Le premier jour du reste de ma vie

A vingt ans, l'amour est inconditionnel, irraisonné, passionné. On le croit éternel, on n'imagine pas qu'il puisse s'arrêter. Les certitudes sont vissées au corps, les promesses s'additionnent aux projets.

Finalement, ses relations les plus poussées, elle les entretenait avec Rachel et Ross, Bree van de Kamp et autres Meredith Grey. Avec eux, c'était bien plus facile.

Croyez-moi, l'amour peut frapper à tout âge, partout. Même quand on ne l'attend pas. Il serait dommage de lui tourner le dos. Nous allons tous au même endroit ; autant rendre le chemin plus heureux.

Ils se dévisagent pendant de longues secondes, sans bouger. Un peu parce qu'ils hésitent, un peu parce que c'est le meilleur moment. Marie ferme les yeux. Elle sent des fourmis dans son bas-ventre. Le souffle de Loïc s'approche, lentement, très lentement. Ses lèvres effleurent les siennes, légèrement, tendrement, puis plus fermement. Elle entrouvre la bouche, leurs langues se trouvent. Un baiser comme dans sa "boîte à guimauve". Loïc colle son corps contre le sien, glisse la main dans ses cheveux et lui caresse la nuque. Sa bouche descend le long de son cou, son souffle se fait plus rapide. Elle s'agrippe à sa taille et presse les doigts contre sa peau. Elle a envie d'enrouler ses jambes autour de lui, de lui enlever son maillot de bain, qu'il soulage ce désir animal qui envahit son ventre. Mais ils sont dans un lieu public ; alors ils se contentent de s'embrasser encore et encore en savourant cette envie qu'ils pensaient ne plus jamais éprouver.

C'est irréel. Elle est là, en train de flotter au-dessus du monde, face à un spectacle exceptionnel. Une bouffée de bonheur l'envahit. Elle tourne la tête vers Loïc ; il est en train de la fixer. Il ne dit rien, il ne sourit pas. Il regarde ses yeux, sa bouche, en silence. C'est gênant, un peu. Excitant, terriblement. Elle soutient son regard.

Avec Dominique, ils avaient pour tradition de s'écrire un petit mot chaque jour. "Bonne journée, mon amour. Tu me manques déjà. Je t'aime. Moi plus. Non, MOI PLUS... Ça avait commencé sur des carnets, puis des Post-it avaient pris le relais. Un tiroir en était rempli. Depuis quelques années, c'était sur des écrans tactiles que leur amour s'écrivait. C'était devenu une habitude, comme se brosser les dents ou avaler le café. La journée commençait avec un SMS.

Une alarme sonne dans l'habitacle, et des lumières clignotent sur le tableau de bord. Le pilote se retourne, il a les sourcils en accent grave. Par réflexe, Marie se jette dans les bras de Loïc, qui la serre fort. Elle plonge dans son regard apeuré, arrache leurs casques-micros et écrase ses lèvres contre les siennes. Les larmes coulent dans leurs bouches, leurs langues s'emmêlent avec la passion du désespoir. Ils n'entendent plus, ne voient plus. Ils se concentrent sur ces derniers instants avant que tout s'éteigne.

- L'amour c'est l'art d'accorder ses instruments, déclame-t-elle. Les passions communes sont indispensables à l'unité d'un couple, vous savez.

Camille a toujours rangé le coup de foudre au rayon des légendes, avec le père Noël et la petite souris. Si elle y croyait, elle penserait avoir été touchée. Avec lui, tout a été facile. L'écouter parler de lui, lui parler d'elle, le regarder, se laisser aller...
- C'est comme si j'étais à ma place... C'était bien, j'avais envie que ça dure toujours.

L'excitation passée, ils prennent conscience de leur position. Loïc est derrière Marie, pressé contre son dos. Ses mains enserrent sa taille. Sa joue est collé à son oreille. Son bassin est contre ses fesses. Ils ne parlent plus. L'envie de rire est partie. Ils ne bougent pas. La respiration de Loïc s'accélère de nouveau. Marie la sent sur elle. Un frisson recouvre sa peau. Elle ferme les yeux et penche la tête sur le côté pour lui tendre son cou. Lentement, il approche ses lèvres, effleure sa peau, les presse plus fort. Puis il relève la tête brusquement et se racle la gorge.