Elle avait été contactée par de nombreux hommes, mais la plupart ne cherchaient que des histoires d’un soir ou un dialogue hot, ce à quoi elle se refusait. D’autres se présentaient aimablement, mais au troisième ou quatrième échange, le ton changeait et devenait carrément graveleux. Mais depuis quelque temps, elle correspondait régulièrement avec un homme de cinquante ans qui était exactement le genre qu’elle cherchait : poli, bienveillant, drôle, intelligent.
Elle avait choisi un pseudonyme, « Rêveuse » et rédigé son profil : « Cherche homme quarante-cinq cinquante-trois ans, non-fumeur, pour relation sérieuse ». Rien d’original, mais ça avait le mérite d’être clair et cela avait pour but d’écarter les pervers et les types un peu trop aventuriers, du moins… le pensait-elle.
La lumière émanant de l'écran de l'ordinateur éclairait Danièle, lui faisant un visage blafard. Ses doigts couraient fébrilement sur le clavier. L'oeil fixe, un sourire nerveux figé sur les lèvres, elle répondait à son correspondant du moment.
Divorcée depuis cinq ans, élevant seule, dans un petit F3 rue de la Glacière, un fils de dix-huit ans qui poursuivait ses études, actuellement en vacances chez son père à Toulouse, Danièle avait la cinquantaine gracieuse. Petite, bien faite, brune frisée avec de grands yeux bleu vert et une bouche pulpeuse, elle était ce que l'on peut appeler une belle femme.
Cela faisait maintenant un mois qu'elle chattait tous les soirs, où plutôt toutes les nuits sur le web. C'étaient ses collègues de travail féminines qui lui en avaient parlé, surtout Odette. Ah, Odette ! Cinquante ans comme elle, divorcée également mais complètement libérée, à l'inverse de Danièle qui se trouvait introvertie et timide.
- Tu verras, c'est chouette, le chat, y'a plein de mecs de tous les âges. Tu discutes, tu rencontres éventuellement, et puis, si ça le fait, tu peux aller plus loin. Moi, en ce moment, je sors avec un type de trente ans rencontré sur un site. Un sacré coup.
… ils quittèrent le 36, désert. Les escaliers craquaient sous leurs pas, réveillant les fantômes qui hantaient l’endroit. Boris aimait bien l’ambiance de ce lieu quand il n’y avait personne. Il avait l’impression que les murs lui chuchotaient les histoires des grands criminels. Mais ce qu’il aimait par-dessus tout, c’était l’escalier de bois, craquant, rendu célèbre par des séries policières cultes. Ah ! S’il pouvait parler…
On se connaît suffisamment pour que je vous parle franchement. La politique est partout. Tout est bon pour que les présidentiables fassent leur show. L’opinion publique, c’est tout ce qui les intéresse, hein ! Si l’on ne va pas dans ce sens-là, on brandit au-dessus de votre tête le spectre de la retraite anticipée, de la carrière avortée, bloquée, voire, de la révocation. C’est la nouvelle version de la carotte et du bâton ! Quand on a commencé tous les deux, ça marchait à coups de lettres de félicitations et de gratifications. On était contents d’avoir résolu une affaire, on avait le sentiment du devoir accompli ! Maintenant c’est : attention à ne pas faire de l’ombre ou du tort à un tel ou un tel ! Allez, je n’ai rien dit, mais vous m’avez compris.