Je me suis laissée prendre par ce roman dont l'idée de départ est vraiment intéressante: une société dans laquelle la douleur n'a plus le droit de cité. Dès qu'une personne est en souffrance, quelqu'en soit la raison (échec scolaire, chômage, deuil), elle est envoyée de gré ou de force en Cellule d'Eradication de la Souffrance où elle se fait "oblitérer": on ne lui efface pas vraiment la mémoire, mais seulement le souvenir de la douleur. Autrement dit, les personnes passées en CEDE ne sont plus totalement comme avant, elles reviennent différentes. Elle éprouvent moins d'empathie et de compassion envers les autres, elles deviennent au fur et à mesure de leurs oblitérations (car on peut en subir plusieurs au cours d'une vie) de plus en plus insensible à leur entourage. A cela s'ajoute l'existence du tout puissant Réseau qui contrôle le moindre fait et geste de chacun. Dans cette société hyperconnectée, plus votre vie virtuelle est intense, mieux vous êtes considéré. A l'inverse, si vous vous absentez trop longtemps du Réseau, vos amis s'inquiètent, vous harcèlent et peuvent aller jusqu'à contacter la CEDE. Il s'agit donc d'une espèce de surveillance par les pairs très efficace. Bien-sûr comme dans toutes les dystopies, deux jeunes héros résistent, un couple, Silas et Astrid, qu'un accident va séparer. le roman construit en 3 parties alterne le point de vue des deux personnages ce qui dynamise l'intrigue. J'ai apprécié les thèmes abordés: les émotions comme éléments constitutifs de notre humanité, la notion de bonheur, la résistance, le terrorisme, l'amour, la technologie et les réseaux sociaux, l'avancée de la science. Les questions que
Florence Hinckel soulève vis-à-vis de notre société actuelle sont terribles! Je suis malgré tout déçue par la fin du roman que je trouve un peu rapide et facile (bâclée?). L'histoire aurait mérité plus de pages ou plusieurs volumes...