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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
C'est un texte court, un de ces tracts que publie désormais Gallimard, mais qui résonne comme un programme de travail, ou plus exactement comme une suite d'intuitions développées, et à continuer à développer, dans le cadre de la chaire "humanités & santé" que Cynthia Fleury anime à l'APHP et au Cnam.

La première intuition, presqu'un postulat, et c'est celle du titre lui même, "le soin est un humanisme", c'est que "l'existence précède l'essence" ; par parallélisme on est tenté de dire que le soin précède la médecine. le soin manifestation de cette "exceptionnalité de l'homme", cette "fiction régulatrice" (comme l'est le "contrat social" de Rousseau), qui n'a pas existée, puisqu'on sait maintenant la grande continuité entre l'animal et l'homme, mais qui est au fondement de l'éthique humaine.

Voir la suite sur mon blogue : http://www.daniel-lenoir.fr/le-soin-est-un-humanisme-sur-le-tract-eponyme-de-cynthia-fleury/
Lien : http://www.daniel-lenoir.fr/..
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De l'utilité des humanités dans le soin.
De l'utilité des relations entre patients/soignants mais aussi entre soignants/soignants.
Bref, des sujets qui ouvrent aux réflexions et pensées.

Mais que ce texte est court !
J'en sors avec une envie de "reviens-y".

Merci à vous Cynthia Fleury
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Un opus publié dans la collection « tracts » de chez Gallimard, 48 pages … (une lecture qui convient parfaitement pour le challenge riquiqui) … mais ce n'est pas le nombre de caractères qui rend la lecture aisée. Un opus extrêmement dense que j'ai essayé de comprendre et d'intégrer et dont je vais tenter de mettre en exergue quelques points significatifs ainsi que quelques réflexions personnelles sur les sujets abordés.
L'autrice cite de nombreux philosophes, propose de nombreuses références, toutes semblent intéressantes et j'aurais bien envie de me documenter davantage en en lisant quelques-unes mais soyons honnête, je n'aurai jamais le temps de tout lire.

1. Il est donc question, en paraphrasant Sartre et son : « existentialisme est un humanisme » d'une réflexion sur le soin qui est un humanisme. Qu'est-ce qu'un humanisme ? : il s'agit d'une doctrine qui place la personne humaine et son épanouissement au-dessus de toutes les autres valeurs (cf. le Robert).

Parce qu'il n'y a pas de maladie mais seulement des sujets qui tombent malades et la reconnaissance de cette subjectivité est la seule opérationnelle pour la production d'un soin. (page 30)
Dans cette optique l'autrice propose de faire entrer la philosophie à l'hôpital, en créant une chaire dont l'objectif est de divulguer des enseignements mais aussi de répondre, de participer à la réflexion. le grand mouvement des humanités au GHU Paris, regroupe la philosophie, le design, la psychanalyse, l'art thérapie ..
L'autrice insistant sur le fait que les soignants, les médecins, sont formés à la théorie, aux gestes techniques, mais peu à l'empathie, à l'écoute du patient. Peu formés, peu de temps pour s'y intéresser une fois en poste, en proposant ces cours, elle propose (page 23) « de définir des approches cliniques de la sollicitude et de la prudence . …Articuler savoir-faire et savoir-être est déterminant pour créer l'optimisation du soin, les conditions d'acceptabilité du traitement et de son observance, comme les conditions du rétablissement qui peuvent en découler ». La philosophie doit être à disposition des services hospitaliers, elle ne doit pas rester à l'université.

2. Prendre soin des patients, en les rendant capacitaires Page 7 : « il faut se soucier de rendre « capacitaires » les individus, c'est-à-dire de leur redonner aptitude et souveraineté dans ce qu'ils sont ; comprendre que la vulnérabilité est liée à l'autonomie. »
Un individu malade est un individu vulnérable, qui potentiellement perd en autonomie, a besoin d'aide pour s'en sortir.
Bien soigner serait d'essayer de faire valoir chez le patient une capacité d'autosoin pour qu'il devienne une ressource et non pas un assisté.
En proposant de les rendre capacitaires, il me semble que l'autrice propose qu'ils fassent moins appel aux soins extérieurs puisqu'ils pourront poser quelques actes par eux-mêmes, puisqu'ils sauront comment faire pour se soigner de façon autonome.
Ce faisant, cela résoudrait une partie des difficultés puisque moins en attente d'un personnel soignant, celui-ci serait moins sollicité pour des broutilles et pourrait par conséquent se consacrer à des soins plus importants.
Je m'interroge sur cette vision de capacités. Certes, si une personne sait procéder à sa toilette seule par exemple, plus besoin du passage de l'infirmière au domicile pour la réaliser. Mais n'est-ce pas faire porter une lourde responsabilité sur le patient, non seulement il souffre, mais en plus il doit arriver à se débrouiller seul.
N'est-ce pas courir le risque qu'il finisse par se débrouiller grâce à l'aide d'un proche par exemple, qui évidemment ne sera pas rémunéré ni reconnu dans cette mission ? Et qui sera le plus probablement une femme ? L'autrice dénonce la féminisation, la naturalisation de la tâche, on considère que le soin est porté par celle qui naturellement est pourvue de capacité de soin (la mère vis-à-vis de son enfant).
N'est-ce pas faire porter trop de responsabilité au malade, au patient ?

3. La fatigue des soignants qui bien au fait de la nécessité de soigner les corps n'arrivent plus à prendre soin des leurs.
« sur les ronds-points, les avenues, au détour de quelques débats ou rencontres impromptues, cela m'avait marquée : précisément leurs marques ; les corps fatigués, alors qu'ils sont jeunes, les peaux sans éclat, les dos et les genoux qui font mal, les organismes et les esprits abîmés » (prologue).
Le personnel soignant est fatigué, en 2019 en France éclate de nombreuses grèves un peu partout dans le pays. Pour des raisons économiques, budgétaires, on ferme des lits partout dans les hôpitaux, quand on ne ferme pas carrément l'hôpital, la maternité. le personnel soignant est mal payé, alors qu'il a une énorme responsabilité, subit une énorme pression : faire en sorte que les patients soient soignés au mieux, le personnel n'est absolument pas considéré. Que ce soit une charge de travail importante, des corps lourds à manipuler, des nuits de garde à assumer seul, à courir partout dans l'étage pour répondre aux coups de sonnettes de malades apeurés, en souffrance … Ou encore les infirmières à domicile qui se lèvent à l'aube, parcourent un grand nombre de kilomètres pour aller d'un patient à un autre, il y a des impératifs horaires : tel personne doit recevoir sa piqûre tôt le matin, une autre attend que sa toilette soit réalisée … et ce personnel soignant, bien au fait de la nécessité de prendre soin des corps, n'arrive même plus à prendre soin du sien.
Notre société manque de considération pour le soin, elle la rend invisible. Il a fallu la pandémie de Covid au printemps 2020 pour que le personnel soignant soit applaudi aux balcons des appartements où nous étions confinés. Initiative louable, soutien moral, mais qui n'a pas rendu la tâche plus facile ni le salaire plus attractif.
L'autrice cite Axel Honneth et ses travaux mentionnant l'invisibilisation sociale de certains d'entre nous, entre autres les malades et les aidants proches.

4. Il est aussi question bien évidemment des institutions : il s'agit d'étudier les organisations institutionnelles sociales et sanitaires et à vérifier qu'elles sont compatibles avec une éthique du soin. Epuisement professionnel en secteur hospitalier, le nombre toujours élevé de suicides de soignants, … le secteur public (et pas uniquement dans le domaine de la santé) sont victimes d'un management déshumanisant, entre pressions arbitraires et injonctions contradictoires. Que l'univers du soin soit lui-même malade est dommageable pour les patients, les citoyens et le monde de la santé en règle générale. Comment un milieu peut rendre malade celui qui s'y trouve. Là encore la chaire « humanités et santé » espère pouvoir contribuer activement à la mise en place de ce regard critique sur le fonctionnement des organisations et des institutions, afin qu'elles puissent continuer de rénover leurs pratiques et élaborer le meilleur soin possible pour les soignés et les soignants (pages 25-26)

On le voit, la tâche est grande. Mais enthousiasmante. A peine un an après la publication de cet ouvrage, la pandémie est venue rebattre encore les cartes. J'ai pris beaucoup de plaisir à triturer ce texte, à le relire plusieurs fois pour essayer de rédiger une chronique qui soit lisible, compréhensible mais aussi qui n'altère pas les propos de l'autrice. J'espère y être parvenue.
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