Jean-Bernard le pontifiant et ses monologues aussi intéressants qu'une lecture d'annuaire téléphonique.
Mes mains se couvrent d'une moiteur froide, ma gorge se noue. J'ai envie de crier, mais je n'ai pas d'air dans les poumons.
La corneille sroasse et martèle la vitre à une vitesse inouïe. Le verre se fend.
Le bec se brise. Le sang éclabousse la fenêtre.
Tu n'as aucun éclat, ma colombe, hurle une voix distordue.
- Les déménagements peuvent effectivement être une source de stress, mais dans votre cas, c'est tout à fait mineur en comparaison avec ce que vous avez subi. Où allez-vous, sans indiscrétion ?
- Dans les Vosges, à Plainfaing.
- Je vois, dit-il les yeux levés vers le plafond couleur crème.
Non. Visiblement pas, si j'en juge son regard absent. Moi-même, j'ignorais l'existence de ce village aux abords du col du Bonhomme, bien loin du tumulte parisien. [...]
Alors pourquoi les Vosges ? Pour leur ressemblance avec le Maine. Des sapins, des lacs, la nature. Je n'en demande pas plus.
« Le centre de détention pour cinglées de Plainfaing vous accueille sur ses quinze hectares de terrain boisé. Un agréable chalet hanté vous permettra de profiter de votre névrose dans un écrin de verdure. Une fois parvenue au terme de votre folie furieuse, vous serez délicatement exécutée, transportée dans un confortable sac mortuaire puis disséquer dans la maison des voisins. Ne manquez pas cette occasion unique et originale de vous faire trucider »
Je souris malgré moi.
Chapitre 10 - Page 131 sur 393
Malgré cette familiarité, du paysage, je suis assaillie par le doute. Était-ce une si bonne idée de quitter Paris ? L'objectif de cet exode rural était de retrouver un semblant de sérénité, de pouvoir mettre la fusillade derrière moi. C'est plutôt raté. il est peut-être un peu tôt pour l'affirmer, mais j'ai la désagréable sensations que mes démons m'ont suivie dans mon exil.
Chapitre 8- Page 98 sur 395
On ne peut pas construire un avenir avec une personne qui se dérobe au premier obstacle. Tot ou tard, on doit faire face à la tourmente, et à ce moment là notre partenaire doit être solide comme un roc, ou tout s ecroule.
"Dans la toile "
Tout le monde me prend pour une héroïne. Pourtant, j’ai agi par égoïsme. Par instinct de survie. Cela aurait pu être n’importe qui d’autre. J’étais juste suffisamment proche du tireur.
Avant l’accident, je possédais une mémoire d’éléphant, mais depuis ma sortie du coma, c’est à peine si j’arrive à retenir un numéro de téléphone. Merci aux lésions dans mon lobe temporal. Je l’ai peut-être noté quelque part, je ferai des recherches plus tard, enfin si je n’ai pas oublié d’ici là.
J’ai également une pensée pour Camille qui, à sa façon, avait étouffé mes ardeurs d’artiste. Vivre dans son ombre était difficile et c’est une forme de revanche que je prends aujourd’hui sur elle.
Lorsque je fais du rangement, aucune idée noire ne vient me tourmenter. D’ordinaire, ce sont des vautours prêts à fondre sur moi dès qu’une question m’assaille, que je repère un détail insolite ou qu’une légère douleur donne naissance à une angoisse de mort. Ces spectres rapaces ressentent ma peur, s’en nourrissent. Mais ils sont tenus à l’écart quand les tumultes qui agitent mes pensées se calment ou que mon cerveau se brouille et devient sourd à leurs plaintes. Je passe moins l’aspirateur pour la propreté que pour la paix que cette activité me procure.