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Citations sur Avoir un corps (54)

"Il faut inventer une raison d'être à chaque journée, ne pas se laisser gagner par le vide."
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Il me plairait de ne pas avoir de corps, de n'avoir ni épaisseur ni apparence.
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"Etre vivant, c'est être mortel, je l'apprends d'un coup et ne l'oublierai pas."
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Je deviens une femme et le mot me terrifie. Je ne le prononce jamais. Je pense que les femmes, ce sont les autres, celles qui se laissent faire par la vie sans résister, celles qui disent « chéri » à leur mari, celles qui portent des chaussures et des sacs assortis. Je continue de dire « les filles » ou « les garçons ». Il ne faut pas tout mélanger.
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Je découvre les produits de beauté et leur pouvoir raffermissant, leur prix surtout qui donne à penser que l'âge n'est pas à prendre à la légère. Le mot apparaît sur les notices et les emballages, qui me consterne. Les crèmes sont "anti-âge", il s'agit de ne pas faire son âge, de paraître toute sa vie une enfant. Les mots creusent des sillons plus sûrement que les rides, mots cruels et vides de sens, qui s'accrochent à ma figure, m'égratignent.
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Une dame, attentive et distante à la fois, me demande les raisons pour lesquelles je ne souhaite pas garder l’enfant. J’entends le mot « enfant » et réalise qu’enceinte et enfant ont quelque chose en commun. Pour l’instant, je veux me débarrasser d’un état, pas d’un enfant.
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C’est au concert que la musique nous atteint et se change lentement en drogue. C’est là que j’apprends mon corps comme une caisse de résonnance, une enveloppe dans laquelle le son dilate et rétracte les membranes. C’est dans la nuit et la lumière artificielle, les éclairages de scène plus ou moins sophistiqués, la fumée qui nimbe les silhouettes mal définies, que je suis traversée par la matité des graves et que ma cage thoracique est secouée d’ondes qui font écho à la puissance sexuelle.
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[Dans l’autobus] Je reste debout, collée contre les autres, le bras tendu en l’air, qui cramponne la barre, et cette sensation d’inconfort mêlée à la chaleur qui bientôt m’indispose confère à mon corps une réalité dont je me passerais bien. Je tente d’orienter mon regard là où personne ne croise le mien, et d’ignorer les visages tout proches. L’objectif est de ne pas voir, ne pas entendre, ne pas respirer, ne pas sentir, ne pas effleurer. Les matinées commencent par un endormissement volontaire des sens, comme un prolongement du sommeil à la verticale.
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C’est long et lancinant. Petit à petit, je suis possédée, et donc dépossédée. Parfois, je ne sais plus qui je suis, moi ou le fœtus qui prend de plus en plus de place. Je suis féminin et masculin dans un même bain. Tout ce liquide me perturbe.
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Ce n'est pas dans l'assemblage que se loge l'intérêt d'avoir une poupée. Je lui remets sa culotte de nylon blanc après l'avoir déchaussée, puis rechaussée, exactement comme je fais quand je m'habille. Le corps de mes poupées me plonge dans un état particulier. Objet qu'on saisit et personne qu'on chérit, je peux décliner toutes mes aspirations, mes plus sombres états d'âme. Plastique froid ou chair tendre, elles sont tour à tour l'endroit de ma colère ou de ma consolation. Mais rien ne m'émeut jamais de leurs courbes. Leurs yeux fixes, leurs petits corps sans chaleur ne provoquent rien, leur peau sans renflement n'exalte pas ma peau, elles ne sont qu'une silhouette asexuée, un leurre autour duquel ma vie gravite. Je joue avec elles le jeu de l'humiliation. Je les range en nombre le long du mur. J'ai sept élèves dans ma classe. Blondes et brunes aux avant-bras qui pointent idiotement vers le plafond. Déjà une bonne raison d'être énervée. La maîtresse que je suis perd ses nerfs facilement, comme j'entends dire de mon oncle. Mon corps se calme mais ma voix prend le relais. Je ne bouge plus et j'articule avec plus d'acuité, et très vite, après les quelques compliments d'usage s'adressant toujours à la même bonne élève, je commence à hausser le ton. Je désigne les deux insolentes dont j'imagine qu'elles vont morfler. Nous sommes là pour ça, les filles ingrates et moi l'adulte, les filles soumises et leur bourreau. Mon désir de châtier est à son comble, il est comme une pulsion que rien ne peut enrayer. J'imagine que mon frère arrache les ailes des mouches, moi je mets des baffes, de plus en plus fort, puis j'attrape les poupées par les cheveux, et je finis par les projeter contre le mur, après leur avoir reproché leur manque de travail, leurs bavardages et d'avoir oublié de faire signer les mots sur le carnet. Je découvre ici un état nouveau, que personne ne soupçonne. Je me laisse aller à tous les excès, je suis injuste et parfaitement cruelle, je n'ai pas d'imagination et le châtiment est sans raffinement, je me découvre basique et vile, je mets en scène ma crise de nerfs et ce qui me surprend est l'énergie que cela requiert, de s'emporter à pleins poumons, de crier et de taper. Je ne suis pas sûre d'avoir éprouvé cela dans d'autres circonstances, je suis une enfant calme et docile, plus encline à plaire qu'à se rebeller. C'est la première fois que je sors de moi, que mon visage devient rouge et chaud de colère, que ma voix met en danger mes cordes vocales. Je me sens un énervement réel. J'en ressors essoufflée et meurtrie, mes poupées ont fait accélérer les battements de mon coeur, ont fait monter mon adrénaline et cette violence que je mime, je ne sais pas encore d'où elle vient. Après l'orage, mes poupées gisent les jambes en l'air, pieds nus, les jupes remontées, les yeux toujours fixes de stupeur. Le carnage ne me dérange pas, si ce n'est les chevelures qui se sont emmêlées. Je ramasse les chaussures éparpillées mais je ne redresse pas les corps. Je n'ai plus envie de jouer, je gagne la cuisine pour aller goûter, laissant dans ma chambre un champ de désolation, tandis que mon frère vient probablement de dégommer une armée de soldats sur son lino.
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