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Citations sur Terrasses ou Notre long baiser si longtemps retardé (54)

« Toi, oui. L’autre, pas. » A une seconde près, un centimètre près. Avoir de la chance ou pas.
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Lorsque mes hommes arrivent - une dizaine - je leur raconte ce qu'il se passe à l'intérieur. Je dis "scène de guerre". Je dis "boucherie inimaginable". J'ajoute qu'il reste au moins deux tueurs. Que c'est dangereux d'entrer. Je leur dis que chacun peut décider en son âme et conscience. Ils choisissent tous de venir avec moi. Certains, rapidement, envoient un dernier message à leur femme. Et c'est beau parce que cela signifie qu'ils acceptent l'idée du sacrifice.
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Je m'approche du café et aperçois mes amis. Eux ne me voient pas encore. Tout est doux. Je les rejoins. Ils se lèvent de leur chaise. Nous nous embrassons. Nous sommes un peu gênés dans nos gestes car les tables sont serrées. Il y a encore, et cela je m'en souviens, ce moment où nous trinquons... Non. Ce moment où eux lèvent leur verre puis, constatant que je n'ai pas encore le mien, se ravisent, le baissent, et disent qu'il faut attendre, qu'on m'attend toujours, que c'est bien parce qu'on m'aime qu'on m'attend, ou ce genre de phrases, et c'est le moment où je me lève pour aller commander ma bière au bar, et ne pas les faire attendre davantage, le moment où je me lève parce que j'ai hâte de revenir, de boire avec eux et de les écouter, mais ce n'est pas ce qu'il se passe, je ne me lève pas, je tombe. Je ne comprends pas. Je tombe. Tout s'arrête. D'un coup. Je ne vois rien. Qui peut me dire ce qu'il arrive ? Pourquoi est-ce que je tombe et ne parviens pas à me relever ?
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Il faut s'asseoir. Trouver une table. Choisir une place. Décider de qui prend quelle chaise. Dos au bar ou à la rue ? Personne ne se doute que ce sera si important, que c'est une question de vie ou de mort. Certains d'entre nous renoncent, jugent la terrasse déjà trop bondée, n'aiment pas cela : être si proche de gens qu on ne connaît pas, dont on entend toute la conversation, qui vous rejettent la fumée de leur cigarette dans les cheveux et font trembler votre chaise à chaque fois qu'ils bougent. Certains vont plus loin, disparaissent à la recherche d'un peu de calme. Ils vivront. N'en reviendront pas d'avoir échappé à cette histoire. A peu de chose près. Si peu de chose près. Pour ceux qui restent, il faut choisir. Premier rang de terrasse ou deuxième ? Côte à côte ou face à face ? Nous choisissons. Sans nous douter que nous nous asseyons sur la trajectoire de balles qui vont bientôt être tirées.
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Si l'enfer existe, nous y sommes. La lenteur de leurs gestes lorsqu'ils approchent d'un corps. L'assurance de leur domination sur nous. Leur calme. Il ne reste rien face à cela - que notre peur.
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(...) les Parisiens sentent bien que c’est peut-être la dernière soirée douce avant l‘hiver et je n’arrive pas à démêler, en mon esprit, si c’est un détail plus cruel encore, comme un piège que le beau temps fait à la jeunesse ou, au contraire, un dernier cadeau de la vie.
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Nous serons tristes, longtemps, mais pas terrifiés. Pas terrassés. (p.131)
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Je suis au milieu d’un tas de morts dont les téléphones sonnent.
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A ce moment-là, le patron du restaurant se décompose. Il a le visage triste lorsqu’il dit : « On en reprend pour dix ans. » Il parle des regards en coin, des insultes parfois lorsqu’on entend son accent, de la méfiance dès qu’ils marchent à trois ou quatre dans la rue avec ses amis, des contrôles d’identité, de la suspicion. Et c’est comme si tout s’était refermé autour de lui. Rideau sur l’insouciance. Rideau sur l’intégration. On en reprend pour dix ans.
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Nous nous levons, sans imaginer qu'ils se lèvent eux aussi, dans d'autres lieux de la ville, ilsprennent un café eux aussi, en mangeant peut-être, comme nous, des tartines. Nous n'y pensons pas. Comment pourrions-nous imaginer ? Nous ne savons rien d'eux, ni de nous. À cette heure, nous sommes inconnus les uns des autres. Personne n'a de nom. Seul le malheur en donnera un à certains d'entre nous, bien plus tard, lorsqu'il faudra établir des listes.
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