Le temps régnait ici dans ce cottage. Les pendules tictaquaient, les aiguilles tournaient comme dans tout le reste de l'univers. Il crut percevoir le temps filant devant lui, courant à sa perte comme les pourceaux de Gadarene. Le temps grinçait en passant devant lui à une allure toujours plus rapide, dévalant une pente escarpée. Les poètes lui avaient répété et répété que la vie était courte. Maintenant seulement il réalisait cette constatation. Il aspirait après la paix et la beauté, et les minutes s'envolaient, et il n'était toujours qu'un fugitif à l'esprit confus, obscurci par la peur de la mort.
Andrews ne se retourna pas vers le cottage. Le regret s'était évanoui et même le souvenir du corps disgracieux qu'il abandonnait derrière lui. A sa propre surprise, il se sentait heureux et en paix, car son père était enfin vaincu, anéanti, et il restait en lui son moi, un moi qui ne connaissait ni la sensualité, ni le blasphème, ni la lâcheté, mais seulement la sérénité et la curiosité de ces ténèbres qui s'épaississaient autour de lui.
Vous autres femmes, vous avez tant de bon sens! Un rêve est souvent tout ce qu'a un homme. Je vous crois ravissante, bonne, pleine de pitié, mais ce n'est qu'un rêve. Vous savez, vous, en ce qui vous concerne, que vous êtes gourmande de ceci ou de cela, que vous êtes plein de repoussantes misères physiques. Vous ne trouverez jamais d'homme qui vous aime pour autre chose que pour une image vaine de vous même.
Il allait accomplir pour une raison vile ce qu'il avait refusé d'accomplir pour une juste raison.
Il n'éprouvait aucune peur de la mort mais plutôt la terreur de vivre, de continuer à se souiller puis à se repentir, et à se souiller de nouveau.