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3,61

sur 97 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
C'est un livre court, original et pudique que je viens de lire. La plupart de l'intrigue se situe après le viol. L'autrice joue avec les attentes du lecteur. Toutes ces digressions, ces tournages autour du pot nous renvoient notre voyeurisme en pleine gueule. C'est original parce que broder et se laisser happer par tout et n'importe quoi reproduit merveilleusement bien le cours enragé de la pensée. On comprend comment l'attention ne peut que se porter sur tout et n'importe quoi pour éviter le réel dans ce type de moment ; et c'est aussi terriblement prosaïque. On voit les réactions plus ou moins appropriées des policiers, les questionnements et remises en question même quand toutes les preuves sont là, même quand elle porte encore les stigmates de ce qu'elle a subi. On met en doute sa parole parce qu'elle est lesbienne et a invité un homme chez elle. On met en doute sa parole parce qu'elle est humaine et que tout n'est pas forcément explicable. On met en doute sa parole alors qu'elle pisse littéralement le sang, on met en doute sa parole alors qu'elle a des marques de strangulation, on met en doute sa parole alors qu'elle a fait tout ce qu'on dit de faire dans ces cas-là. On met en doute sa parole et on se demande ensuite pourquoi seulement quinze pour cent des femmes portent plainte. Un roman à lire.
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Un roman atypique qui, sous couvert d'enquête policière, nous plonge dans un monde dans lequel il ne fait pas bon être traumatisé, ne plus savoir où l'on en est, quand on est victime d'horreurs indicibles et que l'on a besoin d'être protégé.
Un texte plus fort qu'un discours, plus perturbant, car la forme kaléidoscopique épouse parfaitement le fond. L'âme déchirée de notre protagoniste se retrouve dans les anaphores, dans les répétitions, dans les façons d'oblitérer ce qui s'est passé, pour survivre, dans les façons de focaliser son attention sur l'insignifiant...
Un texte puissant sur la honte de la victime, les dysfonctionnements d'une société, de sa justice, à commencer par :
"Le Major, donc, modifie toujours un peu la phrase, suivant un objectif de clarté soi-disant entendu entre nous. Il reformule. Ce qui entraîne la première modification de ma parole. D'autres suivront."
Il faut réussir à dire. Puis il faut être entendu...

#demonpleingré #NetGalleyFrance
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Il faut du courage pour porter plainte. Il en faut même lorsque l'on doit se soumettre au regard d'un enquêteur, d'un avocat ou d'un psychiatre. Après une nuit terrifiante, Elle raconte au Major tout ce qu'il s'est passé, et ce que l'individu a fait. Mais comment peut-on se sentir totalement victime quand les interrogations nous poussent à croire le contraire ? Il faut désormais expliquer l'inexplicable, ce qui ne se justifie jamais, se défendre alors que corps et l'esprit ne savent plus le faire.

Inspiré de la propre histoire de l'auteure, j'ai été ébranlée par la profondeur et la dureté de ce qui y est narré. Pourtant, les deux se mêlent parfaitement pour dépeindre un tableau généreux de notre société actuelle où tout reste encore à construire. En 2021, il faut encore justifier par « a + b » une agression sexuelle et sa propre intimité, chercher un potentiel caractère déviant à la victime et parfois accepter que certains faits ne seront pas gardés comme preuve irréfutable du mal. Tout cela conduit bien souvent aux doutes, sommes-nous réellement une victime ? L'avons-nous cherché ?

Ainsi, Mathilde Forget plonge le lecteur au coeur de l'enquête qui lie sa narratrice (ou elle ?) à son agresseur. Tout y passe, traumatismes de l'enfance, difficulté à assumer ses propres attirances dans une société hétéronormée, et l'indocilité du corps face à l'oubli. S'il est difficile de dire « j'ai aimé ce roman » comme on dirait que l'on apprécie un récit d'aventure ou une histoire d'amour, j'en envie de dire que je l'ai compris.

J'ai compris ce choix de raconter les faits, la poétique des maux au travers le drame, et l'ultime appel à nous dire qu'il reste failles personnelles pour toujours après un viol.

En vérité, de mon plein gré narre l'histoire vraie de trop de femmes et l'écriture de Mathilde Forget dénonce plus qu'elle ne sublime la brisure. Comme un plaidoyer en faveur du corps et de l'esprit, je sors extrêmement touchée et profondément révoltée (comme si je ne l'étais pas assez !) de cette lecture. Cela nous rappelle bien une chose : la littérature ne permet pas seulement de nous laisser rêver d'un ailleurs, elle nous ramène également à l'indéniable réalité.
Lien : https://troublebibliomane.fr..
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Un récit cinglant comme une gifle. Court comme les faits - même s'ils paraissent forcément toujours trop longs pour qui les vit -.
Une instantanéité qui se lit dans un seul souffle. Une claque pudique pour dire la difficulté à porter plainte, la honte à surmonter, la force à déployer pour prouver son innocence avant même d'expliquer, faire comprendre et réaliser soi-même qu'on est victime. Surtout quand - comme Mathilde -, on a fait entrer l'inconnu chez soi. L'abandon des amis, leur jugement, la solitude comme un précipice et l'envie tenaillante de tomber. La lutte contre ce que les autres prennent comme une nouvelle indifférence à tout, à “la tête dans la lune”. Ce néant qui prend peu à peu toute la place en soi et les autres.
Puis l'énergie épuisante pour se relever sans jamais oublier. Juste laisser un peu de côté pour avancer. Apprendre à vivre avec un sixième sens.
Des mots taillés dans le vif, glaçants, cisaillants. Un face à face avec le Major de la police pour dénoncer puis avec un avocat pour préparer sa défense. Mathilde Forget a choisi de faire pénétrer le lecteur au coeur des heures qui suivent l'agression pour mieux lui faire appréhender le choc post-traumatique. Celui qui nous rend robot, cerveau anéanti, focalisé sur des détails sans importance pour l'enquête. Une manière de se détacher de l'horreur traversée. Ici la victime est obsédée par ses ongles sales et son jean réquisitionné comme pièce à conviction. Ce qui semble dérisoire pour la police devient obsessionnel pour elle. Une défense naturelle fréquente.
Un livre très pudique et nécessaire pour mieux comprendre et communiquer avec les personnes victimes de viol. Leur sensibilité, leur mode de fonctionnement, de perception des autres étant biaisés à jamais ; il est indispensable d'appréhender leur langage et leur vision du monde pour réussir à entrer en contact avec elles.


Lien : https://laparenthesedeceline..
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Avant tout, je souhaite préciser que le sujet abordé est particulièrement grave et fort et que la lecture de ce livre ne laisse pas indemne.
Difficile d'en parler sans trop en dévoiler, mais la force de ce roman est cette écriture particulière et talentueuse de Mathilde Forget, dans un format court (140 pages) qui permet de ne pas rester complètement en apnée face à ce sujet difficile.
Une femme raconte son histoire. Un dimanche matin du mois d'octobre, elle se rend seule au commissariat, de son plein gré, après avoir subi une agression. Elle est choquée, se sent sale, transpire beaucoup. Elle a honte et se sent coupable. Elle doit désormais « tout reprendre depuis le début », face à un Major qui l'interroge pour comprendre. Les mots sont en effet importants pour décrire les maux, et malgré l'épreuve qu'elle vient de subir elle doit faire face au doute, au relevé d'indices, aux interrogatoires, afin de reconstituer les événements de la nuit et dévoiler ainsi la vérité.
C'est un livre qui se lit d'une traite, et qui se relit pour mieux comprendre. C'est un récit difficile sur la douleur de porter plainte et la triste réalité de ce traumatisme. La narratrice perd ses repères, ses amis lui tournent le dos, elle se sent seule. L'auteure décrit avec beaucoup de réalisme l'état psychologique dans lequel la narratrice se trouve. le doute s'installe et fait mal, les proches sont interrogés, les crises de panique restent, l'analyse psychologique est fouillée. L'auteure laisse planer des soupçons et la culpabilité est même questionnée, notamment lorsque la narratrice est confrontée à son agresseur pendant l'enquête.
C'est le premier roman que je lis de Mathilde Forget, et ce ne sera sans doute pas le dernier.
Je remercie les éditions Grasset et NetGalley pour cette lecture poignante, révoltante, mais criante de vérité.
Lien : https://voyagesdek.travel.blog
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Un court roman pour parler de ce qui se passe après un viol. de ce qui se passe quand on décide de porter plainte. Quand on a ce courage là. Tout le récit se fait depuis la tête de la victime. La destruction, la violence des suspicions, des remarques, des questions qui se veulent anodines mais qui font de la victime la coupable. Comment le système en place protège l'agresseur, le violeur, le monstre, plutôt que sa victime. Comment on retourne vos choix et vos actes contre vous alors même que celle qui est morte dans l'histoire, c'est vous. C'est poignant, c'est violent, c'est rageant. C'est à remettre dans toutes les mains. C'est à faire lire à tous ceux qui remettent en cause la parole des victimes, créer un peu d'empathie pour elles, pour changer un peu.
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Un roman que j'ai lu, lu et relu, tant il m'a marquée, aussi bien par le fond que par la forme.

J'ai notamment été touchée par la narration toute en entrelacs : les pensées qui s'enchevêtrent, les digressions d'un esprit humain et la perte de repères lorsqu'on est victime de violences sexuelles et que l'on ne sait plus très bien qui l'on est quand quelqu'un s'est emparé d'un fragment de nous...
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Point de départ : la narratrice vient se livrer à la police.
Pour quel crime, nous ne le savons pas encore.
Petit à petit, nous apprendrons que la narratrice n'est peut-être pas seulement coupable mais aussi et surtout victime.

Difficile de parler de ce court roman sans trop en dire. Tout l'intérêt réside dans cette vérité que nous découvrons au fur et à mesure, jusqu'à cette fin percutante.
Mais attention, ne vous attendez pas à un twist retentissant, parfois quelques phrases sont infiniment plus marquantes qu'un coup d'éclat.

Une lecture que je recommande chaudement !
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Voilà un livre qui ne laissera personne insensible. Un tout petit livre qui se lit d'une traite, que l'on vit intensément ou que l'on pose très vite, déconcerté.
Moi j'y pense encore… Pas facile d'être dans la tête d'une femme qui se présente d'elle-même au poste de police. On ne comprend pas très bien… est-elle victime ou coupable ? Les deux ? Elle-même ne semble pas le savoir. Elle est confuse, perdue… Mathilde Forget semble avoir connu ce moment. Elle raconte les doutes, la confusion, l'ambiguïté de la situation, les regards et les mots des autres : les policiers, psy, avocat, amis… Que s'est il passé exactement avec cet homme ?
Répétitions, digressions, rapport au corps, au passé, l'auteur utilise des procédés habiles pour entretenir le trouble, mettre le lecteur en situation et je dois dire que j'ai été happé dans ce tourbillon. L'homme que je suis en ressort chamboulé.
Une lecture hautement conseillée !
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Je vais devoir parler de ce livre à ma psy, maintenant…

C'était terriblement bien écrit. Dur de sourire aux apartés mignons ou drôles quand ce qu'a vécu la protagoniste est si horrible.

Une prose géniale, un esprit si lucide, une réfléxivité épatante à toute épreuve (littéralement). Je me sentais presque coupable d'apprécier la poésie de ces vers si sanglants. Je comprenais tant les émotions décrites, les sensations évoquées, les odeurs, les douleurs…

Finalement assez peu de mots capables de quantifier la force de ce récit (peut-être en partie autobiographique ?) mais imparablement un must-read.
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