[...] La mort violente était le lot quotidien de la Brigade spéciale d’investigation, un service qui dépendait de la Police militaire royale mais dont les enquêteurs exerçaient en civil. Face à l’horreur, ses collègues et lui s’étaient toujours réfugiés dans l’humour. C’était le seul moyen de supporter la vue des corps déchiquetés. Les morts bien lavés, maquillés, allongés dans des boîtes tendues de satin étaient un luxe inconnu à la BSI.
Refuser de savoir revenait à se rendre complice.
Ceux qui n’y avaient jamais vécu ne pouvaient concevoir que Londres était en quelque sorte un pays à part entière. Les gens lui reprochaient de monopoliser la richesse, le pouvoir, mais ce qu’ils ne comprenaient pas, c’était que dans cette ville où tout était plus cher qu’ailleurs, où les implacables différences entre riches et pauvres se voyaient comme le nez au milieu de la figure, la misère avait son propre style. Entre le splendide appartement néoclassique d’Elin à Clarence Terrace et le squat pouilleux de Whitechapel où sa mère était morte, la distance ne se mesurait pas seulement en kilomètres. Ces lieux étaient séparés par un océan de disparités, par les hasards de la naissance, de la fortune, les erreurs de jugement et les coups de bol. Sa mère et Elin étaient à la base deux femmes magnifiques, intelligentes, mais l’une avait fini aspirée par les sables mouvants de la drogue et de la déchéance tandis que l’autre trônait au-dessus de Regent’s Park, derrière ses vitres impeccables.
A partir du lendemain, il n'aurait plus les coudées franches . Ça serait à la maison et quand Ça était là , il devait lui prêter attention . Pour lui, il était primordial que Ça soit heureuse , notamment parce que Ça ramenait de l'argent à la maison . Ça était tellement bête et moche et avait tellement besoin d'affection qu'elle avait à peine remarqué qu'il vivait à ses crochets .
Les femmes étaient des êtres mesquins , méchants, sales et petits . Toujours à faire la gueule , ces salopes , toujours à attendre des hommes qui les rendent heureuses . C'était seulement quand elles gisaient mortes devant vous , vidées de leur substance, qu'elles accédaient à la pureté , au mystère, au merveilleux même. A cet instant , elles étaient entièrement vôtres, incapabes de discutailler , de se rebeller , de vous planter là, et vous pouviez faire tout ce qu'il vous plaisait . Celle d'hier était devenue lourde et molle , une fois saignée ; un jouet grandeur nature , rien qu'à lui .
" Il y a une différence entre la loi et ce qu'on estime juste . Je vais faire ce que j'estime juste .
Rien de tel que l'alcool pour vous remettre sur les rails , vous ouvrir les yeux . Ne dit-on pas "In vino veritas"?
Elle avait tiré de l'énergie du désarroi de son entourage. Et elle avait espéré que cette bravoure dopée à l'adrénaline lui permettrait de revenir sans trop d'encombres à la vie normale, de trouver l'équilibre nécessaire pour continuer à avancer d'un pas déterminé, sans craindre de replonger dans le marécage où elle avait si longtemps pataugé après son viol...
Robin savait que les bordels étaient illégaux. Mais il suffisait de quelques clics pour les trouver sur le Net .
Le détective avait lu quelque part que les publicitaires utilisaient les divers accents écossais dans leurs spots, car le public les associaient aux notions d'honnêteté et d'intégrité.