J'observai pendant quelques secondes le rouge écarlate qui s'échappait lentement de la plaie et me léchai les lèvres. Puis j'approchai le visage et cédai à l'envie dévorante que tout cela réveillait en moi. Je fus à deux doigts de l'extase en plaçant la bouche sur la peau fine, là où la veine pulsait régulièrement, facilitant ma tâche. Je me mis à aspirer, et aspirer encore, ma soif me semblant impossible à étancher, jusqu'à ce que Connor pose une main sur mon épaule.
- Doucement, me dit-il. Tu ne veux pas la tuer.
Je revins à la réalité et fis un grand pas en arrière pour m'éloigner de la femme. Cette dernière chancela légèrement mais resta debout. Bien sûr que non, je ne voulais pas la tuer. Mais, la vérité, c'était que si Connor ne m'avait pas arrêtée, j'aurais bu jusqu'à ce qu'il n'y ait plus une seule goutte en elle. Cette révélation me fit bien plus peur que ma première rencontre avec Victor. Boire à la veine était bon, bien trop bon.
— Le jour où tu me dicteras ma conduite n’est pas encore venu, fit-elle avec un sourire radieux qui laissa apparaître sa dentition sans défaut.
À part les deux crocs un peu trop longs sur lesquels mon nom semblait gravé.
Tu viens pour la libérer, et tu n'as pas de plan ? Tu t'es débrouillé pour pouvoir entrer en ayant conscience qu'il te serait peut-être impossible de ressortir ? J'ignore si je dois admirer ta bravoure ou avoir pitié de ta folie.
L'immortalité n'est pas un cadeau dont les humains sont dignes, répondit-elle d'un ton égal en observant tranquillement l’intérieur de la demeure. Beaucoup ne méritent même pas la vie.
Un soupçon de vérité aidait toujours à rendre les mensonges plus crédibles.
Le combat ne prend fin que lorsqu'un des camps perd espoir. Ce n'est que là qu'il cessera de se battre.
L'amour peut être une faiblesse comme une force.
Comme pour me relancer, elle pencha sa petite tête verte sur le côté.
— Laisse tomber. Mais fais attention à tes fesses. Ou ta fesse. Ce serait bête que je te tue accidentellement. Parce que, ça aussi, c'est mon truc.
Elle redressa son corps imposant et se retrouva à la hauteur de mon visage. Sa langue bifide siffla lorsqu'elle ouvrit légèrement la bouche, et je compris exactement ce qu'elle s'apprêtait à faire. Dans. Tes. Rêves.
— J'adore les ceintures et les bottes de cow-boys en peau de serpent. Réfléchis bien avant de faire quelque chose que tu regretterais.
Sa langue eu un dernier soubresaut, puis Rosita referma les mâchoires.
— Brave bête, la félicitai-je en lui tapotant affectueusement la tête.
De toutes mes forces. Elle siffla de mécontentement mais se tint correctement.
— Tu aurais dû m'avertir de ce que tu comptais faire.
[...]
— J'allais t'en parler, plaidai-je.
— M'avertir, comme dans "le faire avant", précisa-t-il.
— On n'a jamais eu l'occasion de terminer notre petite conversation, hier, susurra-t-elle en se penchant sur moi.
— Tu ne peux pas m'attaquer ici, dis-je [...].
J'en étais convaincue. [...] J'en étais même tellement persuadée que, lorsqu'elle abattit son talon sur mon ventre et me coupa la respiration, je fus surprise avant d'avoir mal.
— C'est ce que tu crois, rétorqua-t-elle sur le même ton que précédemment avant de m'attraper par le chignon pour me relever la tête. Tu veux jouer, petite poupée ? Montre-moi ce que tu as dans le ventre.
— Ton pied, sale conne.