Puis je lui expliquai que parfois la peur de se tromper empêche certaines personnes d'entreprendre quelque chose et que cette situation peut engendrer de la colère, car la colère rassure et conjure la peur.
Aujourd'hui Jade se porte à merveille. Elle aura bientôt vingt ans et elle vit depuis six ans dans une famille qu'elle considère comme sa vraie famille. De son propre chef, elle n'a gardé aucun contact avec ses parents naturels, même si elle conserve des rapports étroits avec ses sœurs qui sont toutes deux dans des familles différentes, pas très loin d'elle. Dès son arrivée chez ses parents nourriciers, elle a fréquenté une école normale. Etudiante brillante, elle fit des progrès rapides et devint au lycée l'une des meilleures de sa classe. Elle étudie actuellement dans une grande université de la côte Est avec l'intention de devenir professeur de littérature anglaise.
Ne vous inquiétez pas, me dit-elle en riant. Vous vous en sortez mieux que la plupart des remplaçants. L'un d'eux a abandonné au bout d'une demi-heure.
Le fait qu'elle eût délibérément choisi de rester muette m'avait intriguée au cours de la lecture de son dossier. Apparemment, elle parlait chez elle mais à l'école elle n'avait jamais prononcé le moindre mot. En outre, elle ne riait, ne pleurait, ne toussait, ne rotait, ne hoquetait et ne reniflait pas davantage. A ce sujet, on racontait qu'elle laissait la morve couler de son nez. Pour lui donner une chance de surmonter ses difficultés, on lui avait fait redoubler le jardin d'enfant, mais son état était resté stationnaire. En cours préparatoire, elle semblait suivre sans problème mais demeurait désespérément renfermée sur elle-même. Ne parlant toujours pas à la fin de cette année-là, et âgée de presque huit ans, elle avait atterri dans cette classe.
Si le cas de Jade avait attiré mon attention, c'est parce que durant ces dix dernières années, entre la faculté et la Sandry Clinic, l'autisme électif avait constitué mon principal sujet de recherche. J'avais beaucoup travaillé avec des enfants souffrant de ce trouble, fascinée par ces êtres physiquement et intellectuellement capables de s'exprimer comme tout le monde mais qui s'y refusaient pour des raisons psychologiques. Il me paraissait étrange qu'au moment où j'avais pris la décision de tirer un trait final sur mes activités passées, je retrouve dans ma classe une petite fille atteinte de ce handicap.
J'abandonnais les garçons pour retourner dans la classe, tenant toujours à la main le petit morceau de papier que Jade m'avait donné. Je le dépliai avec soin pour y lire ce simple mot :
"Merci"
- Malheureusement, je ne peux rien faire toute seule.
- Si ! Parce que vous êtes Dieu !
-Chérie, je ne suis pas Dieu, mais un être humain comme toi. Et il m'arrive d'avoir besoin d'aide.
- Je veux que vous soyez Dieu, insista Jade en fondant en sanglots.
J'avais également envie de pleurer.
La vraie Jade est beaucoup trop occupée a vivre sa vie
« Les sentiments n'ont rien à voir avec les actions. Voilà pourquoi il faut les exprimer. Les sentiments et les désirs ne peuvent pas tuer. »
« Puis je lui expliquai que parfois la peur de se tromper empêche certaines personnes d'entreprendre quelque chose et que cette situation peut engendrer de la colère, car la colère rassure et conjure la peur. »
« - Malheureusement, je ne peux rien faire toute seule.
- Si ! Parce que vous êtes Dieu !
- Chérie, je ne suis pas Dieu, mais un être humain comme toi. Et il m'arrive aussi d'avoir besoin d'aide.
- Je veux que vous soyez Dieu, insista Jade en fondant en sanglots.
J'avais également envie de pleurer. »
- Malheureusement, je ne peux rien faire toute seule.
- Si ! Parce que vous êtes Dieu !
- Chérie, je ne suis pas Dieu, mais un être humain comme toi. Et il m'arrive aussi d'avoir besoin d'aide.
- Je veux que vous soyez Dieu, insista Jade en fondant en sanglots.
J'avais également envie de pleurer.
Il est plus facile de croire à la bonté des gens quand on ignore le mal