Chroniquer un Tintin est toujours un plaisir, tellement l'oeuvre d'
Hergé est pleine de poésie.
Ce premier opus des aventures du petit reporter à la houppette ne fait dans la dentelle. D'emblée,
Hergé sort l'artillerie lourde en envoyant son héros dans le chaudron tourmenté du soi-disant paradis rouge.
En effet, si l'auteur a décidé de situer les aventures de Tintin en Union Soviétique, c'est pour montrer au monde entier les mensonges de la propagande bolchevique, alors que cette dernière a déjà contaminé les esprits des intellectuels occidentaux béats d'admiration devant cette société socialiste et l'homme nouveau qui doit en découler.
Tintin avec le panache et l'audace qui le caractérise ne va pas tarder à découvrir les inepties et supercheries d'un monde opaque et répressif ou tout n'est que façade. Entre élections truquées, usines de carton-pâte, surveillance permanente, famines, spoliations, etc...,Tintin dénonce…
Si le ton est aussi virulent, c'est que l'auteur connaît la réalité de ce pays et les horreurs qui s'y passent. Grâce au témoignage de diplomate en poste en Russie, des informations fiables ont pu sortir sur la réalité de ce régime totalitaire.
D'ailleurs, si certains esprits grincheux à l'époque ont taxé cette BD de 1929 pourtant prémonitoire, d'oeuvre anticommuniste primaire, ils ont vite cessé leurs polémiques avec dès 1936, le témoignage accablant du grand écrivain
André Gide après son retour d'un voyage en URSS, dont il fera un livre extraordinairement instructif sur la dictature bolchevique, livrant un réquisitoire implacable plein d'amertume alors que lui-même était communiste.
Ce Tintin à peut-être tous les défauts du monde en tant que première BD d'un jeune auteur, mais sûrement pas celle du manque d'engagement,
Hergé choisissant immédiatement son camp, celui de la liberté et de l'humanité.