celui qui vole par simple désir. Quelle était la différence entre ce genre de personne et un collectionneur ? Ils semblaient tous deux être passionnés et animés par le désir.
Un livre est bien plus qu'un simple véhicule pour son contenu, et de mon point de vue, ce salon mettait cette idée à l'honneur.
Les collectionneurs qui évoquent les livres qu'ils viennent tout juste d'acquérir, ou ceux sur lesquels au contraire ils n'ont pas réussi à mettre la main, en parlent comme des don Juan se remémorant leurs conquêtes. (p. 98)
Un livre est bien plus qu'un simple véhicule pour son contenu
"Ne jugez pas un livre à son contenu ! " J'en avais suffisamment lu sur les collectionneurs avant le salon pour comprendre la plaisanterie: de nombreux collectionneurs ne lisent pas leurs livres. Au début, je fus surprise, mais en y repensant, je compris que cela n'avait rien de si étonnant. Après tout, une grande partie de la tendresse que les lecteurs avides et les collectionneurs ont pour leurs livres est liée au corps même de l'objet. Les livres sont autant de contenants pour des histoires (sans négliger la poésie, les informations de référence) que des objets historiques et les dépositaires de souvenirs. (p. 34)
Que ce soit du fait de conquérants ou à cause de collectionneurs véreux, les livres finissent par disparaître et, à moins que le voleur n'essaie de revendre le livre à un libraire réputé ou à une institution peu de temps après l'avoir dérobé, il y a de bonnes chances pour que l'on ne remonte jamais jusqu'à lui, m'a-t-on dit. Le livre finit par être revendu, au bout d'un an, d'une décennie, d'un siècle, à quelqu'un qui ignore tout de son passé trouble. Il est impossible de dresser un historique des propriétaires d'un livre. Ça, me dis-je, c'est un élément que les voleurs de livres avisés ont bien compris.
Sur un coin de mon bureau repose un livre vieux de presque 400 ans, enveloppée de nombreux mystères et d'un vieux sac de lin.
j'aurai conservé un livre qui ne m'appartient pas, et j'aurai essayé de ne pas penser à ce que cela disait de moi.
Mon remède préféré, toutefois, concerne la déprime. "Souvent, la juste gaieté nous manque, et si nous n'avons pas de vin à cet instant, nous serons pleinement satisfaits lorsque nous en aurons."
Il ouvrit l'étui et, à ma grande surprise, m'invita à feuilleter les pages légèrement jaunies. Elles étaient écrites à l'encre brune, qui s'était quelque peu estompée, tout comme les taches et les éclaboussures qui parsemaient les pages. Plusieurs lignes avaient été agressivement rayées. Moirandat expliqua que Flaubert aurait pu écrire ce texte au cours d'un voyage.
"Mais je suis persuadé qu'il ne l'a pas écrit pendant son périple. La graphie est trop propre."
Il me lut un passage à voix haute en français :
Je m'abstiendrai donc de toute déclamation et et je ne me permettrai que six fois par page le mot pittoresque et une douzaine de fois celui d'admirable (...) je veux que mes phrases sentent le cuir de mes souliers de voyage (...)