Dans ce tome 2 de la saga LES FEMMES DE L'ISLAM, la figure de FATIMA, l'une des filles du prophète Mahomet est prédominante. Pourquoi ? parce qu'elle a la particularité de se sentir plus masculine que féminine et d'avoir voulu prendre, auprès de son père, la place de son frère al Qasim (et seul fils) prématurément décédé.
Cinq ans après la mort de ma mère, on suivra donc Fatima dans son quotidien entre enseignements guerriers dispensés par le fidèle esclave perse Abdonaï, présence chaleureuse à ses côtés de l'ancienne esclave-amie de sa mère, Ashemou, premiers émois amoureux, et partage (à distance néanmoins) des premiers prêches de son père.
Conformément à la promesse faite à sa mère Khahija, Fatima entend bien devenir celle qui protègera son père de ses nombreux ennemis. Ceux-ci sont si acharnés à le ruiner, puis à vouloir le tuer que Mahomet et son clan n'auront d'autre alternative que de choisir, dans l'urgence, la fuite de la Mecque vers Yatrib susceptible de les accueillir favorablement malgré certaines oppositions locales. A la faveur d'une ruse dont les Mecquois feront les frais, le grand départ aura lieu en l'an 622 après J.C. (ce qu'on appelle l'Hégire qui marque le début du calendrier musulman).
On le verra, leur arrivée à Yatrib ne sera pas à la hauteur de leurs espérances. Ils ont dû tout quitter, ils ont dû laisser à La Mecque toutes leurs possessions et richesses. Il leur faut tout reconstruire à partir de rien. Et puis, on leur avait laissé entendre qu'ils seraient attendus, voire espérés et on verra que ce n'est pas vraiment le cas pour nombre de clans locaux.
Mais au fur et à mesure que la sécurité s'installe, que Mahomet devient le Messager d'Allah et est de plus en plus écouté, au fur et à mesure qu'il reconstruit également sa vie d'homme en s'attachant une nouvelle épouse (encore très jeune car elle n'a que six ans, Aïcha), le quotidien de Fatima - sa fille préférée - se restreint drastiquement.
Comment surmontera-t-elle ses démons, notamment celui de la jalousie maladive vis-à-vis de cette nouvelle femme-enfant qui semble détourner son père d'elle ?
Comment convaincre celui-ci qu'il a toujours besoin de son bras armé et qu'il ne peut être question pour elle d'entrer dans le rang de la docilité féminine ?
Comment peut elle trouver sa place dans une société d'hommes où les aspirations des femmes sont bafouées ?
Telles seront les questions auxquelles Fatima sera confrontée.
Peu à peu, "la fille de son père" devra s'effacer au profit de "la femme d'un autre". Elle n'aura d'autre choix que d'épouser l'homme qui aura été choisi par son père et d'oeuvrer à la descendance de celui-ci en enfantant.
C'est sans déplaisir que l'on suit la suite des "aventures" du premier prophète de l'Islam, de ces premiers Croyants qui ont fait le choix de le suivre et de Fatima confrontée à des événements dont elle ne mesure pas la portée historique.
La prose de
Marek Halter est fluide, toujours aussi descriptive et romanesque et régulièrement ponctuée des paroles d'Allah, relayées par la bouche du prophète, et présentes dans ce qui constituera, plus tard, le Coran.
Là encore, j'ai eu le sentiment d'apprendre beaucoup de choses. Entre autres, la façon dont les communautés juives de Yatrib ont contribué à respecter ce prophète largement inspiré par les paroles du Livre dont il a eu accès grâce aux sages et lettrés Waraqà, Zaïd, Ali qui les ont étudiées et qui les lui ont enseignées. Mais aussi, comment à cette époque, Juifs et musulmans étaient capables de vivre ensemble en bonne intelligence.