» Jeanne était d’une nature heureuse. Tout l’émerveillait. Même les choses les plus simples. Le lever du jour. Le coucher du soleil. La pluie sur les vitres. Une abeille sur une fleur. Le jardin. En automne, le brouillard l’estompait, elle n’en voyait plus le bout. L’hiver, c’est la neige qui le recouvrait. Quand les filles étaient bébés, Jeanne les lavait dans un bac en plastique. Les filles avaient grandi. Jeanne avait gardé le bac. Mis dans le jardin. Plein d’eau de pluie. Les oiseaux venaient boire dedans. Les écureuils aussi. Un renard passait certains soirs, un peu après 23 heures. Une fourrure rouge, comme du feu. Jeanne aimait l’apercevoir. »
J'ai l'impression qu'il y a deux Jeanne en moi, une qui a eu envie de cette vie calme et bien rangée, et l'autre qui voulait être différente. La première a été la plus forte. Mais j'ai besoin, de temps en temps, de sentir en moi la présence de l'autre.
- J’ai l’impression qu’il y a deux Jeanne en moi, une qui a eu envie de cette vie calme et bien rangée, et l’autre qui voulait être différente. La première a été la plus forte. Mais j’ai besoin, de temps en temps, de sentir en moi la présence de l’autre.
Jeanne avait repris sa vie, son travail à la poste et les clients. Elle s’habituait doucement à la vitre de séparation. Elle faisait comme Abramovic, les clients, elle ne les regardait pas arriver. Quand elle sentait qu’il y avait quelqu’un, elle relevait lentement les yeux. Souvent, les mains étaient posées, croisées. Avec les mains, elle essayait de deviner le visage.
Le visage, c’était la surprise.
Une vie ne suffit pas. Jeanne aurait voulu en avoir plusieurs, pour vivre tous les choix qu'elle n'aura pas faits, toutes les directions qu'elle n'aura pas prises.
Les autres vies permettent peut-être cela.
Comme les chats. Les chats ont sept vies, et au terme de la septième, ils emportent leur maitre avec eux.
Elle voulait confondre le passé et le présent. Superposer le temps. Voir où elle s'était trompée et comprendre ses erreurs.
Il est 23h32 quand il a écrit cela. Une heure palindrome. Elle lui parle de sa fascination pour ces nombres renversés. De toutes ces choses qui se vivent dans un sens et dans l'autre, peuvent se concevoir à la fois par leur fin et leur début.
Il répond que la fin des choses est toujours contenue dans leur début.
Cet autre que l'on choisit et qui devient un peu soi (p. 65)
De sa place,Jeanne observait ses parents,le père surtout, elle cherchait la pensée du frère sur son visage. Elle y était, forcement.
Le frère de Rémy dit qu'il ( Dieu) existe peut-être et qu'il nous a oubliés, qu'après la création il est passé à autre chose.