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Critique de juanilin


Un adulte retourne à la ferme de son enfance, où il a vécu une expérience des plus étranges lorsqu'il avait sept ans. Un roman plus intime, peut-être plus nostalgique que ses prédécesseurs, mais flirtant toujours avec le Fantastique et dans lequel on se noie avec délice.

Un homme revient dans le village de son enfance. La maison familiale n'est plus, depuis des années déjà. Mais il a des souvenirs, de cette maison. de la ferme des Hempstock, les voisines. de Lettie. Lettie, qui soutenait mordicus que la mare aux canards au bout du chemin était un océan.

Cet homme est venu et se souvient, nous raconte son souvenir. C'était l'année de ses sept ans. Ses parents s'étaient fait voler la Mini blanche qui convoyait la famille entière. La Mini fut retrouvée, quelques heures plus tard, pas très loin de la ferme des Hempstock. Avec un cadavre à l'intérieur. Un suicide par asphyxie, semblait-il.

Il se souvient surtout de Lettie. Lettie Hempstock avait onze ans, à l'époque, et déjà elle lui semblait grande pour son âge. Elle l'a emmené vers la ferme pendant que les adultes s'occupaient de la voiture. La mère de Lettie était là aussi, et sa grand-mère. Il se souvient d'avoir bu du lait de vache, tout juste sorti des pis de l'animal. Ça, c'était un souvenir inoubliable. Lettie aussi était inoubliable. Elle avait quelque chose d'étrange. La plus étrange était qu'elle soutenait que la mare aux canards au bout du chemin était un océan. N'importe quoi. Il avait demandé à son père : tout est une question de taille. Une mare aux canards ne peut pas être un océan.

Cependant, nous sommes en train de lire un roman de Neil Gaiman. Et avec Neil Gaiman tout peut arriver ; une simple mare aux canards peut très bien devenir un océan entier. A condition de le vouloir, et d'y croire. A moins que cette simple mare ne soit réellement un océan.

« J'adore mon océan », a dit Lettie et j'ai compris que notre moment au bord de la mare était terminé. (…) « Ta mare. C'est pas un océan. C'est pas possible. Un océan, c'est plus grand qu'une mer. Ta mare, c'est juste une mare.
– Elle est aussi grande qu'elle en a besoin », a rétorqué Lettie, piquée au vif. »

C'est ainsi que se déroule le roman. En filigrane, l'adulte sur son banc, au bord de la mare en question – qui n'est somme toute qu'une simple mare – revivant l'année de ses sept ans, ces évènements étranges depuis le suicide de ce presque inconnu dans la voiture de ses parents. Ces souvenirs ne sont pas les nôtres, et pourtant nous nous laissons entraîner sans réserve dans les siens : Neil Gaiman a ce don de nous entraîner dans des lieux tellement familiers, et pourtant si étranges.

Comme dit en exergue, ce roman détonne dans la lignée de ses précédents (je pense notamment à Neverwhere, un autre chef-d'oeuvre, à Anansi Boys ou même à American Gods) et apparaît comme une oeuvre beaucoup plus intime, dans laquelle l'onirisme et la nostalgie sont résolument prégnants. Mais le Fantastique n'est jamais loin, peut-être finalement parce qu'il a toujours été présent, parce qu'il appartient à notre monde.

Installez-vous confortablement, laissez-vous happer par cette magie ancienne, et sentez la chair de poule courir sur vos bras. Vous êtes en train de lire Neil Gaiman. Plus rien de grave ne peut vous arriver.
Lien : http://histoiresdecanard.com..
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