Il aimait les chiffres. Il savait compter mais pas conter fleurette.
Si c'était un meuble, quel meuble aurait-il été?
Peut-être un secrétaire Empire en acajou foncé
Avec plein de secrets, fermé à clé, défense d'entrer.
Nous nous aimions bien
Il admirait mon culot, lui qui n'en n'avait pas
J'admirais sa vivacité d'esprit et son sang-froid.
Au journaliste de la Voix du Nord venu à la maison pour t'interviewer, tu n'as rien dit
Moi je n'avais pas eu mon bac mais j'avais plein de choses à dire au journaliste. Il ne m'a rien demandé.
Chaque mois, Maman nous donnait de l'argent de poche. On avait cent francs et une plaque de chocolat. Yves-Marie mangeait son chocolat tout de suite, moi j'attendais la fin du mois et je me faisais une mousse au chocolat, je la mangeais dans la casserole devant Yves-Marie. Un jour, il m'a poursuivi, j'ai dû finir ma mousse au chocolat dans la rue.
Quand Madame Tierny en a eu fini avec le petit Jésus, elle s'est enfin rendu compte de ma présence, elle m'a regardé longuement, elle a simplement dit: "Avec lui, ça va être plus difficile." C'est vrai que j'avais pas une tête de Jésus.
Elle m'a tripoté les cheveux, elle a essayé d'aplatir mon épi rebelle, elle a dit à maman: "Faudrait lui frisotter tout ça. On va essayer d'en faire un ange..."
Yves-Marie riait aux anges.
Un jour, mon petit frère et moi, on a été au paradis.
C'était l'été dans le jardin de Tante Vélastine. Un jardin de campagne, pas très grand, avec des fleurs, des légumes, des fruits qui poussaient ensemble.
Les fruits nous ont fait penser au paradis. Des prunes, des groseilles, des abricots brillants et colorés, à portée de la main comme des cadeaux, on ne savait par quoi commencer.
Il était généreux, avare seulement en démonstration de tendresse.
Les moments où j'ai ressenti le plus de complicité avec lui, c'était quand nous échangions un regard. Nous communiquions par le silence
Tu es mort cinq jours devant Raymond Poulidor, l'éternel second qui n'aura jamais été le premier.