« Qui sait vraiment quand commencent les drames, dans quel terreau pourri s'enfoncent leurs racines ? Est-ce qu'on peut en démêler les ramifications jusqu'à leur origine première, jusqu'à la matrice ? Toutes ces questions, je me les suis posées déjà, il y a vingt ans, et voilà que ça recommence, même ici, dans le lieu le plus éloigné des hommes et de leurs grimaces. »
Solak ne sera clairement pas mon prochain lieu de villégiature.
Presqu'île perdue au nord du cercle Arctique, c'est un lieu sauvage, âpre, totalement inhospitalier pour l'homme. C'est pourtant dans ce désert glacé qu'une base a été installée pour assurer la souveraineté sur ce petit bout de territoire. Quatre hommes y vivent, complètement isolés du monde et livrés à eux-mêmes. Quand l'un d'eux se suicide, victime de la solitude extrême et de la folie des lieux, un jeune soldat vient le remplacer.
Dès son arrivée, la tension est palpable dans la base et semble pouvoir dégénérer à tout moment. Ce sentiment de malaise, de violence contenue, hante le récit qui se lit presque en apnée. Une impression accentuée par le fait que le roman soit court (124 pages) et peut donc être lu d'une seule traite.
La tension va aussi crescendo à mesure que la base s'enfonce dans la nuit polaire. le froid s'intensifie de plus en plus, les vents deviennent violents, la lumière disparaît peu à peu et oblige les hommes à rester enfermés dans la base, seuls face à leurs démons. Car si on excepte Grizzly, le scientifique en mission pour quelques mois, les autres sont des militaires et n'ont pas atterri là par hasard. On devine que chacun à de lourds secrets à cacher pour se retrouver ici, à
Solak.
Les personnages sont durs, froids, difficile d'avoir une quelconque empathie pour eux. Ils manquent à mon sens d'un peu plus d'épaisseur, mais il me semble que
Caroline Hinault ait laissé à dessein plané le mystère sur leurs histoires.
Le roman est à l'image de
Solak, saisissant, brut, violent, parfois cru aussi. J'ai parfois frôlé mes limites de tolérances pour une lecture, mais cela ne m'a pas empêché de le lire en entier, accrochée par une intrigue dramatique plutôt captivante.
« Parfois je rêve que la neige et la glace, la banquise tout entière, par fidélité à mon âme nécrosée, sont noires. Totalement noires. Une étendue d'obscurité laquée qui s'étendait à l'infini comme un voile de deuil givré. »