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Citations sur Vij (13)

Il y avait, en effet, quelque chose de terrible dans la tragique beauté de la morte. Peut-être ne lui aurait-elle pas inspiré une terreur aussi profonde si elle eût été plus laide. Mais on n’’apetcevait rien de terni, ni de cadavérique, dans les traits de son visage. Il était vivant, et il semblait au philosophe qu’elle le suivait du regard, tout en ayant les yeux clos. Il crut même voir une larme sourdre sous les cils de son œil droit, et lorsque cette larme vint se figer sur la joue, il vit nettement que c’était une goutte de sang.
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Un tremblement le saisit ; il avait devant lui une beauté comme il n’en paraît que bien rarement sur la terre. Jamais sans doute visage n’avait offert des traits aussi fortement accusés et en même temps aussi splendidement harmonieux. Elle paraissait encore vivante. Son beau front pur comme l’argent, doux comme la neige, semblait penser ; ses sourcils soyeux et réguliers – ténèbres tranchant sur cette clarté éblouissante – dominaient fièrement ses yeux clos dont les cils tombaient en flèches sur des joues qu’embrasait l’ardeur des convoitises secrètes ; ses lèvres, rubis écarlates, souriaient d’un sourire de béatitude, un flot de délices allait s’en échapper…
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Une grosse cotonnade rouge recouvrait le plancher. Dans un coin, sous les saintes images, et sur une haute table parée d’un velours bleu frangé d’or, était étendu le corps de la morte. De grands cierges enguirlandés de viorne se dressaient près des pieds et de la tête ; leur lumière blafarde se perdait dans les rayons du jour.
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Puis, il aperçut une ondine qui sortait d’une touffe de grands roseaux, ses épaules scintillantes et se jambes, arrondies et fermes, mais toutes tissées de lumières et de frémissements. Elle tourna vers lui son visage aux yeux clairs et perçants. Avec un chant qui s’insinuant en Thomas, elle s’approchait, atteignant presque la surface de l’eau, et après avoir tressailli d’un rire éclatant, plongeait et s’éloignait encore. Elle se renversa sur le dos, et les contours de sa gorge, blanche comme la porcelaine qui n’est pas encore vernie, semblèrent transparents aux rayons caressants de ce soleil nocturne. Une foule de petites bulles la couvrirent comme autant de perles ; elle évoluait au fond de l’eau, égrenant son rire.
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Le philosophe ne pouvait reprendre ses sens ; il regardait avec terreur le coffre étroit et long dans lequel elle s'était étendue. Tout à coup le cercueil s'élança de sa place, et se mit à voler par toute l'église avec un sifflement aigu. Thomas le voyait par moments presque sur sa tête; mais il s'apercevait bien en même temps qu'il ne pouvait franchir le cercle tracé au-dessus de lui. Il se mit à répéter ses exorcismes; le cercueil se précipita avec fracas au milieu de l'église, et resta de nouveau immobile à sa place. Le cadavre alors se souleva, devenu d'un vert livide ; mais à cet instant même retentit le chant lointain du coq. La morte se recoucha, et le couvercle, qui pendait à côté, se posa de lui-même sur le cercueil.
Le philosophe sentait son cœur battre violemment, et il était tout baigné de sueur; mais, rassuré par le chant du coq, il reprit sa lecture avec plus de courage. Aux premières lueurs du jour, un diacre vint le remplacer assisté du vieux lavtoukh qui, pour le moment, remplissait les fonctions de sacristain.
De retour à la maison, le philosophe ne put de longtemps s'endormir; mais la fatigue le vainquit, et il ne se réveilla plus jusqu'au dîner. Quand il ouvrit les yeux, toute cette aventure nocturne lui parut un songe. Il avala une chopine d'eau-de-vie pour se réconforter.
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Il profita de cette excellente disposition pour parcourir le village ; il prit langue avec presque tous les indigènes et s’arrangea si bien qu’il se fit chasser de deux maisons ; une accorte jeune personne lui donna même un grand coup de pelle sur le dos au moment où mû par un désir curieux il allait se convaincre par le toucher de quelle étoffe étaient faits son justaucorps et son cotillon.
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Néanmoins, tout en feuilletant son livre, il regardait de côté le cercueil, et une voix intérieure semblait lui chuchoter :
- La voilà ! la voilà qui se lève ; la voilà qui relève la tête, qui regarde. ..
Mais le silence était toujours profond, le cercueil ne remuait pas, et les cierges versaient des flots de lumière. Cette église illuminée, avec ce cadavre au milieu, était vraiment horrible à voir. Thomas se mit à chanter, en élevant la voix et sur tous les tons, pour étouffer la peur qui renaissait sans cesse en lui. Mais à chaque instant, il tournait les yeux vers le cercueil, en se posant involontairement cette invariable question :
- Si elle se levait, si elle se levait?
Le cercueil était immobile. Pas le moindre son nulle part ; pas le moindre bruit d'un être vivant, même d'un grillon. On n'entendait que le léger pétillement d'un cierge éloigné, ou bien le bruit faible et mat d'une goutte de cire qui tombait sur le pavé.
- Si elle se levait? ...
Elle souleva la tête.
Il regarda tout effaré, et se frotta les yeux.
- Mais, oui, elle n'est plus couchée ! elle est assise sur son tombeau.
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Il détourna les yeux avec effort, et l'instant d'après les fixa de nouveau sur la morte. Elle s'était levée. Elle s'avance lentement vers lui, les yeux fermés, et en étendant les bras comme si elle voulait saisir quelqu'un. Elle va droit à lui. Tout éperdu, il se hâte de tracer du doigt un cercle autour de sa place, et se met à lire avec effort des prières d'exorcisme que lui avait enseignées un vieux moine qui avait souvent vu, dans sa vie, des sorciers et des esprits malins. La morte s'avança jusqu'à la trace de son cercle ; mais on voyait qu'elle n'avait pas la force de franchir cette limite invisible. Elle devint tout à coup bleue et livide comme le cadavre d'une personne morte depuis quelques jours ; ses traits étaient hideux; elle fit claquer ses dents les unes contre les autres, et ouvrit ses yeux morts. Mais elle ne vit rien ; car tout son visage trembla de colère, et elle se dirigea d'un autre côté, tout en étendant les bras et tâtant les murailles, comme pour tâcher de saisir Thomas. Elle s'arrêta enfin, menaça du doigt, et se recoucha dans son cercueil.
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— À propos, connais-tu l’histoire de la Cheptchikha ? dit Doroch en s’adressant au philosophe.
— Non.
— Eh, eh ! je vois qu’on ne vous apprend pas grand’chose dans votre séminaire. Eh bien, écoute. Nous avons ici, dans notre village, un Cosaque qui s’appelle Cheptoun. C’est un bon Cosaque. Il aime parfois à voler et à mentir sans raison ; mais c’est un bon Cosaque. Sa maison n’est pas très-loin d’ici. Un jour, à l’heure où nous sommes maintenant, Cheptoun et sa femme, après avoir soupé, se couchèrent pour dormir. Et comme le temps était beau, la Cheptchikha se coucha dans la cour et Cheptoun dans la maison… Euh... Non, non ! la Cheptchikha dans la maison, sur un banc, et Cheptoun dans la cour.
— Mais, la Cheptchikha ne se couche pas sur le banc, c’est sur le plancher qu'elle se couche, interrompit la vieille paysanne qui se tenait debout à la porte, un coude dans une main et la tête dans l’autre.
Doroch la regarda, puis regarda par terre, puis la regarda encore, puis après un moment de silence :
— Si j’allais t’ôter ta jupe devant tout le monde, dit-il, ce ne serait pas bien, n’est-ce pas ?
Cet avertissement eut tout le succès désirable ; la vieille se tut et n’interrompit plus personne.
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Voilà qu’une fois notre demoiselle vient à l’écurie où il pansait un cheval.
« Écoute, Mikita, lui dit-elle, permets que je mette sur toi mon petit pied. » Et lui, le sot, répondit tout enchanté : « Non-seulement ton pied, mais assieds-toi tout entière sur moi, si tu veux. » La demoiselle leva son pied, et quand il vit ce pied si blanc et si rond, il paraît que le charme le rendit complétement stupide. Il courba les épaules, et quand il eut saisi les deux pieds nus de la demoiselle avec ses mains, il se mit à galoper comme un cheval à travers champs.
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