« Voici Chvéïk, madame la baronne, dit-il avec un calme factice, en arrêtant l’aristocratique visiteuse devant le lit du brave soldat. C’est un garçon qui a beaucoup de patience. »
S’étant installée près du lit de Chvéïk sur une chaise qu’on lui approcha, la baronne von Botzenheim commença : « La soldat téchèque toit êdre douchours une brafe soldat, la soldat téchèque peaugoup malate, mais douchours êdre une héros, moi peaugoup aimer la Audrichien téchèque ! »
Et caressant les joues non rasées de Chvéïk, elle ajouta : « Moi dout lire tans les chournaux, moi apporder à mancher, croguer, fumer, sucer, la soldat téchèque douchours une brafe soldat. »
(p.133) – « Comment Chvéïk fut réduit au triste état de simulateur. »
Et Chvéïk exposé ses vues sur la politique extérieure de l’Autriche dans les Balkans. En 1912, les Turcs ont été battus par la Serbie, la Bulgarie et la Grèce. Ils avaient demandé à l’Autriche de les aider, et, comme l’Autriche ne marchait pas, ils viennent de tuer Ferdinand. Voilà.
Le service militaire fait de vous, espèces d'andouilles, des membres de la société humaine!
"C'est toujours au nom d'une divinité bienfaisante, sortie de l'imagination des hommes, que se prépare le massacre de la pauvre humanité."
Sa sagacité et sa connaissance des hommes étaient si grande qu'il était parvenu à accuser de crime politique un Tsigane arrêté au régiment et interné à la prison militaire pour le vol de plusieurs douzaines de sous-vêtements (il travaillait à l'entrepôt, avec le magasinier), affirmant qu'il avait discuté avec des soldats, dans un café, de la création d'un Etat indépendant constitué des pays de la Couronne de Bohême et de la Slovaquie, avec à sa tête un roi slave.
Sa stupidité était si profonde que les officiers préféraient l'éviter de loin afin de ne pas avoir à entendre que le trottoir est l'élément de la rue qui délimite la chaussée, et qu'il consiste en une bande pavée qui longe la façade des immeubles. Quant à la façade, c'est la partie de l'immeuble que l'on aperçoit depuis la façade ou la chaussée. Il nous est impossible d'apercevoir la partie arrière des immeubles, phénomène dont on pourra s'assurer en se tenant au milieu de la chaussée.
- Mais vous n'êtes pas idiot, Svejk, vous êtes malin, rusé, vous êtes un filou, un gredin, un voyou, vous comprenez...
- Je déclare avec respect que je comprends.
J’ai connu un agrégé en mathématiques, qui, répugnant au service de l’artillerie, décida de voler la montre d’un oberleutenant pour pouvoir se caser dans la prison de la place. Il avait agi ainsi après mûre réflexion. La guerre ne lui disait rien. Expédier les obus et tuer des agrégés en mathématiques de l’autre côté du front, il considérait cela comme parfaitement idiot.
– Moi, ils m’ont déjà examiné, les médecins-légistes, dit un jeune homme, et c’est quand je suis passé aux assises pour les tapis. Ils m’ont reconnu comme « faible d’esprit ». Maintenant, j’ai un abus de confiance sur le dos, et ils ne peuvent rien me faire. Mon avocat m’a dit justement hier que je pouvais être tranquille et qu’une fois déclaré faible d’esprit j’en avais pour toute ma vie.
Je vous déclare avec obéissance que je suis effectivement aussi stupide que vous dites.