Une bonne analyse poétique pour décrire le rapport entre soigné-soignants soumis malgré eux aux contraintes réglementaires, humaines, et économiques de nos sociétés.
Ce livre est une ode au dévouement de ces professions qui se donnent sans compter mais dont les services publics comptables à l'extrême, restreignent sans scrupules les coûts excessifs de ces soins, pour la société. Les poèmes et les textes abordent tous les thèmes et problématiques sur la dépendance, la maladie et la fin de vie auxquels sont confrontés les aidants ou les soignants. Ils sont les interlocuteurs muets mais spectateurs ou acteurs souvent impuissants devant la fatalité qui leur font face. Chacun interagit en frôlant à tout instant la maltraitance, menace récurrente dont la frontière est à géométrie variable.
Le quotidien dépeint sous forme de poèmes et de nouvelles courtes décrit les épisodes de frustrations devant le temps qui passe, un temps compté et précieux réduit à une portion congrue auprès des malades dans les structures médicales, ou par les travailleurs indépendants (infirmières à domicile).
Les portraits des uns et des autres ne peuvent pas laisser indifférent, peut-être se retrouvera-t-on dans une de ces situations… qui sait ?
le livre se décompose en 36 chapitres de poèmes et petites nouvelles pour rendre hommage aux âmes guérisseuses, âmes généreuses. Comme je les présente dans le désordre ; j'ai souligné leur titre pour tenter de résumer ces 140 pages d'un message si dense, poétique et troublant de réalisme.
L'auteure évoque l'ensemble des professionnels qui évoluent au nom de la vie autour des personnes âges et malades qu'ils évoluent en structure ou à domicile, ponctuellement ou au long cours. Leur challenge de tous ces hommes et femmes peut s'assimiler à un défi sportif où l'exercice exige une discipline pour ces Soignants… Athlètes au quotidien (poème) : vivacité (tout est fait mais vite fait), endurance, motivation, performance, investissement moral et physique, énergie, victimes potentielles de Burn Out.
L'auteure salue l'effort de ces équipes médicales. Même jeune et toute fraîchement diplômée, l'infirmière qui, elle court tout le temps (encore plus à domicile) sera vite confrontée aux cruautés de la fatalité, avec souvent un sentiment d'impuissance (poème). L'aide-soignante, boutonne sa blouse à ses côtés pour l'assister de porte en porte et tentera d'apaiser les âmes et les douleurs avant de prendre soin de son propre foyer. Un don de soi souvent gommé et excusé d'un Mademoiselle, vous êtes si gentille. Dans l'ombre se profile aussi un Hommage aux agents hospitaliers hors des soins mais indispensables. L'auxiliaire de vie, elle, assure une vie à domicile digne des choix de la personne aidée. Leur problématique commune : Une torture silencieuse, cette fatigue, cette abnégation de soi, la gestion du temps, pas de dimanche et jours fériés, rentabilité imposée par l'ARS. La machine à soins éviterait les déboires rencontrés (accident de travail, remplacements) évitant aussi la maltraitance, mais où serait l'humanitude si essentielle comme « donner de son mieux sans attendre des mercis pompeux » ? Cette machine serait absoute de fautes et de dictats réglementaires comme : « nous n'avez pas le droit » (d'user de familiarité en usant du prénom de votre patient).
Le médecin de campagne, en voie de disparition aujourd'hui y tient une place à part dans ce monde de malades : « au fil de nos vies il nous accompagne » « dans les moments importants » assurant les fonctions de plusieurs corps médicaux. Dans ces métiers de soins d'ordinaire très féminisés, le livre rend un bel hommage aux hommes en général avec des hommes de coeurs (poème) appuyé de cette jolie citation « Et si tous les hommes de la terre avaient votre regard, la terre tournerait sur la mélodie de l'espoir ».
Le livre n'oublie pas le ressenti du patient : la mémoire, trésor de l'héroïne Souvenir d'Indochine, ou de Madame Jeanne, une centenaire ; elle draine (ou pas) la vie de Marguerite et Etienne illustré car on ne survit pas au grand amour. le patient adapte sa vie où naît une nouvelle complicité avec la soignante comme dans le poème la belle et l'adjudant, (poème) , si elle le regarde tendrement, ou en lui tenant la main, (poème) cela parfois, suffit. le statut de la personne évolue suite à un brutal AVC, ou la personne âgée parente, elle, a l'impression d'être une enfant (poème). Elle appelle sa maman « si elle a égaré le film de sa vie » ; d'autres vivent au souvenir de la musique, comme ce monsieur qui jouera jusqu'au bout de la vie (portait). A L'opposé d'un E.V.P. (état végétatif persistant), la vie est incontestablement présente.
Notre Lilli, finira, elle isolée à cause de sa famille empêchée de rendre visite à sa maman devenue si fragile. Cependant, elle pourrait se consoler de son don d'amour où son vécu survivra à travers autrui. La quiétude de la fin doit être respectée, alors ne la réveillez pas, elle dort.
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