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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
La famille innue de l'auteur vit dans une réserve sur la côte Nord du Québec. Lorsque son amie Julie – Shuni selon la prononciation innue -, s'apprête à venir s'installer à proximité en tant que missionnaire, Naomi Fontaine lui écrit une longue lettre. Convoquant le passé au travers de sa mère et de sa grand-mère, mais aussi l'avenir par le biais de son fils Petit Ours, elle évoque la survivance de l'identité innue malgré les blessures laissées par le colonialisme et le suprémacisme blanc, et ses espoirs d'un futur plus fraternel, enfin égalitaire, bâti sur un véritable équilibre politique entre Québécois et Autochtones.


Plus qu'un roman, ce texte est un récit personnel et militant pour la cause amérindienne au Québec. Au travers de l'expérience des femmes de sa famille sur plusieurs générations et de ses propres confrontations aux préjugés, l'auteur raconte les souffrances d'un peuple qu'on s'est bel et bien efforcé d'anéantir au nom du progrès contre la « sauvagerie », ses propres regrets de s'être fait voler une part de son identité qu'il lui a fallu apprendre à se réapproprier, à assumer et à défendre, et sa révolte contre la dévalorisation d'une culture dont elle réclame la reconnaissance à part entière.


Pour toutes les Julie que nous sommes potentiellement, cette longue lettre illustre par maints exemples les différences culturelles qui, au lieu de nous opposer, devraient contribuer à notre enrichissement mutuel. Notion de liberté, perception du temps et donc de la vie, place des femmes et des enfants, importance des émotions et du relationnel… : autant de clés que nous remet l'auteur pour nous ouvrir l'esprit et pour plaider l'acceptation égalitaire de nos particularités.


Si l'on devine l'émotion et la douleur à fleur de mots, le discours de Naomi Fontaine est remarquable de dignité, d'espoir et d'élan constructif. Il fait d'elle une véritable ambassadrice de la cause innue au Québec, mais aussi de tous les peuples assujettis au cours de l'Histoire au nom d'une suprématie raciale imaginée, entre autres, à partir d'une certaine idée du progrès.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Shuni, c'est le prénom Julie en innu et c'est comme une longue confidence que la narratrice lui adresse en parlant de son peuple et de sa façon d'être innue encore aujourd'hui. le livre a obtenu le Prix littéraire des collégiens avec raison, car l'oeuvre est bien écrite et touchante. C'est sans fard que Naomi Fontaine parle des gens de sa famille et des gens de Uashat. On peut alors les connaître de l'intérieur et acquiescer à ce qu'ils sont : des gens de coeur avec leurs failles et leur grandeur. J'aime les chapitres courts qui présentent l'essentiel en peu de mots. L'auteure, ici, a répondu à toutes mes attentes.
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Naomi Fontaine nous livre via une longue lettre à son amie Julie ( Shuni en Unni) toute la fierté et la difficulté d'être issue d'un peuple premier.
Elle se livre sur la difficulté d'être différente durant sa plus tendre enfance dans une société très normée. Néanmoins elle relève la tête très vite. Son amour et sa fierté pour sa communauté la rend forte et combative. Elle sait nous exprimer l'authenticité, la détermination et le courage de ce peuple parqué en réserve dans un monde ou ils ont du mal à préserver leur propre identité d'Unni.
J'ai eu un peu de mal à rentrer dans l'histoire au point d'avoir envie de mettre fin à cette lecture. Mais j'ai tenu bon, et l'horizon s'est éclairci pour une joli voyage dans ses contrées lointaines du Canada.
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Dans ce troisième livre, un essai cette fois, Naomi Fontaine s'adresse à une amie d'enfance, une blanche, qui s'apprête à venir à Uashat pour aider la communauté. La forme est toujours la même; quelques pages, tout au plus, consacrées à des anecdotes, des réflexions, des pointes autobiographiques etc. C'est toujours léger, doux, jamais agressant même s'il n'y a pas non plus de complaisance face au passé colonialiste. Il en ressort une mosaïque qui se construit lentement pour nous donner un portrait impressionniste de la réalité innue. Loin d'une étude complète ou d'un plaidoyer déchirant, on se retrouve devant un mélange de témoignage et de considérations quai anthropologiques portées par une plume très aérienne. Et on comprend très bien la position de l'auteure, fière de son appartenance, confiante en ses moyens, les siens et ceux de son peuple. Une lecture à la fois émouvante et instructive.
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C'était très beau, et doux mais je suis restée sur ma faim. Une personne dans les commentaires a dit avoir eu l'impression de lire un essai, j'ai eu la même sensation.

Je dirais que c'est plutôt un recueil de réflexions tout à fait transparentes sur les Inuits et leur condition actuelle.
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J'ai adoré. Parmi les 3 romans de Naomi Fontaine (Kuessipan & Manikanetish & Shuni), celui-ci est mon préféré. Les autres sont excellents aussi, ceci dit.

Dans la lettre qu'elle adresse à son amie Julie (Shuni), la narratrice nous parle de la tradition innue sous toutes ses coutures. Elle compare souvent son peuple à la nation québécoise, celle de Julie. Au-delà de toutes les informations sur les Innus, ce qui fait réellement la richesse de ce livre, selon moi, c'est le style de l'auteur qui nous donne de magnifiques fragments très riches de sens qui nous font comprendre cette réalité étonnement plus complexe que l'on pourrait le croire. L'autrice en profite aussi pour déboulonner plusieurs mythes sur son peuple. Je recommande fortement!

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« Shuni : Ce que tu dois savoir, Julie » (2020, Mémoire d'Encrier, 160 p.) est une longue lettre que Naomi Fontaine écrit à son ancienne amie Julie qui a quitté la communauté pour aller à Québec. Pas du tout un roman épistolaire, puisqu'il n'y a pas de réponse de Julie (ou pas encore). Plutôt une longue plainte, de ce qui a été, ce qui a changé, ce qui attend Julie. Une longue mise au point de la réalité des peuples innus.
Shuni tout d'abord. C'est Julie prononcé en langue innue, où le N et le l'se confondent. En fait il n'y a pas de L, comme il n'y a pas de B ou de d'ou de F. La langue comporte 11 consonnes et 7 voyelles, en fait 4 seulement car il y a les voyelles longues et les courtes. Et pour dire bonjour on dit « Kueil », et Merci, c'est plus long « Tshinashkumitin ». Restent le oui et non : « Eshe » et « Mauat ». Vous voilà paré pour engager la conversation.
Julie maintenant. « le père de Julie était pasteur. Quelques années après le début de sa mission, il avait fait construire l'église baptiste sur le boulevard Montagnais, juste devant le Conseil de bande ». En québecois, on parle de bande plutôt que de tribu. IL fait dire que les innus étaient essentiellement nomades, et pour cause, ils suivaient le gibier. Donc le père était pasteur, évangélisation des sauvages, un peu moins brutale que les catholiques.
Il faut dire que les Montagnais (qui regroupent les Premières Nations du Québec) étaient plus francophiles qu'anglophiles. Pour ces derniers c'étaient les Iroquois. Lire à ce sujet « Fathers and Crows » de William T. Vollmann (1992, Viking Press, 1008 p.) non encore traduit, je crois, en français mais cela pourrait s'intituler « Pères et Corbeaux ». Pas besoin de traduire, c'est simple. le texte se termine par un chapitre intitulé « Black Wings », passant ainsi des Black Gowns (Les Robes Noires) aux Black Wings (Les Ailes Noires) qui va de 1611 à 1990 qui raconte l'évolution de la vie des habitants de ces premières nations durant la colonisation. Parmi ces textes, les comptes rendus des jésuites étaient annuellement envoyées et nous sont parvenus. Je pense aux relations du Père Jean de Brébeuf, « Relations des Jésuites » de 1635 et 1636, qui servaient aussi d'introduction pour les futurs missionnaires. Elles ont été numérisées par les canadiens comme partie intégrante de leur histoire (http://bibnum2.banq.qc.ca/bna/numtxt/195694-2-(708-843).pdf ). Il déclare lui-même que c'est volontairement qu'il s'était jeté dans les mains des Iroquois : Il faut reconnaître que dans son « Avertissement d'importance », Jean de Brébeuf parlait principalement des conditions du voyage, de la brûlure du soleil, la « posture assez incommode » qu'on souffre en canoë, ainsi que sur le dégoût des « sagamités », fades bouillies de maïs, des « tahouac et puces en bon français, incomparablement plus importunes qu'en France », de la fumée des cabanes « si épaisse, si aigre et si opiniâtre » qu'elle altère la vision au point de ne pas « connaître quelque chose dans votre bréviaire ». Un véritable Guide du Routard avant l'heure. Par contre il ne parlait pas des tortures et autres scènes de cannibalisme, ne les ayant pas encore testées.
Retour aux protestants. « de l'extérieur, l'église ressemblait davantage à un centre communautaire qu'à un lieu de culte. Une quinzaine de croyants s'y rassemblaient le dimanche matin. Vêtus d'habits propres et accompagnés de leurs jeunes enfants. Jamais à l'heure. Parfois, certains y allaient pour la curiosité d'entrer dans une nouvelle construction. La religion protestante n'en était qu'à ses balbutiements chez les Innus de nature plutôt conservatrice et de confession catholique ». Mais cela peut servir d'être copine avec la fille du pasteur. « J'avais la certitude qu'elle me protégerait des ours parce qu'elle était la fille du pasteur et que ses prières seraient exaucées, contrairement aux miennes, moi fille de personne ».
Et on entre dans le vif du sujet « Permets-moi de te dire tout ce que tu dois savoir, Julie ».
« C'était avant les décrets canadiens. L'institution de la loi. Les dialogues sourds. La réserve comme une évidence. Qu'avaient-ils à perdre à délaisser leur vie dans la forêt pour s'installer là ? Ils y sont allés. Certains moins dociles que d'autres ». tot comme elle invoque ses grands-parents, elle invoque aussi surtout jeune fils « Petit Ours » « C'est lui, mon petit prince ».
Toute la culture transmise par ses grands-parents. « Et toi Julie, sais-tu reconnaître les pistes du lièvre ? Sais-tu lire le temps qu'il fera sur les feuilles des arbres ? Sais-tu entendre, au-delà de la souffrance qui est visible, le pouls d'un coeur qui s'accélère pour continuer à battre ? ».
« Ici, Shuni, le temps a la forme d'un cercle. Il évolue continuellement. Chacun suit le cercle du déroulement de sa vie. Comme les saisons se succèdent, se ressemblent. Dévoilant des parts cachées que nul ne soupçonnait ». « le cercle est différent d'un système linéaire de temps dans lequel la vie est une course du point A, la naissance, au point B, la mort. Entre les deux, les études, la carrière, le couple, la maison, la famille, la retraite. Dans cet ordre ».
On ira voir sur le site https://kwahiatonhk.com/ la vie et la culture des innues.
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Naomi Fontaine écrit une longue lettre à son amie Julie, "Shuni" en innu, langue dont sont absentes les lettres J et L. Elles se sont connues enfants dans la réserve d'Uashat -sur la Côte-Nord du Québec- où vivait la première et où le père de la seconde, pasteur, officia pendant treize ans auprès des autochtones. Or Julie revient à Uashat, cette fois en tant que missionnaire. Naomi respecte ceux qui se donnent pour tâche de venir en aide aux siens, elle admire leur courage et leur empathie, elle sait qu'ils sont animés de bonnes intentions, mais elle sait aussi -et surtout- que ce n'est pas suffisant. Elle veut donc prévenir son amie : pour bien aider, il faut d'abord connaître. Aussi, elle va tenter de lui transmettre quelques clés pour mieux comprendre ce peuple dont elle est issue, son histoire, son identité et ses idéaux, ses rêves et son quotidien.

Elle va lui raconter ce que les chiffres ne disent pas.
Car l'une des principales erreurs serait de se laisser influencer par les statistiques, qui définissent, enferment, empêchent de voir l'individu derrière l'image par laquelle on le catégorise. Des statistiques qui ne s'attardent que sur les échecs et les problèmes -le faible niveau scolaire, la toxicomanie, l'alcool, le suicide- posant des certitudes qui avilissent et découragent, et à partir desquelles on recrée le contexte qui les alimente, en rabaissant le niveau scolaire, en consacrant de faramineux budgets aux programmes de prévention des drogues, s'attaquant aux symptômes plutôt que de tenter de comprendre les causes… L'image désastreuse qui en résulte est de plus véhiculée par ces bonnes âmes qui leur viennent en aide, médecins, enseignants, politiciens, ou autres travailleurs sociaux... : quand on parle d'eux, c'est pour évoquer, avec compassion ou commisération, leurs difficultés.

C'est donc sur leurs forces, leurs richesses, et la dimension exceptionnelle que permet leur différence, que préfère s'attarder Naomi Fontaine.

Colonisé, relégué entre des clôtures de métal, le peuple innu a vu son savoir mis à rude épreuve, sa parole souillée, son territoire dévasté, son mode de vie bouleversé. Il a pourtant eu le courage, l'audace même, de croire que c'était là une occasion de de construire un monde plus doux pour ses enfants, de les protéger de la famine, du froid, de la mort et de la maladie. Aux dépens de sa propre langue, de son savoir, de sa fierté, il les a envoyés à l'école, a laissé le français devenir leur langue, quitte à instaurer une distance entre les générations.

N'est-ce pas de l'admiration (et non de la pitié) que doit susciter cette résistance, terme que préfère Naomi Fontaine à celui de résilience, qui suppose une certaine forme de reddition. le peuple innu résiste, oui, en s'entêtant à vivre, à construire, à croire en l'avenir, en faisant plus d'enfants malgré la misère, en s'acharnant à poursuivre des études quand tout s'y oppose, en aimant, en écrivant dans la langue coloniale, bref en restant ouvert à une société qui pendant un siècle a tout fait pour détruire sa culture.

Alors, sans doute le temps est-il venu de reconnaître enfin cette résistance, et de dépasser la hiérarchie des rapports que l'on a imposé à ces autochtones jusqu'à les faire douter d'eux-mêmes et de leur propre culture, jusqu'à leur inculquer un complexe d'infériorité. le temps est venu de faire le chemin dans l'autre sens, en cessant de ne juger les Innus qu'en fonction de ce qu'ils ne font pas comme les blancs, en cessant d'en déduire que cela fait d'eux des sauvages et des inférieurs, pour reconnaître la légitimité et la valeur de leurs propres savoirs. Cesser de leur reprocher leur ignorance de la ponctualité ou leur incapacité à être économe, pour s'intéresser à leur connaissance de la nature ou des saisons. Cesser d'opposer modernité et identité. Il n'y a chez les Innus aucun refus de la modernité ; rester fidèle à son identité et à ses valeurs ne signifie pas que l'on refuse d'évoluer, de s'adapter, de faciliter son mode de vie. Et c'est quoi la modernité ? A la conception matérielle qu'on a tendance à lier à cette notion, Naomi Fontaine oppose une conception sociale, humaniste, rappelant que dans leurs forêts, les Innus pratiquaient déjà depuis longtemps la démocratie, l'égalité hommes-femme, la liberté des liens humains, ce dernier point primant par-dessus tout – l'argent, l'éducation, la réussite et même le sexe - au sein de la communauté innue, l'entraide et la sollicitude étant ancrée dans leur mode de vie, valeur fondatrice (avec celle du travail) qui s'est délitée au sein nos sociétés intéressées et mercantiles.

"Shuni" est porté par une écriture sobre mais très émouvante car sincère et surtout porteuse d'espoir et d'un puissant optimisme. A l'image de la manière dont les Innus considèrent la vie, comme un cercle qui permet les retours en arrière, les recommencements, Naomi Fontaine porte son regard vers demain avec la foi de qui croit aux secondes chances, aspirant à faire cohabiter la diversité du monde, persuadée de la capacité de l'homme à tirer des leçons de ses erreurs passées, rêvant d'un pays neuf où les premières nations seront remises au rang d'adultes, certaine enfin que seul l'amour mutuel pourra changer le monde…
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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L'auteur adresse une longue lettre à son amie Shuni. Elle lui explique des aspects importants de sa culture et dévoile des éléments de sa vie personnelle. Naomi Fontaine fait confiance au lecteur, car j'ai parfois eu l'impression de jeter un regard indiscret sur sa vie privée. Shuni fut pour moi une lecture très instructive et j'ai grandement apprécié l'humanisme de cette écrivaine.
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