dessus, à mon sens il est tout à fait possible de ressentir des émotions à la lecture d'un texte ou d'une histoire, et pour autant voir, appréhender comprendre, un fond, une forme et un message. Et franchement je me dis que l'un n'empêche pas l'autre.

Et pour Flaubert j'ai vu et comprends ce que Nabokov explique à ses étudiants ( même si au moment de la lecture, je dois bien avouer le cours de Vladimir m'était sorti de l'esprit). Flaubert a une construction narrative magistrale, un style ciselé.

L'art de la littérature...
Et certes, à ce niveau-là, on pourra dire ce qu'on voudra, une chose est sûre Flaubert y va pas avec le dos de la louche...

Même s'il faut le dire aussi, c'est de l'ordre de l'implicite, et de la subtilité, même si ses personnages portent des gros sabots de bois, il n'en est pas de même pour Gustave, les pendants, les métaphores, les sous texte pullulent dans son roman... je dois dire certains m'ont sauté au visage ( avec un mazette joli de ma part) d'autre je n'ai pu que les supputer, impression parfois diffuse que là y avait sans doute un truc.

Bon bin voilà, j'ai lu Madame Bovary de Flaubert.. je ne sais pas si ce que j'ai écris a du sens, voir même si j'ai bien pris le bouquin, compris comme il faut...
Et franchement je ne sais pas si cela me laissera un souvenir impérissable, peut-être... mais au moins je l'ai lu... c'est déjà ça. ^^

Je suis un peu moins bête aujourd'hui qu'hier... j'ai appris plein de nouveaux mots – ou anciens mots, ça dépend comment on le prend- qui certes seront bien difficiles à caser dans une conversation. ^^
Pour le prochain je crois bien que je vais aller faire un tour chez les Russes... j'ai un gros Dostoievski qu'est là, une histoire de démons ou de possédés... même pas peur !

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Un classique lu pour le défi Babelio multi consignes .

Je crois bien avoir lu ce roman en terminale...en 1977 ! mais pas vraiment beaucoup de souvenirs ...

Emma Bovary c'est la femme qui s'ennuie avec application. Rien ne la tient bien longtemps en haleine, pas plus son mariage, sa maison, la religion ou ses amants. Elle cherche désespérément un autre, dieu ou humain, qui donne du sens à sa vie.

C'est une femme particulièrement peu attachante, repliée sur un égocentrisme et une puérilité qui lui fait rechercher une fusion totale avec ses partenaires au risque des les effrayer ... On peut comprendre qu'elle n'ait pas pu assouvir ses élans sentimentaux et physiques dans les bras de Bovary, qui, bien que brave homme, ne fait pas forcément rêver. Si ses deux amants éveillent ses sens , ils ne la rassasient pas sur le plan sentimental mais qui le pourrait ...

Dépendante de ses amours elle est tout autant une acheteuse compulsive qui ruinera son mari et fuira régulièrement dans la maladie, échappant ainsi à toute responsabilité...

Les hommes, à ses côtés ne sont pas plus reluisants, de son mari, dévoué, bonhomme et relativement stupide à ses amants plus ou moins aimants mais tout à fait fuyants face aux exigences -folles- de leur maitresse. Car Emma Bovary est quand même un "brin" déséquilibrée, s'inscrivant dans la folie des femmes de son époque où l'hystérie remplissait les salles d'asiles...

C'est un très bon classique, qui permet une vue historique et sociologique sur la vie d'un gros bourg de de province du XIXe, un exemple pour les thérapeutes de couple et un sujet d'étude pour les psychiatres...smile Si le roman est certes daté, il n'en reste pas moins un beau miroir de l'âme humaine au travers des différents personnages .
Lien : http://theetlivres.eklablog...
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Il y a déjà eu tant de critiques si justes sur ce livre que je ne saurais ajouter la mienne sans répéter ce qui a déjà été dit. Aussi, ma lecture ne fut pas suffisamment attentive et commence à dater à l'heure de cette critique. J'aimerais, plutôt que de revenir une énième fois sur l'histoire, sur la moralité du livre, sur les interprétations possibles... m'attarder exclusivement sur le style de Flaubert dans Madame Bovary. Et c'est ce passage en particulier que je me permet de souligner (troisième partie) :

"Le prêtre se releva pour prendre le crucifix ; alors elle allongea le cou comme quelqu'un qui a soif et, collant ses lèvres sur le corps de l'Homme-Dieu, elle y déposa de toute sa force expirante le plus grand baiser d'amour qu'elle eût jamais donné. Ensuite il récita le Misereatur et l'Indulgentiam, trempa son pouce droit dans l'huile et commença les onctions : d'abord sur les yeux, qui avaient tant convoité toutes les somptuosités terrestres ; puis sur les narines, friandes de brises tièdes et de senteurs amoureuses ; puis sur la bouche, qui s'était ouverte pour le mensonge, qui avait gémi d'orgueil et crié de luxure ; puis sur les mains, qui se délectaient aux contacts suaves, et enfin sur la plante des pieds, si rapides autrefois quand elle courait à l'assouvissance de ses désirs, et qui maintenant ne marcheraient plus."

Ce passage est à mon sens représentatif de la potentialité stylistique de Flaubert à défaut d'être représentatif du style général du récit. Je m'explique : l'auteur dépeint un personnage qui n'est que pêché, qui ne vit que dans la chair. Et toute cette scène consiste en la rencontre entre l'esprit et le corps, la chair et la repentance, Dieu et l'homme. Flaubert dépeint cela avec élégance, un rythme solennel, de longues phrases (le paragraphe ne fait que deux phrases), des actions découpées en gestes et des gestes rapportés à des parties du corps précise. Cette synesthésie corporalisée fait de Madame Bovary une créature malheureuse, pantin de son esprit, malade qu'il faut guérir, possédée qu'il faut exorciser.

Tout au long du récit, elle s'est refusée à cette rencontre, à ce barrage spirituel qui l'aurait empêchée de concrétiser ses désirs imaginaires. Elle a cherché un amour fictionnel qui ne s'est jamais pleinement réalisé. C'est aux frontières de la mort qu'elle se voit contrainte d'oublier la fiction littéraire à laquelle elle a toujours cru pour embrasser (littéralement) ce qui était autrefois à ses yeux la véritable fiction : celle de Dieu. Mais elle l'embrasse avec sincérité ("Elle déposa de toute sa force expirante le plus grand baiser d'amour"). C'est une conversion. Une conversion de l'amour fictionnel à l'amour divin. Peut-être un renoncement, une folie ou une lucidité. Difficile à dire étant donné que Madame Bovary est droguée à l'arsenic à ce moment-là.

Cette scène est importante dans l'économie du récit. Elle précède la mort de Bovary mais l'y prépare en même temps. Cette extrême-onction s'inscrit également dans un crescendo émotionnel qui ne cessera qu'à son paroxysme, à la fin du récit.

Ce genre de passages n'est pas rare dans le roman, mais celui-ci est, je crois, celui qui m'a le plus marqué.
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