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Au cours des années 1960, la France s'est dotée d'une doctrine concernant l'exportation de matériels militaires fabriqués par son industrie. En totale contradiction avec ses engagements internationaux et alors qu'elle se targue d'être la patrie des droits de l'homme, elle arme, dans une impénétrable opacité, les régimes parmi « les plus brutaux et les plus répressifs de la planète », lesquels s'en servent contre des populations civiles. Aymeric Elluin et Sébastien Fontenelle ont mené l'enquête.
(...)
Organisé en chapitre bref, cet essai ne noie pas ses lecteurs sous des torrents de chiffres (tableaux et graphiques sont regroupés en annexe pour ceux qui souhaitent plus de précisions), mais s'attache à démontrer la continuité de la doctrine française pour justifier le commerce de matériels militaires avec des régimes qui s'en servent contre des civils. le cynisme comme raison d'État ! Ce réquisitoire est accablant. Aymeric Elluin et Sébastien Fontenelle contribuent à nous restituer notre à droit à savoir ce que l'État fait en notre nom.

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(Lu dans le cadre d'une opération Masse critique, mille mercis à l'éditeur et à Babelio pour cette lecture)

Paru à l'été 2021, je ne découvre ce livre qu'en mars 2022, mais le sujet colle bien à l'actualité, avec la guerre en Ukraine. Ce court essai s'intéresse en effet aux exportations d'armes françaises et au secret qui les entoure, et notamment les armes destinées à des pays qui en font un usage de répression interne ou de massacre de populations (Egypte et Arabie Saoudite en tête, mais aussi Russie).

Avant de parler du fond, un mot sur la taille du bouquin. Quand je dis qu'il est court, disons qu'on a déjà vu des rapports plus épais : moins de 200 pages format poche, écrites en très gros, et en réalité guère plus de 130 pages une fois retirées les pages blanches entre les chapitres. Et des chapitres, il y en a : 32 composés de 2 à 8 pages. Tout ce bilan statistique pour dire que j'ai eu l'impression, au début de ma lecture, que les auteurs essayaient de gonfler le nombre de pages mais n'avaient pas grand-chose à dire. Après lecture, et même si je ne suis pas convaincu par ce surdécoupage en mini-chapitres, je pense qu'il n'en est rien et que les auteurs ont simplement le mérite d'être le plus synthétiques possible, sans noircir des pages inutilement. Surtout, on comprend à la lecture que l'opacité des ventes d‘armes en France ne permet pas d'entrer dans les détails. Alors oui, personnellement j'aurais aimé un essai plus approfondi sur les ventes d'armes en général, et pas seulement françaises et/ou destinées à une sélection de pays, mais les auteurs - journaliste et membre d'Amnesty International - remplissent parfaitement leur mission d'information et de dénonciation de pratiques cyniques via cet essai d'utilité publique.

Le livre retrace donc plusieurs décennies de ventes d'armes par la France, de façon assez chronologique, mais se concentre sur les années 2010, qu'on pourrait aussi qualifier d'années Jean-Yves le Drian. le ministre de la Défense puis des Affaires étrangères (qui a même droit à des repères biographiques en fin d'ouvrage, après d'autres annexes intéressantes) a en effet toujours oeuvré pour le bien de l'industrie française d'armement, en multipliant les ventes auprès de régimes pas forcément très fréquentables. Les auteurs écrivent en termes choisis, mais je résumerai l'analyse de façon plus directe en disant que cet homme-là a du sang sur les mains. Il devrait en tout cas s'interroger sur sa responsabilité dans la mort de dizaines de milliers de civils au Yémen, bombardés par des armes françaises selon des rapports internationaux. Il n'est pas le seul bien sûr, ses premiers ministres, présidents et autres décideurs politiques sont responsables (et seront peut-être redevables un jour) de ces livraisons d'armes contraires aux traités signés par la France, sous le prétexte de la sauvegarde d'emplois en France. Les sociétés produisant ces armes sont moins citées dans cet ouvrage que les décideurs politiques, mais elles sont évidemment les premières responsables, avec en prime leur mainmise sur une partie de la presse (comme Le Figaro et Valeurs actuelles) qui célèbre ainsi les contrats juteux en passant sous silence l'usage qui est fait de ces armes.

Alors on pourra rétorquer que les armes sont faites pour tuer et que leur destination importe peu. Ce serait un peu facile. le but de ce livre n'est pas de remettre en cause les exportations d'armes dans leur ensemble mais de dénoncer des ventes d'armes utilisées par des régimes autoritaires contre des populations civiles, des ventes en principe interdites mais qui pourtant se poursuivent. le tout dans la plus parfaite opacité, puisque tout est soumis au secret défense, puisque les autorisations de ventes sont accordées par les gouvernements successifs sans aucun contrôle indépendant, puisque les questions et rapports parlementaires et demandes d'ONG restent sans réponse et puisque la justice est impuissante sur ces sujets.

Un livre accablant donc, qui aurait mérité d'être complété sur certains aspects (par exemple sur les réactions de nos partenaires européens) mais qui, malgré son format court, s'avère d'une grande richesse et très bien documenté. Il restera malheureusement sans conséquence sur ces pratiques, on peut le craindre.
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192 pages édifiantes ! La doctrine de la France (patrie des droits de l'homme comme on aime le rappeler) est de vendre des armes à n'importe quel pays pour "protéger" des emplois, un secteur économique plutôt que de défendre les droits de l'homme quelque soit les gouvernements qui se sont succédés depuis les années 60.
Nous découvrons que nos meilleurs acheteurs sont des pays très démocratiques ( Egypte, Emirats Arabe Unis...) et que l'opacité est un grand principe dans ce secteur.
Je recommande ce livre qui est à la portée de tous !
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Lecture édifiante qui illustre pour le pire ce qu'est la "real politique", à savoir le droit supérieur que s'accordent les dirigeants pour faire en douce ce qui ne peut être dit sous prétexte de l'intérêt commun. La honte qui est évoquée en titre est étouffante tant l'action de nos dirigeants est à l'opposé des valeurs que prône la France, et tant les traités (TCA) et organismes de contrôle (CIEEMG) sont bafoués sous la protection du principe de "secret-défense".
Les chapitres s'enchainent chronologiquement dans ce livre, pour partir des années 50 et remonter au grès de contrats et de crises historiques jusqu'à nos jours actuels. Outre les intérêts privés extraordinairement protégés par l'état, outre les promesses non tenues quant à la transparence de cette activité, ce qui est le plus insupportable c'est la certitude que nous avons que ces armes servent bien à opprimer et tuer des populations civiles. Égypte, Russie, Arabie Saoudite pour ne citer que les plus marquants, voilà une liste qui suffit à comprendre tout ce qu'il y a d'abjecte derrière ce commerce !
Et l'actualité entre la Russie et l'Ukraine apporte encore une belle illustration de la capacité de girouette des VRP qui nous représentent sans la moindre honte.

En bref une lecture rapide mais suffisamment étoffée pour nous mettre dans la position des complices qui, s'ils n'appuient pas sur la détente, ne peuvent pas dire pour autant "qu'ils ne savaient pas" ou "ne se doutaient de rien".

Merci à Babelio et à l'Éditeur le Passager Clandestin pour cet envoi dans le cadre d'une opération masse critique.
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Tous mes remerciements pour cet ouvrage à Babelio dans le cadre de sa masse critique non fiction et aux éditions « le passager clandestin » et plus particulièrement à Josepha pour son petit mot. Parmi les 10 livres choisis dans les 400 proposés, je ne pensais pas alors que ce livre allait, malheureusement, « collé » à l'actualité tragique de ces derniers jours ! Son titre ne laisse aucune équivoque possible « ventes d'armes, une honte française »…. Que l'on soit le 3eme fournisseur d'armes dans le monde, pourquoi pas ! une arme peut être dissuasive, le problème réside dans le fait que, faisant fi des divers accords et traités de commercialisation sur les armes, portant notamment sur l'interdiction de vendre à des pays qui massacrent des populations (les massacres perpétués au Yemen en sont l'exemple flagrant), nos gouvernements successifs équipent en matériel létal des oppresseurs sanguinaires avérés, faisant preuve d'une hypocrisie flagrante. Quelqu'un de plus jeune aura peut-être un peu de mal à « s'y retrouver », mais, par exemple « l'affaire des fameuses vedettes vendues par la France» fait partie d'une actualité que j'ai vécue !
Quand page 72 je lis (on est en 2013) Fabius déclare que si Poutine continue ce qu'il fait en Ukraine, le gouvernement français pourrait annuler la vente des porte-hélicoptères ! [..] la situation est grave. Les actions menées par la Russie (annexion de la Crimée) contreviennent aux fondements de la sécurité en Europe…(finalement la France annulera la vente des porte-hélicoptères), il faut reconnaître que 9 ans après, le drame de l'Ukraine est à nouveau d'actualité !
Les pages annexes offrent une synthèse très lisible mais néanmoins détaillée des faits et de leur chronologie, répertoriant également les principaux fabricants et fournisseurs d'armes français.
L'objet livre est agréable et la présentation soignée ; c'est le premier ouvrage que je lis intégrant la fameuse « écriture inclusive » et, au risque de passer pour une vieille grognon, j'ai beaucoup de mal à m'y habituer !
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Parce que la rentrée des livres n'est pas que celle de la littérature, parce que la vie n'est, heur ou malheur ?, pas que roman, un essai à signaler, qui a le mérite de sortir de l'ombre une pratique durable de la politique française depuis plus de soixante ans, une véritable indécence nationale, la vente d'armes aux pays en guerre ou en guerre civile, en particulier aux pires tyrannies. Dès les années soixante, la France offrait ainsi des armes au régime sud-africain de l'Apartheid et à l'Espagne franquiste, quand d'autres nations, obéissant parfois à des injonctions de l'ONU, refusaient ce commerce indigne. Si (puisque l'on commémore aussi ces derniers jours, «l'autre 11 septembre», celui du coup d'Etat de Pinochet) la France n'exporte plus, comme dans les années soixante-dix, en aidant le Plan Condor, son savoir en matière de torture dans les pays d'Amérique latine, elle continue à proposer armes et services d'instruction sur de multiples terrains de conflits, à commencer par le Yémen, l'Arabie Saoudite, l'Egypte confrontée à son opposition intérieure. Sans aucune vergogne, l'Etat, appuyé, bien sûr, par les puissants industriels du secteur, persiste ainsi à préférer préserver la santé d'une économie de mains sales, nourrissant aussi trafics et corruption, plutôt que la vie des multiples victimes de nos fusils et canons, Mirages et hélicoptères… Aymeric Elluin et Sébastien Fontenelle, dans ce texte coédité par le Passager clandestin et Amnesty International, construise une charge puissante, étayée d'une analyse historique précise et de nombreux témoignages, contre l'actualité de cette « honte française », un appel à faire cesser définitivement ce commerce du sang versé et cet appui, trop discret, aux pires tyrans. Nous ne pourrons plus dire que nous ne savions pas !
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