En route vers nulle part, j’avais besoin de m’évader, de redécouvrir des paysages anonymes. J’ai roulé jusqu’à l’épuisement, dès que je m’arrêtais, il me fallait repartir. Aucuns lieux ne m’apaisaient, bien au contraire. Mon passé devenait mon avenir, cette réalité me paniquait. Je ne voulais surtout pas revivre ce qui m’avait conduit à en être là, aujourd’hui. J’allais souffrir, et peut-être devoir payer la somme de toutes mes erreurs. Je ne m’y étais pas préparé, je n’en voulais pas.
Il leva sur moi un regard chargé de compassion. J’eus la désagréable impression qu’il inspectait mon âme, je me sentais rougir comme un écolier pris en flagrant délit de triche. Seul, le balancier de la vieille comtoise nous raccrochait à la réalité. Le temps n’avait subitement plus aucune importance. Je me sentais apaisé, presque en paix avec moi-même.
« Après les semailles viennent les récoltes » Avais-je lu dans un ouvrage pieu. J’avais annoté cette phrase d’un simple point d’interrogation. Quelles pouvaient-être ces graines sinon un espoir, ou un noble désir ?
Moi, j’avais planté de l’amour et je voulais en goûter le fruit.
Qu’importe s’il y a des riches et des pauvres car rien n’appartient vraiment à personne. Rien de ce qui est matériel n’est éternel. Au jour dernier, ton âme s’élèvera pour rejoindre une communauté d’âmes. Tu seras l’autre et l’autre sera toi.
L’oubli n’est pas une réponse, l’oubli est la solution des faibles d’esprit.