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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
« Il regarda sa montre. C'était l'heure de sa pause café du matin. Il se dit qu'aujourd'hui il irait le boire au Richepanse, et ce fut dans cette direction qu'il partit sans se presser. Les gens qu'il rencontrait le saluaient avec cérémonie. Parfois s'il s'agissait de femmes qui lui plaisaient pour une raison ou une autre et dont il attendait le décès avec délectation, il portait la main à son Stetson et observait leurs yeux qui le fuyaient pour regarder ailleurs alors qu'elles pressaient le pas ».

Ce « il », c'est Fenton Breece, croque-mort d'une bourgade du Tennessee dans l'immédiat après-guerre. Or Fenton Breece aime un peu trop les morts, en particulier les mortes, et passe un peu trop de temps à s'amuser avec. Si tout le monde s'en doute, ce sont Kenneth et Corrie Tyler, deux orphelins au sortir de l'adolescence qui en découvrent la preuve. En voulant le faire chanter, ils poussent Breece à lancer à leurs trousses Granville Sutter, l'autre malade mental du patelin, un tueur psychopathe que rien ne semble pouvoir arrêter, et surtout pas la justice dans ce monde renfermé sur lui-même où tout se règle entre soi.
C'est donc une véritable chasse qui s'ouvre dans ce petit coin isolé du Tennessee, au coeur de la région tourmentée du Harrikin retournée à l'état sauvage depuis le passage d'un cyclone quelques décennies auparavant. Et c'est là que nous plonge William Gay, aux côtés d'un Kenneth qui s'enfonce dans cette forêt de conte médiéval où il croisera ermites, sorcières et fous de Dieu en tentant d'échapper à un Sutter, véritable incarnation du démon, monstre omnipotent qui le regarde s'égarer en attendant le moment propice pour fondre sur sa proie.

La réussite et peut-être, dans une certaine mesure, la limite de ce roman tient à la manière dont William Gay assume le fait de vouloir mener très clairement le lecteur aux frontières du conte fantastique. Tous les symboles sont là : un méchant particulièrement odieux mais faible (Fenton Breece) prêt à passer un pacte avec le Diable (Granville Sutter) pour se débarrasser de deux orphelins (presque) innocents, une forêt qui est autant un sanctuaire protecteur qu'un piège et qui se trouve littéralement hors du temps (il n'y a plus ici d'éléments matériels permettant de dater l'histoire et l'on peine à savoir combien de temps peut durer la fuite de Kenneth), des personnages secondaires destinées à subir les foudres du démon pour avoir aidé les fugitifs… Ce faisant, Gay crée une atmosphère paradoxalement pesante et légère. Car si la tension de la poursuite est bien présente, le lecteur sait toujours qu'il se situe dans un conte doublé d'un roman d'initiation et que, finalement, le héros ne peut que s'en sortir.
Si ce livre tire de son ambiance baroque et sombre une grande part de sa force, les personnages ne sont pas en reste, notamment, bien entendu, les méchants particulièrement bien campés dans une outrance là aussi assumée, et les habitants du Harrikin comme façonnés par le milieu dans lequel ils vivent. On regrettera toutefois que, en contrepoint, Kenneth paraisse si banal et transparent et que l'on peine tant à éprouver une véritable empathie à son égard.

En fin de compte, La mort au crépuscule, qui se situe quelque part entre Délivrance, La nuit du chasseur, le Petit Chaperon Rouge et Massacre à la tronçonneuse, se révèle être un livre prenant, propre à captiver le lecteur qui recherche à la fois une belle écriture, des frissons, mais aussi à être rassuré. Cela entendu, sachant que l'ordre ne peut qu'être rétabli et que, à ce titre, Gay ne joue pas dans la même cours qu'un Joe Lansdale qui propose avec Les marécages une thématique proche au traitement plus fin et à la morale plus ambigüe, on passe un moment bien agréable sans se poser plus de questions que ça. Finalement, lorsque c'est aussi bien fait que là, on n'en demande pas plus.

Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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Un roman que j'ai trouvé déjanté. Oui je sais ce n'est pas le mot qu'on en lit dans la plupart des critiques, mais c'est ce qu'il m'en reste.
Ils sont tous fous dans ce bouquin !

Déjà dès le premier chapitre, je me suis dit "j'ai jamais lu rien de similaire nulle part ailleurs". Une idée complètement tordue est venue à un auteur qui paraît, vu de l'extérieur, aussi fou que ses personnages.
Le style d'écriture (ou de la traduction mais je pense que ça ne fait que suivre le style de l'auteur) est original. Rien ne sépare les dialogues de la narration, ce qui oblige à lire avec une attention particulière, et donne un résultat qui appuie sur la "dinguerie" de l'ensemble. C'est un peu difficile de s'y faire au début.

Une fois qu'on est rôdé, c'est bon. Il faut s'y faire, parce que l'action démarre de suite, en fait.
C'est à la fois poétique et glauquissime, parce que les personnages sont vraiment tarés, pardonnez-moi le mot mais il n'y en a pas d'autre, il me semble. Que ce soit Breece, Sutter, ou même les Tyler, ou aussi pas mal des personnages secondaires, tous ont un grain.
On retrouve ici un peu l'atmosphère du film "Délivrance", l'amérique profonde et consanguine que personne n'a vraiment envie de connaître.
C'est lourd et on finit à peu près aussi éreinté que Kenneth.
C'est un bon bouquin, mais comme l'impression qu'il m'a laissée est vraiment étouffante, j'oscille entre la fascination et la répulsion.
En tous les cas, ça remue.

Le gros moins : une scène ahurissante de "déguisement", vers la fin, en plus, qui paraît sortie tout droit d'une parodie de film d'horreur. un peu "trop" pour moi, j'ai pas réussi à y adhérer complètement, du coup ça m'a sorti de l'ambiance direct.

Ma note : Euh, je ne sais pas. Je ne sais vraiment pas. Balancier entre 2 étoiles et 5... Bizarre...
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Twilight

Traduction : Jean-Paul Gratias

ISBN : 9782070439720

Bien que publié sous l'étiquette du thriller, ce roman de William Gay me paraît appartenir plus justement au genre du roman noir. Poétique, à certains moments onirique, avec une pointe - peut-être l'ai-je sentie à tort - de fantastique à la dernière page, le récit a pour décor le sud des Etats-Unis, très précisément, si je ne me trompe pas, le Tennessee et cette Amérique qu'on dit profonde, et donc fortement rurale, en l'an de grâce 1951.

Tout commence par un charroi de cadavres - y compris celui d'un chien portant des boucles d'oreilles - que le vieux Sandy ramène de la ferme des Calvert, en provenance du Harrikin (le coin le plus reculé de l'Etat). Il y a aussi un entrepreneur de Pompes funèbres pas très catholique mais pour l'instant insoupçonnable, du nom de Fenton Breece, qui s'amuse à faire subir aux cadavres qu'il embaume des "expériences" peu sympathiques et carrément nécrophiles. Comme ces tueurs en série qui ont besoin de "trophées", dont la découverte finit toujours par les perdre mais qui leur permet de fantasmer et de refantasmer entre deux crimes, Breece a eu l'idée bien imprudente de se prendre en photo avec différents cadavres et dans des poses qui ne laissent rien à l'imagination. Or, Corrie et Kenneth Tyler, qui soupçonnent Breece de n'avoir pas inhumé décemment leur père, déterrent le cercueil de celui-ci, font la même chose dans quelques autres tombes pour être bien sûrs de ce qu'ils ont vu et puis finissent par découvrir les fameuses photos.

Corrie, jeune fille qui n'a pas froid aux yeux, décide de faire chanter Breece, ceci malgré l'opposition de son frère qui, comme il le dit lui-même, ne veut pas être mêlé à ça. En représailles, Breece réclame l'aide, évidemment facturée au prix fort, d'un individu bizarre, qu'on suspecte plus ou moins d'avoir déjà tué et que le procureur du comté voudrait bien pouvoir expédier sous les verrous, un certain Granville Sutter.

A partir de là, la machine s'emballe. Corrie confie les photos à son frère. Sutter la tue et se met en chasse, traquant impitoyablement Kenneth tandis que le corps de Corrie échoue chez Breece, lequel, tombé véritablement amoureux de celle qui voulait le faire chanter, s'abandonne en paix à ses pratiques malsaines. Les deux tiers du livre reposent sur la traque menée par Sutter mais aussi sur un parallèle, très ambigu, que Gay semble établir entre la proie et le chasseur. Tyler est jeune, intègre et n'a pas eu une enfance très heureuse. Sutter, d'un âge plus mûr, possède la froideur d'un tueur authentique mais n'a pas eu non plus, on s'en rend compte par de rares retours en arrière, une enfance idéale. Grand buveur quand il était jeune, aimant volontiers à faire des blagues pas toutes de très bon goût, quand Sutter a-t-il basculé et pourquoi ? Et pourquoi Tyler, jusqu'au bout, met-il tout en jeu pour ne pas avoir à le tuer ? Tyler veut lui échapper, cela se comprend, il veut que cesse cette poursuite implacable, obsessionnelle, à travers une Amérique rurale qui n'est pas sans évoquer Erskine Cardwell ou Flannery O'Connor mais, autant que possible, il ne veut pas le tuer. Il veut tout simplement remettre les fameuses photos au sheriff Bellwether afin que Breece soit mis en accusation et puni comme il se doit, la remise de ces photos aux autorités bloquant de facto la traque de Sutter.

C'est si simple, dans le fond, ce que veut le jeune Tyler. Mais la vie, elle, n'est pas simple. Ici, elle se révèle déglinguée, parfois loufoque, avec des personnages qu'on pourrait qualifier de biscornus quand ils ne sont ni alcooliques, ni carrément dérangés, et une longue, très longue traversée de cette espèce d'enfer qu'est le Harrikin (prononciation simplifiée issue de l'ouragan, hurricane, qui a un jour parcouru cette région), avec ses bois griffus, ses rochers abrupts, sa cité minière abandonnée, ses fermes disséminées dans l'isolement, ses puits naturels dont l'un "hurle" par grand vent comme le ferait un chien à la mort, ses maisons en ruines, çà et là et les rails, les rails du chemin de fer qui indiquent à Tyler, quand il les trouve, dans quelle direction se diriger.

Roman qui pèse son poids de noirceur, cette noirceur en apparence gratuite et insensée qui empoisonne certaines existences, "La Mort Au Crépuscule" vaut mieux que sa couverture bêtement gore. Mais, pour le lire, il faut aimer à la fois le roman noir et le roman du Sud des USA qui s'enlacent ici pour donner une sorte de poème en prose, hypnotique fuite en avant de deux individus qui, en d'autres circonstances, auraient pu fort bien s'entendre. C'est la conclusion à laquelle j'ai personnellement abouti. Peut-être est-elle erronée et pourtant ... La dernière page, qui voit Tyler grimper dans une voiture similaire à celle que pilotait Sutter et qui s'arrête pour le prendre en stop, est un modèle, à mon sens, d'ambiguïté. A lire donc, ne serait-ce que par curiosité et pour la réelle puissance poétique du texte. ;o)
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Certes l'intrigue est prenante avec cette terrible poursuite façon « la nuit du chasseur » , certes les méchants sont particulièrement glauques et inquiétants mais ce qui fascine par-dessus tout c'est l'espace où se joue cette course à la mort : friches industrielles , villages fantômes , cimetières profanés , où les paumés du rêve américains essaient de survivre dans une nature à la fois souillée et souveraine d'où l'auteur arrive à faire naître contre toute logique une fascinante beauté.
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Un très bon thriller qui tient en haleine jusqu'à la fin. Selon moi, le point fort du roman réside dans le cadre où se déroule l'action : une forêt sauvage au fin fond du Tennessee. L'ambiance est quasi fantastique. Certaines scènes ne manquent pas de rappeler les contes des frères Grimm comme Hansel et Gretel ou encore le petit chaperon rouge.
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Un bon thriller sans repit, se lit tres facilement et tres haletant.
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Ne vous fiez pas à la couverture du livre, le contenu n'est pas une histoire d'épouvante !
Il s'agit en effet d'un conte, plutôt noir, mais qui se lit avec plaisir. Pour ma part j'ai trouvé un peu agaçant que l'auteur souligne à plusieurs reprises les aspects qui relèvent du conte comme si nous n'étions pas en capacité de le relever..la poursuite du jeune Tyler par Granville Sutter s'étire toutefois en longueur et on a hâte d'arriver à la fin, mais l'ambiance y est, c'est noir et on a du plaisir à le lire.
Les personnages sont tous un peu fous, la loi du plus fort règne, on a tous en tête des films où les méchants ont acheté tous les flics de la ville, c'en est désespérant!
Un bon moment de lecture.
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"Il y avait dans le monde davantage de méchancetés que vous ne pensiez, et vous l'avez remuée et elle vous a éclaboussé, c'est ça ?"

Cher lecteur, ce satané bouquin ne vous lâchera pas comme ça !
Vous allez le tenir jusqu'au bout, mains crispées aux pages cornées d'angoisse, sueurs froides au front et yeux embués par une hallucinante lecture.
Vous allez courir, chaque page haletante, après la fin, aussi vite que possible.
Vous allez rencontrer une sorte de sorcière, les ombres terrifiantes du Klu Klux Klan, des shérifs corrompus, un croque-mort démoniaque, un tueur psychopathe, un chien avec des boucles d'oreilles et un cheval borgne...entre autres horreurs...
Et encore d'autres, plus ou moins humains.
Mais tous, "méchants" ou "gentils", sont placés là, au bon endroit de ce parcours d'épreuves et tous nous apprendrons quelque chose de la vie ou de la mort.

Cher lecteur, ne comptez sur personne pour vous dévoiler la fin de ce roman stupéfiant !

Vous allez détaler de froid, de faim, de peur dans cette forêt maudite de Harrikin (rien que de prononcer son nom, le sang se glace), au fin fond du Sud dégénéré et perverti de l'Amérique des années 50, dans le Tenessee.

Là où règne le plus fort...le plus fou...

Vous aimez les contes de fée ?
Tant mieux pour vous.
Ou tant pis.
Vous serez servis et ... prévenus !
Ici, y'a bien des sorcières, y'a bien un Chaperon Rouge, y'a bien une galette (qui coûtera très très cher à beaucoup de monde), mais de fée, y'a pas !
Soyez rassuré tout de même, cher lecteur, mieux vaut être à votre place qu'à celle de Kenneth Tyler, notre jeune héros innocent qui croit qu'on peut ouvrir une boîte de Pandore sans payer les pots cassés aux adultes.
L'écriture lyrique de ce récit initiatique de l'américian William Gay est diaboliquement servie par la traduction impeccable de Jean-Pierre Gratias.
Aux Etats-Unis, William Gay est "classé" parmi les auteurs dits de "Gothic Fiction", courant littéraire inauguré par l'anglais Horace Walpole en 1764 avec "The Castle of Otranto".
Terreur psychologique et physique, malédiction et folie des personnages, insistance sur le thème du double caractérisent ce courant.

William Gay, "ancien du Vietnam" comme on dit pudiquement, n'aurait-il pas convoqué ses cauchemars dans certaines scènes sanglantes ou paysages apocalyptiques.
Derrière ce livre d'horreur sensée se cache aussi l'éternelle ritournelle tragique de la question du Bien et du Mal, de la vie et de la mort.

Un histoire éprouvante, épouvantable.

Un coup de coeur...terrible !
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