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4,13

sur 384 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Alerte au coup de coeur pour ce très joli roman au ton parfois dramatique mais souvent très tendre et surtout très humain. J'aurai pu lire d'une traite ce roman tant j'étais captivée autant par l'histoire que par la plume.

L'essence même de ce roman se tient dans la paume d'une femme centenaire, Hectorine. Cent trois ans la dame. Et autant de rides que d'idées, de voyages, d'expériences, de vies et de conseils sages. Affublée dans son appartement parisien, elle entreprend d'écrire des lettres à sa nouvelle voisine, Sarah de l'appartement du dessous. Sous forme d'échanges épistolaires qui font revivre avec ravissement la plume d'un pierrot inspiré au clair de la lune. Quel plaisir de retrouver ce mode de communication désuet de nos jours. Des mots sur une feuille blanche, une plume, de l'encre, je vois Baudelaire, Verlaine, Hugo sourire d'enchantement.

Les écrits de cette dame âgée sont assez surprenants. Elle se délecte d'écrire à sa jeune voisine de longues lettres où elle se penche au départ sur les détails insignifiants du quotidien. Mais bon dieu que cette aïeule écrit bien ! Par contre, Sarah, jeune infographiste moderne n'est pas adepte de ce mode de communication. Les lettres d'Hectorine restent au départ sans réponse. Ensuite, Sarah lui répond qu'elle ne comprend pas pourquoi sa voisine lui écrit, qu'elle n'a ni le temps ni l'envie de tisser un lien avec sa voisine de cette façon. Ce décalage désarçonne mais on est sous le charme de cette aïeule têtue et si sensible. On sent combien l'écriture lui ait nécessaire, le plaisir qu'elle retient de ces confidences couchées sur papier. Tardivement, Hectorine va commencer à ouvrir le chapitre de cette correspondance, déliant à Sarah son passé durant la guerre. Sarah semble hermétique au départ jusqu'à ce que l'émotion la réveille à cette étrange amitié qu'elle commence enfin à nourrir pour sa voisine. Sarah au départ réservée et distante va progressivement mûrir à travers l'écriture. Cette évolution de la plume de Sarah devient un régal.

Ce roman d'une plume magnifique est un hymne à la vie, au destin, aux rencontres bénites, à l'amitié aussi puis se dégage de ce roman une juste et très belle gentillesse. Hectorine adore écrire, s'occuper de sa chatte Suzanne mais ce qu'elle aime par dessus tout, c'est concocter des madeleines qu'elle trempe dans du thé ou qu'elle offre à ses voisins. L'appartement du dessous est l'appartement que tout le monde rêverait d'habiter. Dans cet immeuble, l'humanité est belle à se damner.
Beaucoup de tendresse, d'émotions avec un soupçon de suspens, de secrets, le tout parsemé d'une lumière douce, ce roman fait un bien fou. La plume de Florence Herrlemann est juste, essentielle, belle et toujours sensible sans jamais sombrer dans la guimauve. Un livre succulent où l'émotion est partout. « Un nuage passe devant la lune et lui dessine un sourire. ». C'est tout à fait cela.
Bravo Florence !

En lice pour #le prix horizon de Marche en Famenne (Belgique) présidé par Armel Job.
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Roman épistolaire d'une tendresse infinie ! Florence Herrlemann réinvente la correspondance avec talent, charmant son lecteur en alternant douceur et humanisme. Un roman qui réconcilie les générations, les voisins, et déleste du poids de la culpabilité. » L'appartement du dessous « est publié en cette rentrée littéraire 2019 aux éditions Albin Michel.
Au coeur du quartier du Marais à Paris, Hectorine est la doyenne de son immeuble. À l'âge de cent trois ans elle est une figure incontestable de ce lieu où se côtoient de discrets mais néanmoins truculents résidents.
p. 62 : » Décidément cet immeuble est le terreau de singulières péripéties et de cocasseries en tout genre. «
Depuis près d'un demi-siècle qu'elle occupe son appartement, il faut dire qu'elle en a vu passer ! Mais elle conserve cette même ferveur à offrir l'accueil le plus chaleureux possible à ses nouveaux arrivants.
C'est ainsi qu'en découvrant l'emménagement de cette jeune femme dans l'appartement du dessus, Hectorine décide de lui écrire quelques mots de bienvenue, en ce dimanche ensoleillé du 17 avril.
En effet, Sarah vient d'hériter de cet appartement de son arrière-grand-mère Lene. Malheureusement la missive de la vieille femme reste sans réponse. Un brin contrariée par cette déconvenue et par une nuit écourtée par la pendaison de crémaillère de sa nouvelle voisine, Hectorine se lâche dans une nouvelle lettre, dans un monologue décapant !
p. 19 : » Il faut voir comme on nous parle, et encore, si tant est qu'on veuille bien s'adresser à nous. Comme on nous traite ! de quelle manière on nous considère ! Plus exactement, comment on nous dénigre ! Nous les vieux, les inutiles, les ruines, les vains, les finis, les usés, les démodés, les poussiéreux, les oisifs et pleure-misère. Nous, pleure-misère ? Pour la majorité d'entre nous, nous avons tout juste de quoi subsister en attendant notre fin prochaine. Nous les périmés, nous agrippant pitoyables que nous sommes, à nos idées réactionnaires. Nous les vioques, les croulants décrépits, les fossiles délabrés, les usagés obsolètes. À vos yeux nous sommes pénibles et encombrants, râleurs, radoteurs, menteurs, orgueilleux, hâbleurs, nous octroyant des médailles, pleurnicheurs inconsolables, plaintifs, suintants et dégoulinants , semeurs sans complexe de puanteurs nauséabondes annonciatrices de mort imminente. Car, comble de tout, nous avons l'outrecuidance de vous jeter en pleine figure et de vous rabâcher, en espérant bien vous le mettre dans la tête, qu'un jour, vous aussi les jeunes, vous aussi vous serez vieux, ridés, malades, accablés, seuls, abandonnés et malheureux. Que vous aussi, vous y passerez ! «
Cette fois, la réponse tombe. Sèche et distante, Sarah expédie de manière définitive, l'espère-t-elle en tout cas, cette vieille femme envahissante, dont la correspondance semble être son unique occupation journalière !
p. 31 : » Je voulais aussi vous dire que je travaille beaucoup et n'ai vraiment pas de temps à consacrer à l'écriture. de plus, je ne suis pas très à l'aise avec ce mode de communication. «
Hectorine ne se laisse pas démonter pour si peu. Attentionnée, elle joint même à ses courriers de petites mais sincères marques d'affection. Mais Sarah n'en semble pas touchée pour autant, et feint l'indifférence. Tenace, Hectorine se laisse aller à la confidence. D'origine berlinoise, elle relate des bribes de son enfance, au rythme de ce que son âge lui permet d'écrire.
p. 36 : » C'est à onze ans que j'ai été frappée de plein fouet par l'aride réalité de notre monde, de ce que les hommes en font. C'est à onze ans que la joie de vivre m'a quittée. «
Ainsi, une correspondance régulière se met en place, au gré des confidences. Mais Sarah reste perplexe sur les raisons de ces échanges…
p. 67 : » Vous avez sûrement vécu des choses incroyables et je comprends votre besoin de les raconter. Mais le mieux, je pense, serait que vous écriviez vos mémoires. «
Dorénavant bienveillante plus qu'agacée, Sarah s'attache à Hectorine et à son histoire, et n'hésite pas à lui proposer quelques services. Seulement la vieille dame semble vouloir conserver un certain mystère, notamment sur le fait qu'elle évite soigneusement toute rencontre.
p. 114 : » Laissez-moi le temps, j'ai besoin de ce temps. Vous saurez. Je vous en fais la promesse. Pourquoi insistez-vous pour que nous nous rencontrions ? «
Les confidences se font plus intimes. La complicité naissante n'en devient que plus touchante. Après tout, n'y a-t-il pas une part de lâcheté, ou du moins de facilité, à se confier à l'anonymat d'une interlocutrice ?
Quoiqu'il en soit, ces deux femmes que l'âge éloigne semblent cependant se découvrir des passions communes, malgré des chemins de vie bien différents…
p. 55 : » La littérature a toujours fait partie de ma vie. Elle m'a permis de croire encore en l'humanité, lorsque ce mot n'était devenu pour moi qu'une idée dénuée de sens, une coque vide. Elle m'a indiquée le chemin, m'a aidée à distinguer ce qui a du prix de ce qui n'en a pas. Elle m'a donné la force de continuer à garder la tête haute, à sourire, à ressentir, à rêver. Elle m'a appris à supporter la douleur, le froid, à contenir ma colère, à adoucir mes peines, à grandir, à aimer et aimer encore. Elle m'a sauvé la vie. «
Sarah, quant à elle, travaille pour une petite maison d'édition, en qualité de graphiste et illustratrice.
C'est dans une innommable confession et une délicate pudeur qu'Hectorine retrace sa jeunesse, entre le Cabour de la Recherche, le Berlin du IIIè Reich et le Paris d'après-guerre, faite de brefs instants de bonheur absolu, dans une tragique période de l'Histoire.
p. 107 : » Nous avions franchi une autre dimension. L'humain s'avérait parfaitement inhumain, nous étions réduites à l'état de bêtes par des hommes et des femmes rendus totalement insensibles à nos souffrances : le mal devenait banal, comme l'explique très bien Hannah Arendt. Nous allions vivre un cauchemar sans issue, chaque jour recommencé. C'est à cette époque que je sus ce qu'était véritablement la peur. «
Sarah prend soudain conscience de son attachement à cette femme. Les « Ma chère Hectorine » ont succédé aux « Bonjour Madame » des premières lettres.
p. 139 : » Il y a vous, vous et vos lettres. Elles me dévastent. Comment vais-je pouvoir vous raconter que je vis comme un séisme, à vous, vous qui avez subi des choses tellement… tellement, que les mots manquent aux émotions qu'elles suscitent ? «
Un lien invisible unit ses deux femmes. Une fois la confiance acquise, Hectorine va révéler son terrible secret. Une promesse qu'elle se doit d'honorer pour soulager sa conscience, au risque de perdre cette amitié récente mais scellée par cette correspondance.
p. 230 : » Je vous l'ai promise, je tiens toujours mes promesses. Je sais combien l'ignorance des choses peut être bien plus douce que la vérité. D'avance pardon pour les émois que ces confessions vous causeront. Pardon pour la peine, la déception, mais aussi pour tous les mensonges du début. Il fallait que je m'assure que vous étiez bien l'arrière-petite-fille de Lene. «
Comment susciter l'intérêt du lecteur de la génération de l'immédiateté et des interfaces numériques à ce roman insolite, exclusivement constitué de correspondances ? C'est là que réside toute la virtuosité de Florence Herrlemann.
Le concept, la construction narrative, le développement de l'intrigue… et l'écriture, tout est réuni pour happer le lecteur dans cette histoire ! Mais la réussite incontestable se joue à travers ses deux personnages féminins, incroyablement attachants. Je me suis délectée de chaque page, de chaque lettre, redoutant cette révélation qui me fera clore ce livre et quitter ces deux personnages, avec un réel déchirement.
Lien : https://missbook85.wordpress..
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En ouvrant ce petit livre , je voulais changer de thème , cesser de parler de changement climatique , j'espérais même trouver un peu plus de légèreté aprés des lectures plutôt anxiogènes . Aprés tout , pourquoi ne pas envisager la chose en compagnie de ces deux personnes , Hectorine , 103
ans et la jeune Sarah qui emménage dans l'appartement du dessus , libéré quelques temps auparavant par son occupante décédée . Je n'allais peut être pas trouver des tonnes de légèreté mais la " confrontation " inter-générationnelle allait s'avérer des plus intéressante .
Comment une jeune , trés jeune femme allait -elle résister au " harcèlement "incessant d'une Hectorine aussi têtue que charmante ? Point d'épée pour ce duel mais des lettres posées sur le paillasson par l'une , puis l'autre , puis l'une , puis l'autre jusqu'à ce que s'établisse un lien de plus en plus fort entre les deux protagonistes . Formidable lien puis complicités marqués par des lettres de plus en plus longues , au ton de plus en plus doux si l'on veut bien prendre en compte les en-têtes et formules des missives ....et le contenu .
Incontestablement , Hectorine a des choses à dire et c'est donc à la place de Sarah qu'il faudra nous mettre , tout aussi ignorants que peut l'être la jeune femme .
Si vous aimez les émotions , lancez -vous , " un jour , vous saurez ", vous saurez enfin ce qui peut bien lier ces deux personnages attachants au point qu'en tournant la dernière page , on se sent " tout chose ", tout perdu , tout ému .
Un roman qui mérite le détour , vraiment , alerte , trés touchant et qui devrait vraiment plaire à tous et toutes les lecteurs et lectrices sensibles .
N'ayez pas peur de ce genre épistolaire parfois déroutant mais tout à fait adapté à une situation originale , de bien belles lettres .
Allez , à bientôt chers amis et amies , il parait que le soleil revient , tant mieux .Cette belle histoire est un premier acompte .Si , si , prenez le comme tel et dès demain ...
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Ce roman épistolaire m'a conquise. C'est en passant devant une librairie parisienne que je l'ai acheté. Je l'avais mis, auparavant, dans mon "Pense-bête" et il est venu tout seul entre mes mains...enfin presque.
J'ai beaucoup aimé ce roman doux et dur à la fois, en le lisant vous comprendrez pourquoi...
Dans un petit immeuble à Paris dans le quartier du Marais, Hectorine, 103 ans, voit un jour que l'appartement du dessus est de nouveau habité par une jeune locataire. Comme d'habitude, pour souhaiter la bienvenue à un nouvel habitant, elle dépose une missive et un paquet de madeleines. Petit péché mignon de la vieille dame.
Sarah est surprise par la lettre qui a été déposé au pas de sa porte, la lit mais ne réponds pas. Quand aux madeleines, elle pense que c'est une erreur et le met près des boîtes aux lettres. Mais Hectorine, ne se décourage pas, et lui écrit deux autres lettres avant d'avoir une réponse de Sarah. Cette dernière lui signifie que ce n'est pas son mode de communication et l'invite ce dimanche à son appartement mais Hectorine refuse.
C'est en parcourant ce joli roman que les deux femmes vont apprendre à se connaître. Et Hectorine à des secrets à transmettre à Sarah mais il faudra du temps pour les découvrir.
Un beau récit d'amitié entre générations.
Un joli moment de lecture.
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A l'instar des petites madeleines délicieuses évoquées dans ce livre, je n'ai fait qu'une bouchée croustillante de l'appartement du dessous.
Des histoires comme on les aime, sous une forme un peu surannée , l'échange épistolaire.
Deux femmes en présence, Hectorine, une très vieille femme centenaire et une jeune trentenaire : Sarah.
Hectorine se met à écrire à Sarah en dissimulant ces lettres sous le paillasson de Sarah.
Une étrange mise en scène pour permettre à Hectorine de révéler à Sarah un secret.
Pour cela, il lui faut du temps à notre Hectorine, d'abord il lui faut apprivoiser Sarah qui ne comprend pas et refuse cette correspondance appelée magnifiquement : Répondance.
Puis, Sarah finit par se prendre au jeu et même à attendre fébrilement chaque nouvelle missive de sa voisine du dessous.
Florence Herrlemann est une très bonne conteuse et on est aussi avide que Sarah de connaître la vie tragique d'Hectorine.
Seule la fin est un peu triste puisque quand Sarah finit par être conquise par Hectorine, celle-ci meurt mais elle lui laisse un très bel héritage : une leçon de vie forte et intense.

J'ai vraiment adoré ce petit roman !
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Rares sont les romans contemporains dont la trame est constituée de lettres.
Rares sont les auteurs contemporains qui centrent leur roman sur une vraie correspondance entre les protagonistes et non pas sur un échange de mails.
On pourrait citer :
Claire Fourier dans Il n'est feu que de grand bois, ce sont des lettres enflammées entre un homme et une femme amoureuse.
Dans Ressentiments distingués de Christophe Carlier, les missives anonymes, empoisonnées, causent beaucoup de désordre et la psychose.
Et maintenant au tour de Florence Herrlemann de nous offrir un roman épistolaire. L'originalité tient à ce que le courrier s'échange directement entre deux voisines d'un même immeuble du Marais construit depuis des décennies ( donc au confort spartiate, sans salle de bains). Pas besoin de facteur !
Une lettre n'est-elle pas une âme ? Selon Balzac, «Elle est un si fidèle écho de la voix qui parle que les esprits délicats la comptent parmi les plus riches trésors de l'amour ». Florence Herrlemann remet ainsi au goût du jour la correspondance.

Imaginez-vous en train d'emménager dans un nouvel appartement. Comment prenez-vous contact avec vos voisins ? Ou comment vous accueillent-ils ?
Règlement à respecter, ménage de son palier à effectuer.
La nouvelle résidente, Sarah, sera vite mise au parfum, mais par lettres ! On imagine son étonnement, puis son agacement. Pas moins de quatre reçues de sa voisine du dessous, Hectorine, avant qu'elle se décide à réagir. Sarah ne peut qu'être mal à l'aise de se sentir ainsi épiée, harcelée, envahie par une avalanche de lettres. Elle se dit « perdue », dans la plus totale incompréhension, face à cette insistance de lui « imposer » des lettres. Et le lecteur de partager toutes ses interrogations. Quelle est la finalité de cet échange ( qui va durer des mois) ? Pourquoi Hectorine refuse-t-elle les invitations de Sarah ? Suspense garanti.

Mais qui sont ces deux héroïnes ? On note une fracture générationnelle.
L'une tape ses lettres sur un ordinateur, l'autre sur sa « brave Bar-Let ».
Sarah, graphiste, illustratrice dynamique et créative, la trentaine, « une bien jolie fille », à qui la vieille dame de 103 ans bientôt 104, dépeint le naufrage de l'âge, avec lucidité mais non sans humour et autodérision : « Nous les périmés ».

Au fil des lettres, Hectorine décline sa vision philosophique, pétrie de sagesse, de la vie ( « un instant jubilatoire et fragile ») et de l'amour et offre à Sarah « une oreille » en cas de « besoin de réconfort, de conseils littéraires et musicaux ». Elle clame l'apologie de la littérature , à la vertu salvatrice, qui lui a « appris à supporter la douleur, le froid, à contenir sa colère, à adoucir ses peines, à grandir, à aimer. », et, quelque peu intrusive, cherche à savoir ce que lit Sarah. Sarah, une fois apprivoisée, trouve attachante « son Hectorine » et s'épanche aussi sur ses amours et sa famille.


Florence Herrlemann a l'art de piquer la curiosité du lecteur par cette phrase d'accroche sur le bandeau : « Un jour vous saurez, je vous le promets.. ».
Quelle énigme et quel secret détient celle qui fait cette promesse ?

Hectorine déroule des tranches de vie, de sa « survie », comme un feuilleton.Parfois l'émotion est si intense qu'elle préfère clore sa lettre, mais le lecteur ressent au plus près la persistance du traumatisme qu'elle a subi. La force de ce livre est de ne lever le voile sur le secret lié à l'Histoire qu'à la fin.Nous aussi lecteurs, nous saurons et alors quelle découverte, quelle émotion !

Avec Hectorine, vous allez voyager dans le passé ( aux heures sombres du nazisme), de Berlin à Paris via Cabourg, recueillir ses confidences sur son enfance, ses amours contrariés ( homosexualité condamnée), et sur sa relation avec l'arrière -grand-mère de Sarah. de quoi être tenus en haleine, secoués par toutes ses révélations, sidérés une fois le mystère connu, tout comme Sarah!

Certaines scènes, campant les personnages secondaires, paraissent sorties d'un dessin de Sempé, comme la réunion festive chez les Viaux !
Ou encore cette vision d'Hectorine perdue dans la foule d'une gare où elle fait l'amer constat de l'indifférence : « Personne ne s'intéresse à personne ».

L'alternance des lettres aux longueurs inégales impulse une cadence au lecteur.Une mention météorologique est parfois indiquée. La proximité des deux protagonistes transpire dans l'entête des lettres, de plus en plus affectueuse. Leur lien s'est resserré. Elles ont comme signé un pacte de « confiance et respect mutuel », d'entraide. La bienveillance est leur dénominateur commun. Comme Serge Joncour le fait remarquer dans un de ses romans (1) : « Ils sont rares ceux qui donnent vraiment, ceux qui écoutent vraiment ». Hectorine aime offrir ses délicieuses madeleines !
Par cette correspondance publiée, Sarah offre à son amie du dessous un tombeau de papier, témoin de leur lien indéfectible et atypique.

Florence Herrlemann nous immisce dans la vie d'un immeuble, et explore le lien très singulier, intergénérationnel, qui s'est instauré par lettres entre deux résidentes. Elle ressuscite Proust, nous plonge dans la tragique période des camps. L'auteure dresse, avec beaucoup de sensibilité, le portrait d'une héroïne dont la résistance rappelle le combat de Marceline Loridan-Ivens. Elle brosse également une galerie de tableaux savoureux des voisins. Elle a l'art de nous rendre addictifs aux missives échangées, guettant celle qui va tout éclairer des mystères entretenus, des non-dits. L'ultime lettre d'Hectorine où toute la vérité éclate est si poignante que le lecteur, au bord des larmes, a la gorge nouée.

L'écrivaine signe un roman épistolaire dense, testamentaire, bouleversant jusqu'au dénouement, couvrant deux époques, empreint d'empathie, émaillé de poésie, traversé par les odeurs de madeleines, sur des airs de Chopin. Elle y déploie, avec brio, une ode à « un triptyque essentiel au bon entretien de nos neurones » , composé de littérature, de musique, et de la compagnie d'un chat ! Vient s'ajouter un hymne à l'Amour et à l'Amitié avec une touche de sensualité, de douceur et de tendresse. Gardons à l'esprit le conseil d'Hectorine :« Soyez doux avec vous », « Vivez pleinement ».
Un récit addictif, touchant, débordant d'humanité.

Un livre que « le bouche- à- oreille » a d'ores et déjà propulsé sur le devant de la scène littéraire !!!

(1) : Extrait de REPOSE-TOI SUR MOI de SERGE JONCOUR,
éditions Flammarion.












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Je suis rentrée dans notre librairie préférée avec ma fille pour lui chercher son livre d'éco. Je me suis promis de ne rien acheter d'autre. Sauf que j'avais mis ce livre dans ma PAL depuis longtemps. Sauf que le challenge multidéfis a un item "Tour Eiffel" qui justement, apparaît sur la couverture de mon édition de poche. Bon vous l'avez compris, je n'ai pas résisté. Et tant mieux, car j'ai découvert un joli petit livre, doux et triste à la fois. Je l'ai conseillé à mes filles.
Un roman épistolaire intelligent. Un roman épistolaire qui respecte les styles différents des deux autrices. Une première lettre, une deuxième qui accrochent. On sent qu'il y a quelque chose derrière. Difficile à lâcher surtout qu'il est tout doux, tout tendre, avant de devenir plus mélancolique et triste.
J'ai aimé le récit d'Hectorine, son histoire. J'ai aimé les réponses réalistes de Sarah !
Un joli petit roman que je vous conseille vivement.
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Une délicieuse balade épistolaire, longtemps à sens unique, voilà ce que nous donne à lire ce bel ouvrage singulier, comme parfumé à la fleur d'oranger, un parfum de madeleines.

Hectorine, que l'on découvre d'un âge certain, voit emménager une jeune femme dans l'appartement qui se situe immédiatement au dessus du sien.

Afin de prendre contact, plutôt que de gravir la volée de marches qui les séparent et faire connaissance ‘physiquement', elle préfère taper quelques mots sur sa machine hors d'âge (elle aussi) et déposer un petit billet encré sur le paillasson installé nouvellement.

Un nouveau rituel s'instaure malgré la timidité des retours qu'elle reçoit.

Elle écrit, tape à la vieille machine et inonde sa jeune voisine de ce que l'on pourrait nommer des chroniques où elle se raconte et décrit le quartier comme les autres résidents de l'immeuble.

Elle s'épanche, se confie, exprime son ressenti comme on s'épancherait ou se confierait à une amie ou une dame de compagnie.

C'est délicieux, gentiment suranné sans être ni démodé ni déconnecté de son époque.

Le soliloque d'une vieille dame solitaire qui prend sa jeune voisine sous une aile protectrice qui ne lui a pas été demandée. Cela peut être intrusif, vécu comme la manifestation d'une jalousie inopportune voire même du harcèlement.

La jeune voisine s'en plaint dans les quelques réponses qu'elle rédige, parle de harcèlement, justement, mais, quelque part, mord quand même à l'hameçon qui, sans relâche, essaie de pécher une correspondance difficile à amorcer.

Hectorine se dévoile un peu plus, raconte ses origines et laisse envisager à sa seule lectrice (à nous également) que le hasard n'est peut-être pas le catalyseur de leurs échanges.

La vie passée d'Hectorine noircit les billets qu'inlassablement elle tape de ses vieux doigts de vieille dame sur sa vieille machine dont elle use les vieux rouleaux encreurs. Une biographie se dessine, riche en rebondissements, formidablement heureux où terriblement abominables, qui finit par amadouer la destinataire effarouchée comme des soucoupes de lait tiède domestiqueraient un chat sauvage.

Elle est ferrée.

Une vie se livre aux mots choisis, qui n'a rien d'un long fleuve tranquille mais qui, au contraire, connaît rapides et méandres au moment de se précipiter vers un océan qui mêlera ses eaux tumultueuses à d'autres eaux tumultueuses aussi.

Un très beau roman dont on ne se lasse pas malgré sa forme un peu rigide d'accumulation de petits mots glissés sous les portes d'un appartement parisien.

Un roman enthousiasmant qui vous tient jusqu'aux pages finales qui détiennent, en point d'orgue, un épilogue dramatique que l'on a vu monter comme on monte un escalier,  marche par marche.

Du bel, du très bel ouvrage.

Une lecture qui me fait penser a ‘Brandt rhapsodie', cette géniale chanson de Benjamin Biolay et Jeanne Cheral que j'adore où ils vivent (et meurent) une histoire d'amour par post-it interposés, affichés froidement sur le froid métal du frigo dont la marque a donné son titre à la chanson.
https://youtu.be/FgSlAspjFRc?feature=shared
A chacun son média.
 
 
 
 
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Premier coup de coeur de 2020 ❤

Voir ma vidéo : https://youtu.be/MqrDSdFp1iY

Lu dans le cadre du Prix Horizon du 2ème roman de Marche-en-Famenne (Belgique), édition 2020
Ceci est un roman épistolaire.
Or, le roman épistolaire n'est pas un genre que j'affectionne particulièrement.
Ici, le gros avantage, c'est qu'on ne se perd pas dans un mélange de courriers échangés à des époques différentes ou entre de très nombreuses personnes entre lesquelless on ne discerne mal les liens qui les lient.
La question que l'on se pose dès le départ, c'est pourquoi Hectorine décide-t-elle d'écrire à sa voisine qui vient d'emménager dans l'appartement du dessus et pourquoi tient-elle à avoir une réponse et poursuivre l'échange ? Il faut dire qu'Hectorine a 103 ans et sa jeune voisine, Sarah, 29 ans. Cette question tient le lecteur en haleine durant les 252 pages de ce roman.
La plume de l'auteure est belle et les sentiments qu'elle fait passer sont très forts et touchants.
En refermant ce roman, il est difficile de faire le deuil de ces deux correspondantes si attachantes.
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Merveilleuse lecture, j'ai eu bien du mal à quitter ce roman épistolaire. J'aurais tant aimer que cela dure encore un peu. Quelle belle plume, je me suis délectais, j'ai adoré les personnages, cet échange épistolaire, cette belle entente entre voisins et la grande histoire d'Hectorine.
Je n'ai pas assez de mots pour décrire cerre sensation étrange à la lecture d'un tel livre qui nous emporte. Tout ce que je sais, c'est que c'est magique et tellement fabuleux. La magie de la lecture.
Je n'en dirais pas plus, découvrez ce roman vous m'en direz des nouvelles.
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