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Marcelle Sibon (Autre)
EAN : 9782264037947
256 pages
10-18 (21/08/2003)
3.81/5   198 notes
Résumé :
Graham Greene n'est pas seulement le grand écrivain catholique consacré par le succès de son fameux roman La Puissance et la Gloire. Entré par effraction dans le royaume de la Grâce (selon le mot de François Mauriac), cet ancien membre du Foreign Office a su aussi dénoncer la guerre, les dictatures et ce vice suprême : l'imbécillité. Ainsi de cet Américain bien tranquille où il y met en scène la relation, au début des années 1950, entre un jeune Américain idéaliste ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (25) Voir plus Ajouter une critique
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Bien mieux écrit (ou mieux traduit) que le brontosaure du roman d'espionnage estampillé Graham Greene lu précédemment (L'agent secret, 1939) et dont on visualisait assez bien les scènes en « noir et blanc » et les dialogues sous-titrés, celui-ci nous plonge d'emblée dans le genre aventure exotique en Technicolor sur écran large, avec odeurs de rizières et de poudre. Ce n'est pas pour rien qu'Un américain bien tranquille (1955) a été adapté deux fois au cinéma, la première par Joseph Mankiewicz en 1958 (avec Michael Redgrave) et la seconde par Phillip Noyce en 2002 (avec Michael Caine).

Nous sommes à Saigon en 1952. le narrateur, Thomas Fowler, correspondant de presse britannique cynique et désabusé, couvre les événements de la guerre d'Indochine. Un peu compliquée à comprendre, celle-ci oppose les Français qui tentent de conserver le contrôle des routes et des villes, et le Viet-minh indépendantiste et communiste. Mais il existe également une « troisième force » soutenue par les américains : les troupes du général Trinh Minh The, qui a pris le maquis (ou plutôt la rizière) pour combattre à la fois les Français et les communistes, sans parler des armées privées détenues par des sectes religieuses, les Hoa Haos et les Caodaïstes qui sévissent dans la région.

Le livre, tout comme le film de Phillip Noyce, ont été considérés comme anti-CIA et anti-américains (Joseph Mankiewicz a complètement modifié le scénario initial pour son film, afin de préserver la réputation de l'Oncle Sam). Graham Greene, dont la carrière dans les renseignements britanniques n'est un secret pour personne, suggère que les Américains auraient aidé des poseurs de bombe agissant contre des ressortissants français et vietnamiens à Saigon (cet épisode peu connu constitue pour moi une découverte, mais là n'est pas l'essentiel du livre).

Le côté historique et géopolitique, pour intéressant qu'il soit, ne doit pas occulter le thème principal du livre : l'histoire d'un triangle amoureux composé de Fowler, de l'insaisissable Phuong, sa petite amie vietnamienne, et de Pyle, l'Américain bien tranquille, dont on apprend la mort au début du récit. On découvre cette histoire dans un long flashback, avec le point de vue de Fowler, épris de la jolie Phuong, qui dévoile très vite des talents cachés, comme sa dextérité lors de la préparation des pipes, etc. L'opium est il est vrai plus politiquement correct que le pudiquement exprimé « etc. » en 1955, vu le nombre de pipes consommées dès le chapitre 1 par Fowler, certes accablé par le chagrin et le remord après la perte de son ami. On comprend progressivement que le gentil et naïf Pyle est en fait un agent infiltré de la CIA pourvoyeur d'armes sous couverture humanitaire. Et que le jeune Pyle a très vraisemblablement et sans coup férir piqué Phuong à Fowler, malgré leur amitié affichée. La question lancinante tout au long du récit est alors la suivante : Fowler est-il impliqué dans la mort de son rival et néanmoins ami Pyle, au motif inavoué de pouvoir récupérer Phuong ?

Grâce à la mise en scène remarquable de Graham Greene, l'aventure attend le lecteur au détour de chaque page. On assiste aux premiers revers des Français (Diên Biên Phu approche) qui cèderont la place aux Américains pour une seconde guerre d'Indochine qu'on appellera guerre du Viêt-Nam. Les occidentaux achèvent ici leurs rêves, de colonies et de paradis lointains pour les uns, d'un monde sans communisme pour les autres. Dans cette toile de fond, un autre conflit fait rage, la lutte entre deux rivaux pour la même femme, jamais déclarée mais peut-être tout aussi meurtrière.

Ce roman est un pur chef d'oeuvre. Je vous invite à jeter un oeil sur la vidéo postée par mes soins sur Babelio de la bande annonce du film de Phillip Noyce, avec Michael Caine dans le rôle de Thomas Fowler. Si après ça je n'arrive pas à imposer ce roman comme lecture du mois sur le forum, je repars cacochyme me repaître d'amanites au fin fond de la Cochinchine, pour rêver aux Annamites.
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Le reporter britannique Thomas Fowler couvre la guerre d'Indochine qui oppose la France à des indépendantistes. Pyle, lui, travaille à la Mission d'aide américaine. Lorsque ce jeune homme rencontre Fowler, c'est surtout Phuong, la compagne de ce dernier, qu'il remarque. Très vite, le 'tranquille Américain' envisage d'épouser la belle jeune femme.
Phuong rapproche Fowler et Pyle, tout en les opposant.

Après la découverte du corps de Pyle (au début du livre), Fowler figure sur la liste des suspects. Patiemment, l'officier Vigot mène l'enquête ; mais ce sont surtout les informations fournies par le narrateur qui nous permettront de comprendre certaines raisons du meurtre de Pyle...

Au-delà de l'intrigue, Graham Greene se demande si toute fin justifie les moyens. Il s'interroge aussi sur la possibilité pour le témoin d'une guerre de se cantonner à ce rôle en toutes circonstances. Il souligne également l'absurdité de la guerre et met en garde contre le prêt-à-penser idéologique.

Cette idée de lecture m'a été soufflée par le livre 'Kampuchéa' de Patrick Deville. Je l'en remercie, d'autant plus que j'ai pu mieux comprendre les liens entre 'notre' guerre d'Indochine (1946-1954) et celle du Viet Nam qui lui fit suite.
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L'histoire de l'Indochine me passionne, et j'ai dévoré les romans de Jean Hougron, ainsi que "L'amant de la Chine du Nord" de Duras. Graham Greene fait partie de ceux qui savent si bien imprégner leur histoire de l'atmosphère si particulière de cette partie de l'Asie auquel le destin nous a liés.
Un Américain bien tranquille (mais pas tant que ça), Alden Pyle, un reporter anglais désabusé, un brin cynique (Fowler), venu couvrir les événements de 1952 (dernières années de la guerre d'Indochine, avec les difficultés de l'armée française dans ce territoire convoité par d'autres...), une jeune Indochinoise, Phuong, voici le trio de tête pour le départ de ce roman, qui démarre à la manière d'un policier : Pyle a été assassiné, et Vigot, l'inspecteur, vient tout naturellement enquêter du côté de Fowler, l'amant délaissé.
Le roman bascule très vite dans un long flash back ...
Assisterons-nous à une passe d'armes entre le jeune Américain, pétri d'idéalisme par ses lectures, mais peu confronté à la réalité du terrain, et l'Anglais expérimenté, mais à coup sûr sans idéal ? Leur rencontre oscille entre amitié, méfiance, et ... rivalité. Car Fowler, l'Anglais , a pour compagne la ravissante Phuong, dont Pyle, l'Américain de Boston "propre sur lui", ne tarde pas à tomber amoureux.
Quelques images de guerre viennent ponctuer le récit, pour ne rien occulter de ces scènes d'horreur où les civils sont sacrifiés en raison d'une guerre conduite de façon parfois aussi primesautière que cruelle...
J'ai beaucoup aimé, dans ce roman, le mélange des genres : roman policier, chroniques de guerre, histoire sentimentale. J'ai aussi apprécié cette vision virile et détachée de la guerre qui caractérise notamment Hougron, Greene, et, bien sûr, Malraux, bien que, dans "Un Américain bien tranquille", l'émotion revienne, en filigrane, dans la fin du roman.
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Histoire d'un faux candide et d'un vrai cynique qui aimaient la même femme sur fond de guerre d'Indochine. le candide perd la vie et le cynique survit dans la culpabilité. le candide est un jeune américain empli d'une bonne conscience stupide et destructrice. le cynique est un journaliste anglais, bien informé des doutes des français, de l'avancée irrésistible du Vietminh et des sombres complots des caodaïstes et du général Thé. Il refuse de s'engager, c'est à dire qu'il laisse faire, y compris l'assassinat de son rival, espion au petit pied. Il y a des scènes d'anthologie : la nuit dans une tour de guet assiégée, un bombardement en piqué, les ravages de l'attentat fomenté par le candide. La virtuosité est aussi dans les dialogues : vivacité, dérision, mensonge, anticipation ou contradiction de la pensée, de la parole et de l'action. Sur le fond, un militaire résume la pensée de l'auteur (p 275) : Vous êtes journaliste. Vous savez mieux que moi que notre victoire est impossible. Vous savez que la route de Hanoï est coupée et minée toutes les nuits. Vous savez que nous perdons une promotion de saint-cyriens par an. Nous avons failli être vaincus en 50. de Lattre nous a obtenu deux ans de grâce, c'est tout. Mais nous sommes des militaires de carrière et nous devons continuer à nous battre jusqu'à ce que les politiciens nous disent de nous arrêter. Alors, il est probable qu'ils se réuniront pour décider de conditions de paix exactement semblables à celles que nous avions obtenues dès le début, et qui réduiront toutes ces années à l'état de pure absurdité. le roman est écrit en 1955 et les américains commenceront en 1965 une guerre totale, tragique et honteuse.
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Dans l' Indochine française de 1952 un anglais désabusé et cynique devient l'ami d'un américain idéaliste. le second tombe amoureux de la maîtresse du premier. Amitié, amour, jalousie, politique et espionnage s'imbriquent dans un récit captivant jusqu'au dénouement. C'est également une description en pointillés de la passation de pouvoir qui aura lieu deux ans plus tard entre Français et Américains, lesquels apprendront bien amèrement que les idéalistes ne font pas bon ménage avec les guerriers. Comme souvent chez Graham Greene et de nombreux autres auteurs britanniques (John le Carré par exemple), on peut sentir, à travers les deux protagonistes de l'histoire, le sentiment d'attirance-répulsion qui lie si fortement les Britanniques à ceux qu'ils nomment les "cousins" d'Amérique. Toujours un enchantement de lire ce grand écrivain.
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Citations et extraits (45) Voir plus Ajouter une citation
Quoique ma raison aspirât à la mort, en tant qu'état, j'en avais peur comme une vierge redoute l'acte sexuel. Je souhaitais être averti d'avance de l'approche de la mort, afin d'avoir le temps de me préparer. Me préparer à quoi? Je ne le savais pas, je ne savais pas non plus comment me préparer, en dehors d'un examen rapide de ce que j'allais quitter.
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- Aimez-vous les chiens?
- Non.
- Je croyais que tous les Britanniques les adoraient.
- Nous croyons que tous les Américains adorent les dollars, mais il doit y avoir des exceptions.
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Oh! oui, les gens ont toujours et partout aimé leurs ennemis. C'est à leurs amis qu'ils réservent la souffrance et le néant.
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C'est une superstition chez elles qu'un amant fumeur d'opium revient toujours, fût-ce de France. Il se peut que la puissance virile soit diminuée par l'opium, mais elles préfèrent toutes un amant fidèle à un amant puissant.
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- Que savez-vous au sujet de Pyle ? Répondez à mes questions, s'il vous plaît, Monsieur Fowler. C'est contre mon gré que je vous les pose, mais ceci est sérieux. Croyez-moi, je vous en prie, c'est très sérieux.
- Je ne suis pas un mouchard. Tout ce que je pourrais vous dire sur Pyle, vous le savez. Âge : trente-deux ans, attaché à la Mission d'aide économique, nationalité américaine.
- Vous semblez être un ami à lui, dit Vigot, regardant Phuong par dessus ma tête.
Un agent de police indigène entra, portant trois tasses de café noir.
- Aimeriez-vous mieux du thé ? demanda Vigot.
- Je suis vraiment son ami, dis-je. Pourquoi pas ? Je vais rentrer chez moi un de ces jours, n'est-ce pas ? Je ne peux pas emmener cette petite. Elle sera très bien, avec lui. C'est un arrangement raisonnable. Il dit même qu'il va l'épouser. Il en est capable, vous savez. C'est un brave type à sa façon. Sérieux. Pas une de ces brutes qui font du boucan au Continental. Un Américain tranquille, résumai-je pour le définir, comme j'aurais dit : un lézard bleu, un éléphant blanc.
- Oui, dit Vigot, un Américain bien tranquille.
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Videos de Graham Greene (9) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Graham Greene
Des tranchées d'Argonne à Monrovia en passant par Dakar, New York et Paris, une fresque romanesque puissante qui court d'une guerre mondiale à l'autre, rythmée par les accents vibrants du jazz. 1918. Percussionniste virtuose à l'école des djembés de Gorée, Jules, interprète du régiment de Noirs américains sur le front de cette France ravagée qu'il ne connaît qu'à travers Maupassant, vit à l'aube de l'armistice un amour éphémère avec l'épouse d'une « gueule cassée ». Ce souvenir indélébile l'accompagnera après la guerre dans son long périple à travers l'Amérique bouillonnante des Années folles, quand il rejoint le jazz-band de ses anciens compagnons de guerre, en tournée dans le Sud raciste, puis triomphe au célèbre Cotton Club de New York.
Sa vie croise celle de Joséphine Baker qui l'emmène, avec sa Revue nègre, à Paris où l'amitié qu'il scelle avec l'écrivain-espion Graham Greene les entraîne dans une périlleuse expédition en Afrique. Ils iront jusqu'à Monrovia, capitale du Liberia, sur les traces de Julius Washington, l'arrière-grand-père de Jules, premier grand reporter photographe noir américain. Alors que de nouveau une guerre s'annonce, Jules s'installe à Mamba Point, dans la maison de Julius, l'homme qui a tenté de révéler la véritable histoire de ce pays : celle de ces esclaves affranchis envoyés en Afrique pour bâtir une nation libre. Un rêve devenu cauchemar.
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