Les enfants apprennent à faire semblant comme les adultes.
"Dans ce monde, il y a deux sortes de gens, a dit Mildred. Oui, enfin, il y en a de toutes sortes. Mais au moins deux : ceux qui comprennent qu'on ne sait jamais; et puis ceux qui pensent qu'on sait toujours. Moi, j'appartiens au premier groupe, c'est plus sur."
On peut entretenir ces idées, ces opinions, sans en avoir fait la moindre expérience.
Ce qu'on fait, ce qu'on n'a pas fait, ce qu'on a rêvé de faire, un beau jour tout se rejoint.
Avec les années, j'ai tendance à croire que tout situation humaine se retourne comme un gant. Tout ce que tel ou tel m'assure être vrai peut ne pas l'être. Tout article de foi est susceptible de voler en éclats dans ce monde. Il est rare que les choses demeurent très longtemps en l'état. Le comprendre ne m'a pas rendu cynique pour autant. Est cynique celui qui ne croit pas le bien possible. Alors que moi, j'ai la certitude qu'il l'est. Simplement, je ne tiens rien pour acquis et j'essaie d'être toujours paré au changement qui s'annonce.
Il avait besoin que je fasse pour lui ce que les fils font pour les pères : leur porter témoignage qu’ils ont de la substance, qu’ils ne sont pas seulement une absence qui sonne creux. Qu’ils comptent pour quelque chose quand bien peu de choses comptent.
(Boréal, p. 363)
La solitude, ai-je lu quelque part, c'est comme se trouver dans une longue file d'attente, dans le but de parvenir à la première place, celle où l'on vous a dit qu'il arriverait quelque chose de bien. Sauf que cette file n'avance pas et que de nouveaux venus ne cessent de vous passer devant, de sorte que la première place s'éloigne de plus en plus, au point qu'on cesse de croire qu'elle ait quelque chose à offrir.
Il se peut qu'être un enfant de la ville (en ville c'est le temps qui passe qui compte le plus) transplanté du jour au lendemain dans un lieu désert inconnu, parmi des gens dont je ne savais pas grand-chose, m'ait assujetti davantage aux forces naturelles qui se faisaient l'écho de mon vécu intime et me le rendaient plus tolérable. Par rapport à ces forces - Terre qui tourne, Soleil qui traverse le ciel plus bas dans sa course, vents gonflés de pluie, arrivée des oies -, le temps du calendrier, invention humaine, passe à l'arrière-plan, et c'est bien ainsi.
- Les ennuis, on n'a pas besoin de les chercher, a dit Brenner. Tu as beau te cacher, ils te trouvent.
La vie est une forme qu'on nous tend vide. A nous de la remplir de bonheur. (p.336)