Les malheurs de la condition humaine, les forces incontrôlées qui l'assaillaient ne trouvaient des explications ou des remèdes que dans les religions. Les civilisations ont été nécessairement à base religieuse. [...] Trois religions à prétention universelle se partageaient alors l'humanité : le bouddhisme dans le sud et l'est de l'Asie, l'islām de l'Inde au Maghreb, le christianisme de l'Arménie à l'Irlande. Consolation pour tous les fidèles, sagesse pour les gens instruits, exaltation pour la littérature et l'art, elles ont puissamment influé sur le déroulement de l'Histoire.
[Elles furent aussi un prétexte dont les fanatiques se servirent pour faire verser du sang et dont les religieux usèrent comme d'une menace pour calmer les colères du peuple contre les injustices imposées par les puissants, un appel à ne pas se révolter contre l'autorité. Voilà ce que je suis tenté d'ajouter à ma citation du livre de Bernard Guillemain].
Pourtant, en dépit de fluctuations parfois saisissantes de la carte politique, il ne paraît pas que la vie quotidienne de l'humanité a connu des modifications essentielles entre le X° et le XIII° siècle.
Le contraste reste net entre la mobilité des conflits, des ascensions, des chutes qui touchent la petite minorité des puissants et des riches, et la passivité, la pauvreté du grand nombre qui subit les guerres, les injustices, les disettes.
De brusques secousses ont remis en cause ici ou là la hiérarchie sociale, non pas des mouvements de fond.
Les perfectionnements techniques n'ont pas été capables de chasser la hantise de la faim, de rompre la soumission à l'alternance du jour et de la nuit et au cycle des saisons....
(extrait de l'introduction insérée en début de l'édition de poche éditée en 1969)